Site de Toulouse : ce que le financement France 2030 change pour les établissements du supérieur

Guillaume Mollaret Publié le
Site de Toulouse : ce que le financement France 2030 change pour les établissements du supérieur
L'université Toulouse 3-Paul Sabatier, l'un des membres du projet Tiris. // ©  Lydie Lecarpentier / R.E.A
Après de nombreux atermoiements, le projet Tiris, porté par la Comue de Toulouse, obtient 38,3 millions d’euros dans le cadre du PIA 4 - France 2030. La Région Occitanie promet d’abonder d’autant. Un soulagement pour le site toulousain après des années de crise institutionnelle.

Malgré la canicule, l’enseignement supérieur toulousain respire ! Le projet Tiris, présenté à l’Agence nationale de la recherche (ANR) dans le cadre de l’appel à projet PIA4 - France 2030, a été retenu début juillet. Il obtient même le plus important financement (38,3 millions d’euros) de cette deuxième vague de labellisation qui voit 17 projets retenus.

Le projet Tiris sera aussi accompagné par la Région Occitanie qui s’est engagée à abonder du même montant. Ce sont 76,6 millions d'euros étalés sur dix ans qu’obtient le projet porté par la Comue Université fédérale de Toulouse Midi-Pyrénées.

Travailler sur des sujets mêlant sciences dures et SHS

"Il nous faut à présent finaliser les statuts de la Comue expérimentale ; les faire valider par les différents établissements ; et les envoyer au Cneser pour que tout cela sorte le 1er janvier 2023", se projette Philippe Raimbault, président de l’université fédérale.

Sur le plan scientifique, le projet Tiris promet de mettre l’accent sur "trois défis sociétaux clés, en phase avec les priorités des secteurs privé et public locaux : la santé et le bien-être ; le changement global et son impact sur les sociétés ; et les transitions durables." Une perspective interdisciplinaire mêlant sciences dures et sciences humaines et sociales, notamment demandée par les équipes de recherche et leur laboratoire.

"Il y a une vraie appétence des personnels enseignants-chercheurs et non enseignants-chercheurs pour travailler sur des projets transversaux. Cela donne du sens à nos actions", affirme Clément Varenne, le secrétaire académique Unsa ITRF Bio à Toulouse. "Nous étions en dehors de tout label depuis la perte de l’Idex en 2016. L’une des conséquences est que le site avait du mal à être attractif pour les métiers de l’enseignement et de l’appui à la recherche", analyse-t-il en espérant que l’organisation future engendrée par Tiris permettra à l’enseignement supérieur toulousain de retrouver une dynamique après des polémiques en série.

Recréer une dynamique de site loin des polémiques institutionnelles

Car jusqu’à l'hiver, le site toulousain était au bord de l'implosion avec le risque de voir un projet concurrent à Tiris - notamment porté par Toulouse School of Economics (TSE) - être déposé, dans le cadre de l'appel à projet. "Les choses ont bien évolué depuis. Le fait que TSE a obtenu une autonomie RH à travers le projet grand établissement nous permet de nous parler sur le terrain scientifique. Je suis assez confiant", certifie Philippe Raimbault.

Il y a une vraie appétence des personnels enseignants-chercheurs et non enseignants-chercheurs pour travailler sur des projets transversaux (C. Varenne, Unsa ITRF Bio)

Le président de l’université Toulouse 3 – Paul Sabatier, s’il est également optimiste dans la conduite du projet scientifique demeure toutefois plus prudent sur l’analyse institutionnelle, tant la communauté a été échaudée. "Sur le plan de la recherche, nous allons mettre les choses en place de façon collégiale. Cela va fonctionner car ce sont les équipes de terrain qui ont élaboré le projet. Ce genre de choses ne s’établit pas dans un bureau de président, évacue ainsi Jean-Marc Broto. Sur le plan institutionnel, c’est en revanche une autre affaire, mais j’espère qu’à l’issue de cette expérimentation le site toulousain sera reconnu comme une université de recherche intensive."

En effet, le statut de Comue expérimentale ne permettra pas à la communauté du supérieur et de la recherche toulousaine de bénéficier d’une signature unique pour ses publications scientifiques et donc de figurer dans les grands classements internationaux, à l’instar des huit universités labellisées Idex et Isite.

Les financements de Tiris essentiels pour l'attractivité auprès des enseignants-chercheurs

En ce sens, bien que désormais (re)placé sur de bons rails pour y parvenir, Toulouse a toujours ce petit train de retard que Tiris et ses financements doivent lui permettre de combler en matière d’attractivité de personnels alors que dans le même temps, les effectifs étudiants eux ne cessent d’augmenter.

J’espère qu’à l’issue de cette expérimentation le site toulousain sera reconnu comme une université de recherche intensive. (J-M Broto, UT 3)

"Les appels à projets vont amener des financements, ce qui est très bien, mais il manque des fonctionnaires pour faire face à la croissance du nombre d’étudiants, pointe ainsi Patrick Piera, secrétaire académique SNPTES, et élu au conseil d’administration de l’Université fédérale et de Sciences po Toulouse. Il y a beaucoup de contractuels qui, souvent, ne restent qu’un ou deux ans. Or, Tiris nécessite une implication sur le long terme à l’heure où l’on observe une certaine volatilité. La Comue actuelle compte 280 personnels dont 80 fonctionnaires seulement", relève-t-il.

Philippe Raimbault, lui, se veut optimiste sur ce point. "Les moyens actuels ne sont pas suffisants et il faudrait pouvoir recruter, c’est vrai, des enseignants permanents même s’il y a déjà de l’hybridation et du travail en pool. Les appels à projets apportent des fonds significatifs. Ils sont importants pour l’attractivité des enseignants-chercheurs. En termes de taux d’encadrement, nous allons réduire le différentiel", soutient-il pour commenter un mal qui n’est pas propre à Toulouse.

Si l’enseignement supérieur toulousain n’a probablement pas pansé toutes ses plaies. Au moins peut-il désormais regarder de l’avant. La promesse de financements autour de projets scientifiques communs a, au moins en surface, diffusé le baume apaisant de la réussite.

Guillaume Mollaret | Publié le