Xavier Vitart : "60% du budget de l'INSTN provient de la formation continue"

Olivier Monod Publié le
Xavier Vitart : "60% du budget de l'INSTN provient de la formation continue"
Xavier Vitart directeur de l'INSTN // © 
En dix ans, l'Institut national des sciences et techniques nucléaires – une émanation du CEA – s'est détaché des subsides de l'État en développant la formation continue. Comment ? Réponses avec son directeur, Xavier Vitart, avant la conférence EducPros du 11 décembre, "Formation continue : nouvelle cash-machine".

Vous êtes directeur d’un établissement d'enseignement supérieur public, l’INSTN (Institut national des sciences et techniques nucléaires), dont la subvention de l'État ne couvre que 40% des dépenses. Vous avez une formule magique ?

60% de notre budget provient de la formation continue. Nous accueillons 65.000 personnes par an autour de 230 stages et une vingtaine de formations sur mesure.

Cela demande un lien étroit entre la formation initiale et la formation continue. Quand on développe une formation initiale, il faut réfléchir à comment elle va irriguer la formation continue. Récemment, nous avons acquis un logiciel de simulation en radiothérapie. Nos étudiants vont pouvoir s’exercer sur des cas réels, faire des erreurs et apprendre de leurs erreurs sans mettre en danger les patients. Ce logiciel, unique en France, a un coût, 100.000 euros, nous allons donc proposer des journées de formation à destination des professionnels.

Pourquoi avez-vous misé sur la formation continue ?

En 2004, notre subvention couvrait toutes nos dépenses de personnels. Aujourd’hui, elle ne représente que 80% de notre masse salariale. À l’époque, nous réalisions déjà de la formation continue pour le compte du CEA, notre tutelle. Cette activité a disparu depuis, mais elle nous a servi de base pour développer une formation continue à destination de l’extérieur.

En quoi l’approche formation continue change-t-elle par rapport à la formation initiale ?

En formation continue, il est primordial de valoriser la satisfaction des stagiaires. Cela passe par une grande attention portée à la qualité des enseignants mais aussi des locaux. Nous avons des questionnaires de satisfaction systématiques à l’issue des stages.

En formation continue, il est primordial de valoriser la satisfaction des stagiaires.

L’évaluation des enseignements est pourtant un sujet compliqué dans l’enseignement supérieur, comment ont réagi vos enseignants ?

Nous sommes un modèle unique dans le milieu de l’enseignement supérieur. Nous n’avons pas de laboratoire au sein de l’INSTN. Notre corps enseignant est très particulier. Nous pouvons nommer par décret et pour trois ans des maîtres de conférences qui ne sont pas nécessairement issus du monde universitaire. Nos enseignants se consacrent intégralement à l’enseignement. Nous sommes dans une démarche d’innovation et de progression pédagogique avec nos équipes. Par ailleurs, sur les 1.400 dossiers de vacations que nous gérons par an, beaucoup sont des experts et des professionnels.

Que conseilleriez-vous à un dirigeant d’établissement souhaitant développer son offre de formation continue ?

Je pense qu’il y a trois clés. La première, c’est de répondre à un besoin. Il faut savoir quel est le niveau de qualification demandé par les entreprises de son secteur et mettre en place des groupes de travail avec elles sur les besoins en termes de formation.

Ensuite, il faut disposer des ressources pédagogiques suffisantes. Le CEA nous permet de puiser dans un vivier de compétences très larges et très diverses, 75% de nos enseignants viennent du CEA. Nous pouvons donc nous adapter aux demandes.

Enfin, il faut avoir une bonne structure administrative réactive et efficace. Nous avons des responsables pédagogiques qui animent les formations et gèrent les enseignants. Mais nous avons aussi une trentaine de personnes en charge de l’administration, de la logistique mais aussi de l’édition d’un catalogue de formations…

Si la formation continue marche aussi bien pour vous, c’est que vous avez peu de concurrence dans le domaine du nucléaire, non ?

Détrompez-vous. La concurrence est rude avec des écoles d’ingénieurs, des organismes de formation continue ou les entreprises qui développent leur propre système de formation en interne. Il faut se différencier, rester référents dans le domaine. Cela nous demande aussi d’être au contact des professionnels pour être au plus près de leurs attentes, voire les anticiper.

La secrétaire d'État à l'Enseignement supérieur et à la Recherche, Geneviève Fioraso, a fait du développement de la formation continue dans les universités une des mesures phares de l'année 2014-2015. Qu'en pensez-vous ?

Toute source d’argent est bonne à prendre. Nous avons misé sur la formation continue car notre secteur le permettait, mais nous pensons aussi à créer notre fondation et à développer l’alternance. Nous nous sentons assez proches de certains objectifs de la loi du 22 juillet 2013. De par notre statut et notre positionnement, nous sommes proches des milieux de recherche et des milieux industriels.

 

Qu’est-ce que l’INSTN ?
L’INSTN est un établissement d’enseignement supérieur créé par décret en 1956. Il est géré par le Commissariat à l’énergie atomique sous la tutelle du ministère de l’Écologie et du Développement durable, du ministère de l’Industrie et du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
L’INSTN délivre 4 diplômes en propre. Un diplôme de spécialisation d’ingénieur en génie atomique, un diplôme de physicien hospitalier, un titre de technicien de radioprotection, et un BTS en radioprotection. Ces 4 diplômes concernent 250 étudiants. L’INSTN cohabilite aussi 32 formations à travers toute la France, ce qui porte à 1.100 le nombre d’étudiants formés chaque année. Par ailleurs, l'institut compte 65.000 stagiaires de formation continue par an.
 Conférence EducPros du 11 décembre :  "Formation continue : nouvelle cash-machine"
Olivier Monod | Publié le