
Entre 2008 et 2021, le nombre de jeunes préparant un diplôme dans le champ de l’environnement a progressé de 78%, selon les données publiées en janvier par le ministère de l'Aménagement du territoire et de la Transition écologique. Cependant, certaines formations semblent plus attractives que d'autres pour les étudiants.
"Globalement, nous accueillons 10 à 15% d'étudiants supplémentaires chaque année", affirme Armand de Coussergues, président depuis 2015 de l'Institut supérieur de l'environnement.
Dans cette école privée dont les diplômes sont reconnus par l'Etat, les étudiants se forment majoritairement à la QHSE (qualité, hygiène, sécurité et environnement), la RSE (la responsabilité sociétale des entreprises), dans les bâtiments durables et la biodiversité.
Une insertion en entreprise nuancée
En termes de débouchés, seuls 7% des étudiants issus de filière en lien avec l'environnement exercent un métier dans ce domaine, en 2020, indiquent les chiffres du ministère. Pourtant, 47% d'entre eux déclarent travailler dans une entreprise dont l’activité est liée à l’environnement et 49% indiquent que leur métier nécessite des compétences dans ce domaine.
L'insertion professionnelle tient donc essentiellement aux entreprises, qui traitent de plus en plus cette dimension de façon transversale. "Les entreprises qui recrutent sont de toute taille et de tout secteur, assure Armand de Coussergues. Les enjeux de durabilité sont désormais intégrés et de nouveaux métiers apparaissent comme celui de chef de mission biodiversité."
Aux Arts et Métiers, le choix a ainsi été fait de ne pas ouvrir de filière dédiée à l'environnement, mais "d'intégrer les problématiques qui y sont liées dans toutes nos formations, afin de développer la capacité d'adaptation de nos étudiants", appuie Nadège Troussier, directrice générale adjointe en charge des formations de l'école d'ingénieurs.
Une filière recherche exigeante
"Nos masters de recherche ne font pas toujours le plein", reconnaît, de son côté, Benoît Gabrielle, vice-président développement soutenable et responsabilité sociétale de l'université Paris-Saclay, anciennement directeur de la Graduate School Biosphera (Biologie, Société, Ecologie & Environnement, Ressources, Agriculture & Alimentation). "Nous disposons de six mentions de master et une trentaine de parcours pour les M2 liés à l'environnement. Il est difficile de dire si certaines filières sont plus touchées que d'autres, car les effectifs fluctuent d'une année à l'autre", explique-t-il.
Les filières de recherche font toutefois des efforts pour gagner en visibilité. "La plateforme Mon Master notamment nous y a aidés, nous sommes parvenus à stabiliser nos effectifs", avance Solene Turquety, professeur à la Sorbonne en charge de la partie enseignement de la Climate Graduate School. Mais si ces formations dénombrent moins de demandes d'inscription et d'étudiants (les M2 ont des effectifs compris entre 10 et 20 étudiants), c'est aussi parce que le niveau exigé est élevé. "Beaucoup de candidats n'ont pas le niveau requis", confirme Solene Turquety.
Des débouchés plus limités en recherche
"Nos domaines de recherche et d'insertion professionnelle sont aussi très spécifiques, ce qui réduit le nombre de candidats potentiels. Par ailleurs, nous n'avons pas besoin de former chaque année cent spécialistes dans chaque domaine. L'offre doit s'adapter aux débouchés post-diplôme", complète Benoît Gabrielle. Ce dernier note également que si les diplômés de ces filières se disent "satisfaits de leur niveau d'emploi suivant leur master", un bémol est mis sur les salaires.
Du côté de la Climate Graduate School, les efforts en matière de suivi des étudiants diplômés vont être renforcés et une plateforme d'offres de stages en laboratoire, mais aussi dans des entreprises ou des bureaux d'études, est en cours de déploiement. "Les trois-quarts de nos étudiants envisagent une thèse après leur master, mais certains regrettent parfois que leur objet de recherche ne pousse pas immédiatement à l'action pour le climat. Nous tâchons alors de les accompagner pour trouver un stage plus concret qu'en laboratoire", concède Solene Turquety.
Quel impact de la politique américaine sur la recherche dans ce domaine ?
La pression qui s'abat sur les universités américiane, les coupes budgétaires et les tentatives de censure de certains sujets de recherche aux Etats-Unis par l'administration Trump peuvent-elles avoir un effet sur les filières scientifiques en France ?
"En recherche, cela ne décourage pas nos étudiants. Ils sont très engagés dans leur discipline, mais il est clair que nous ne les encourageons pas à aller étudier aux Etats-Unis", reconnaît Solene Turquety.
Benoît Gabrielle reste lui confiant, comptant sur la solidarité européenne en faveur de la recherche sur le climat.