"Il faut rendre justice au travail énorme effectué par les écoles d’art"

Propos recueillis pas Sophie de Tarlé Publié le
"Il faut rendre justice au travail énorme effectué par les écoles d’art"
Emmanuel Tibloux, directeur de l'Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Lyon et président de l'ANDeA (association nationale des écoles supérieures d'art) ©sdetarle // ©  Sophie de Tarlé
Livret de l'étudiant, dispositifs d'insertion professionnelle, prépas publiques... Les écoles d'art se réforment. Emmanuel Tibloux, directeur de l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Lyon et président de l’ANdEA (Association nationale des écoles supérieures d’art), l'explique à EducPros et revient sur les axes de progrès définis par l'AERES dans ses derniers rapports d'évaluation.

Qu'est ce qui a changé dans les écoles d'art ces dernières années ? 

Il faut rendre justice au travail énorme effectué par ces écoles. L’AERES (Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur) l’a d’ailleurs  reconnu, à travers des rapports très positifs, qui relèvent de nombreux points forts, tels que la “haute qualification du corps enseignant”, la “pertinence du positionnement en matière de recherche” et la "qualité des partenariats professionnels et universitaires". Ce que l’AERES vient finalement reconnaître, c’est la double nature de nos établissements, qui parviennent à conjuguer les normes et les exigences de l’enseignement supérieur, et les spécificités et les atouts de l’art et de la culture. Et là où il y a cinq ans cela n’allait pas de soi, cette double dimension est aujourd’hui ce qui fait notre force. 

Quelles ont été les conséquences concrètes de la masterisation ?

D’abord, une meilleure lisibilité de notre offre de formation, du fait notamment de tout le travail mené à l’occasion de la rédaction des livrets de l’étudiant et des premières évaluations par l’AERES.

Un certain nombre d’outils et de procédures, en particulier les dispositifs de suivi de l’insertion professionnelle des diplômés qui se sont développés dans toutes les écoles, ou la façon dont les étudiants sont désormais impliqués dans la réflexion sur l’offre pédagogique.

La masterisation a également eu pour effet de favoriser les partenariats avec les universités et les grandes écoles à travers des formations croisées par exemple.

Elle nous a enfin conduits à développer la recherche, soit dans un rapport étroit avec les universités ou les grandes écoles, comme c’est le cas à Paris avec le programme doctoral SACRE, soit par la mise en place de troisièmes cycles, d'unités et de programmes de recherche comme c'est le cas dans la plupart des écoles.

Quels sont les changements apportés en termes de communication ?

La communication est aujourd’hui beaucoup plus claire.  Désormais publié sur le site de chaque école, un livret de l’étudiant détaille tous les enseignements. A l’ANdEA, nous avons par ailleurs édité une brochure de présentation du réseau des écoles supérieures d’art publiques, qui permet de connaître les spécialités des différentes écoles. Tirée à 30.000 exemplaires dans sa version française, elle est téléchargeable sur notre site.

Et dans un souci de simplification, il est prévu qu'il y ait désormais un seul et unique diplôme de premier cycle, le DNA (diplôme national d'art) en lieu et place des deux diplômes actuels, le DNAT (diplôme national d'arts et techniques) et le DNAP (diplôme national d'arts plastiques).

Nous ne prévoyons pas de créer de concours commun car chaque école souhaite garder sa singularité.

Concernant les admissions, quelle est votre position vis-à-vis du site Admission-postbac ?

Le calendrier d'Admission-postbac n’est pas adapté aux écoles d’art. La date de publication des résultats est beaucoup trop tardive. Ce qui oblige le candidat à former des vœux en amont du passage du concours, auxquels il doit ensuite se tenir sans pouvoir changer d'avis. Alors que le choix d’une école se joue souvent dans la rencontre avec une équipe, un site, une ville. Nous ne prévoyons pas non plus de créer de concours commun, car chaque école souhaite garder sa singularité.

Nous sommes conscients que les prépas privées se sont beaucoup développées ces dernières années. C’est pourquoi nous cherchons à développer les classes préparatoires publiques, y compris dans les écoles d’art elles-mêmes. Les deux dernières se sont ouvertes dans les écoles d'art de  Caen-Cherbourg et de Marseille. Nous sommes sur ce sujet en lien avec l’APPEA, réseau qui fédère ces prépas publiques. Il est essentiel de les faire connaître : l’enseignement y est excellent et dix fois moins cher.

Malgré tout, ces dernières années ont été marquées par des vagues de mécontentement dans les écoles d’art. Est-ce que les changements ne seraient pas assez rapides ?

Toute transformation provoque des réactions, cela est inévitable. Celles que vous évoquez me semblent moins liées à la vitesse des changements qu’aux modalités de leur mise en œuvre. Les choses sont-elles bien expliquées ? Les décisions sont-elles bien discutées ? Ces aspects sont essentiels. Il y a par ailleurs une chose que traduisent ces réactions et dont il faut se réjouir : c’est le fort attachement des enseignants et des étudiants à leur école. Une réflexion doit enfin être engagée, à l'initiative du ministère de la Culture, sur les modalités de recrutement et de nomination des directeurs. Il faudra néanmoins toujours admettre qu'aucune décision ne pourra jamais faire l'unanimité.

Propos recueillis pas Sophie de Tarlé | Publié le