Un "Plasti Campus" pour revaloriser la filière plasturgie

Frédéric Dessort Publié le
Le gouvernement a lancé en février 2014 un deuxième appel à projets de labellisation des campus des métiers et des qualifications. Coup de projecteur sur le Plasti Campus de l’Ain, tout premier du genre.

Vincent Peillon et Arnaud Montebourg, respectivement ministre de l'Éducation nationale et ministre du Redressement productif, s'étaient déplacés en octobre 2013 pour couper le cordon inaugural. Le Plasti Campus d'Oyonnax (Ain) est en effet le premier campus des métiers d'une série de quatorze. L'objectif à terme est d'au moins un par région. Présentés comme "le second étage des pôles de compétitivité", ils sont censés fluidifier le schéma formation initiale-recrutement-formation continue par un meilleur interfaçage des acteurs. Une impulsion dont le contenu est proche d'une circulaire visant à la création de "lycées des métiers" ­signée par... Jean-Luc Mélenchon en 2001, alors ministre de l'Enseignement professionnel. Douze ans plus tard, le mot d'ordre donné par l'État ne doit pas pour autant faire oublier le rôle des Régions, qui financent les lycées.

Michel Berçot - plasti campus // DRÀ Oyonnax, bassin économique et berceau de la plasturgie hexagonale, le Plasti Campus est porté par le lycée polyvalent Arbez-Carme. Cet établissement d'environ 850 élèves comprend entre ­autres une filière plasturgie (bac pro, BTS et licence pro). "Plasti Campus est une démarche résolument ­collective, qui rassemble le lycée Arbez-Carme, l'INSA, le Greta Val Bugey Léman, l'université de Chambéry, le Pôle européen de plasturgie, le pôle de compétitivité Plastipolis..., se réjouit Michel Berçot, responsable pédagogique au lycée Arbez-Carme, en charge de la coordination du projet. Il s'agit de rassembler des ­acteurs qui travaillaient déjà ensemble, mais de manière plus ou moins distendue, et de mettre sur la table tous les problèmes à résoudre." Pourtant, le taux d'insertion professionnelle des élèves passés par la filière plasturgie du lycée avoisinerait les 100 %, assure-t-il. Un chiffre qui peut s'expliquer notamment par la pénurie de candidats.

Les professionnels déplorent le manque d'attractivité du secteur. En croissance à l'échelle mondiale, en France, en revanche, il subit des délocali­sations depuis une vingtaine d'années vers des pays ­émergents. Une morosité qui a contribué à affaiblir l'image de la plasturgie qui compte en outre plus de 20 % d'intérim dans les fonctions productives – environ 50 % des effectifs – d'après la Fédération nationale des industries chimiques de la CGT. Avec des salaires en baisse, en particulier chez les techniciens. Toujours selon le syndi­cat, l'effectif national serait passé de 162.000 à 142.000 salariés entre 2000 et 2010. Le pôle de compétitivité Plastipolis évalue aujour­d'hui cet effectif à 136.000 salariés.

Suivre le train de l'innovation

Une réponse ? L'innovation, l'innovation, et encore l'innovation. "Ce travail collaboratif élargi nous permet d'identifier plus finement les besoins des entreprises en termes d'actualisation de compétences, dans le sillage de l'évolution rapide des techno­logies", souligne Michel Berçot. Or, le ­bassin d'Oyonnax et plus largement la région Rhône-Alpes disposent de forces bien établies en matière de R&D. Il faut compter avec le Pôle européen de plastur­gie, un important centre technique travaillant pour le compte d'industriels. Une bonne part de ses ­80 salariés intervient au lycée d'Arbez-Carme.

Autres acteurs : l'INSA de Lyon, implanté à Oyonnax, et le pôle de compétitivité Plastipolis. Celui-ci compte environ 250 entreprises et a animé 125 ­projets de R&D depuis 2005. "La plasturgie se ­développe aujourd'hui au-delà de ses marchés ­historiques – automobile, bâtiment, emballage – via des filières telles que les nouvelles énergies, les ­bioplastiques, l'intégration de l'électronique dans les matières plastiques, l'impression 3D...", explique Michel Vuillermoz, directeur général de Plastipolis.

L'apprentissage de ces technologies nécessite bien entendu de travailler sur des plates-formes techniques. "Dans leurs projets de stages, notamment, les élèves vont accéder, dans le cadre d'une meilleure coordination, au réseau d'équipements des acteurs du Plasti Campus", précise Michel Berçot. Reste à mettre en musique cette convergence ­d'acteurs dont, pour l'heure, Plastipolis est une courroie informelle : une structuration juridique est toute­fois prévue dans les prochains mois.

Frédéric Dessort | Publié le