Salaire femmes-hommes. Les jeunes diplômées demandent toujours 20% de moins

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Salaire femmes-hommes. Les jeunes diplômées demandent toujours 20% de moins
Les étudiants masculins escomptent un salaire annuel de 35.300 euros, quand les filles, elles, n'attendent que 30.400 euros. // ©  Plainpicture/Hollandse Hoogte/Hollandse Hoogte
Les chiffres le confirment d'année en année : les femmes et les hommes n'arrivent ni avec les mêmes chances ni avec les mêmes attentes sur le marché du travail. Résultats en exclusivité de l'enquête 2015 de l'Institut Trendence, partenaire de l'Etudiant. 

Salaires escomptés, équilibre entre la vie professionnelle et personnelle, intérêt des missions et profil des entreprises recherchées. Sur tous ces sujets, les étudiantes n'envisagent pas leur carrière comme leurs homologues masculins. L'Institut Trendence, qui a interrogé 20.000 étudiants d'écoles de commerce ou d'ingénieurs sur les entreprises dans lesquelles ils aimeraient postuler et sur leurs attentes quant au monde du travail, le confirme : les déterminismes de genre persistent dès l'entrée sur le marché du travail.

BNP pour les hommes, LVMH pour les femmeS

Le type d'entreprise recherchée n'est ainsi pas le même entre étudiants et étudiantes en écoles de commerce : banque, conseil et Internet (BNP, Ernst&Young et Google) s'imposent dans le trio de tête pour les garçons.

Pour les filles ce sont des entreprises de l'univers du luxe et de la beauté - LVMH, L'Oréal - suivies de Danone qui emportent la majorité des suffrages.
LVMH n'arrive qu'en quatrième position dans les choix des garçons.

Autre différence notable : 6,5% des étudiantes envisagent de postuler à la Commission européenne, alors que l'institution n'est pas représentée dans les 20 premières organisations plébiscitées par les garçons.

Classement Trendence 2015 des employeurs préférés des étudiants européens en commerce et management (1)

Hommes

Rang 2015 Top Employeurs 2015 Rang 2014
1 BNP Paribas 4
2 Google 1
3 EY (Ernst & Young) 2
4 LVMH 5
5 Ubisoft 18
6 KPMG 6
7 Deloitte 10
8 Canal+ 7
9 McKinsey & Company 8
10 Apple 15
10 BCG 9

Femmes

Rang 2015 Top Employeurs 2015 Rang 2014
1 LVMH 1
2 L'Oréal 2
3 Danone 4
4 EU Institutions – EU Careers 3
5 Google 7
6 EY (Ernst & Young) 9
7 Chanel 8
8 KPMG 13
8 Nestlé 6
10 Air France 12


Classement Trendence 2015 des employeurs préférés des étudiants européens en ingénierie et informatique (1)

Hommes

Rang 2015 Top Employeurs 2015 Rang 2014
1 Airbus Group 1
2 Google 3
3 SAFRAN 2
4 Thales 4
5 Dassault Aviation 6
6 EDF 5
7 Groupe VINCI 7
8 Total 10
9 Dassault Systèmes 17
9 Ubisoft 16

Femmes

Rang 2015 Top Employeurs 2015 Rang 2014
1 L'Oréal 1
2 Airbus Group 2
3 Groupe VINCI 6
4 EDF 3
5 Veolia Environnement 4
6 LVMH 10
6 SAFRAN 7
8 Thales 9
9 Nestlé 8
10 CNRS 5


(1) Les étudiants ont répondu à la question suivante : “Chez quels employeurs ­allez-vous vraisemblablement postuler après votre diplôme ?” Avec la possibilité de choisir jusqu’à trois entreprises.

Apprendre à négocier et ne pas se dévaloriser

Au-delà du choix de l'entreprise, cette étude révèle des écarts importants en termes d'attente salariale. Toutes écoles confondues, les étudiants masculins escomptent un salaire annuel de 35.300 euros, quand les filles, elles, n'attendent que 30.400 euros.

"Nous sommes pourtant ici face à une génération qui a tout pour elle : une mère qui travaille, des parents qui avaient une ambition pour leurs enfants, une connaissance des enjeux de l'égalité professionnelle, après 15 ans de forte mobilisation et communication sur le sujet..." se désole Marie Donzel, dirigeante d'un cabinet de conseil expert des questions d'égalité et auteure du rapport Eve et Donzel sur l'égalité professionnelle. "Un écart de salaire de 20% en début de carrière représente un demi-million de dollars en fin de carrière !" souligne-t-elle.

Un écart de salaire de 20% en début de carrière représente un demi-million de dollars en fin de carrière !
(M. Donzel)

Pour Marie Donzel, ces résultats sont une rémanence du rapport des femmes à l'argent. "On n'éduque pas assez les filles à aimer l'argent", explique-t-elle. En entretien, les femmes sont plus volontiers enclines à justifier leurs salaires par leurs besoins (éducation des enfants par exemple), que par leur diplôme ou leur statut social, ce que font volontiers les hommes. "Si je prends mon cas personnel, j'ai appris à bâtir un CV, à passer des entretiens d'embauche, à activer mon réseau : mais personne ne m'a appris à négocier un salaire !" pointe-t-elle.

Des étudiantes inquiètes mais attachées à l'éthique

Dans leur vie professionnelle, les filles se distinguent toutefois par une recherche de sens et de dimension éthique. Interrogées sur la perspective de travailler dans une entreprise ayant une mauvaise image en échange d'un bon salaire, 29,1% des étudiants se disent prêts à accepter, contre 17,7% pour les étudiantes.

De la même manière, les étudiantes attachent moins d'importance aux signes extérieurs de réussite (voiture de fonction, carte de crédit, etc.) qu'à une liberté d'organisation (45% des garçons d'écoles d'ingénieurs partagent cet avis contre 50% des femmes).

Ce ne sont pas les femmes toutes seules qui vont rendre l'économie et les entreprises plus éthiques, mais les entreprises, en étant plus mixtes.
(M. Donzel)


Pour Marie Donzel, il faut tout de même se méfier de l'idée d'un leadership féminin plus tourné vers le sens. "C'est un piège pour les femmes et un frein caché ; car ce ne sont pas les femmes toutes seules qui vont rendre l'économie et les entreprises plus éthiques, mais les entreprises, en étant plus mixtes."

Enfin, les étudiantes se révèlent beaucoup plus inquiètes que les garçons pour leur avenir professionnel : elles sont entre 55% et 59% à penser qu'il leur sera difficile de trouver un emploi et près de 68%, pour les étudiantes en écoles de commerce, à être préoccupées pour leur avenir, contre 54% seulement des garçons. Comme si, avant même d'y entrer, les filles avaient intégré les inégalités du marché du travail.


L'enquête de l'Institut Trendence

L'Institut Trendence interroge chaque année plus de 20.000 étudiants d'écoles d'ingénieurs et de commerce, pour établir son palmarès des entreprises dans lesquelles les étudiants rêvent de postuler, une fois diplômés. Cette année, pour la première fois, des jeunes inscrits à l'université ont aussi été sondés.

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