F. Debouck (Université de Lyon) : "Nous transformerons la Comue actuelle vers un nouveau statut juridique"

Amélie Petitdemange Publié le
F. Debouck (Université de Lyon) : "Nous transformerons la Comue actuelle vers un nouveau statut juridique"
Frank Debouck, nouveau président de la Comue université de Lyon, dresse pour EducPros les enjeux de l'établissement. // ©  © Université de Lyon
Après de nombreuses difficultés sur le site de l'enseignement supérieur lyonnais, Frank Debouck a été nommé président de la Comue Université de Lyon en mars 2022. Il dresse les enjeux, et les changements structurels à venir pour y répondre, de ce mastodonte qui regroupe 11 membres et 24 associés à Lyon et Saint-Étienne.

Après plusieurs échecs sur le site lyonnais, vous avez annoncé une "transformation en profondeur de la COMUE jusqu’à fin 2023". Quels seront les changements majeurs ?

La Comue était arrivée dans une impasse avec trois grandes difficultés. D’une part, une perte de sens. L’idée, c’était de construire une université cible comme préfiguration avant un grand établissement. On s’était dit qu’on ferait un château dont nous serions chacun un morceau mais on s’est trompés. Ce projet est mort et l’Etat ne le soutient plus, il a retiré l’Idex.

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debouck © Amélie Petitdemange

D’autre part, les statuts ont été mal rédigés. Ils ont été l’objet de critiques, de 52 recours, et de deux années d’administration provisoire. En plus de la perte de sens, nous avions donc un pilotage par un administrateur provisoire qui n’a pas comme mission de développer l’objet mais juste de le faire vivre.

Enfin, le Covid et ses confinements successifs ont provoqué des réunions en visioconférence et des personnels à domicile. Résultat, on était dans le brouillard. Je suis arrivé à la présidence de cette Comue avec la volonté de remettre de l’ordre. Je vais opérer de grands changements structurels : redéfinir les objectifs de la Comue, redéfinir les projets et les périmètres, ainsi que les participants, et trouver le bon modèle économique puisqu’on a perdu le financement Idex.

Je suis arrivé à la présidence de cette Comue avec la volonté de remettre de l’ordre.

Il faudra aussi trouver la bonne structure juridique. D’ici fin 2022, je veux un projet clair sur ces points. Les six premiers mois seront consacrés à la transformation de la Comue actuelle vers le nouveau statut juridique.

Les membres de la Comue de Lyon vont donc évoluer ?

Il faudra en effet reposer la question aux acteurs pour faire quelques ajustements. Des établissements associés peuvent devenir membres et des membres devenir associés. Peut-être que d’autres acteurs pourraient nous rejoindre, j’ai une demande du Cesi (Campus d’enseignement supérieur et de formation professionnelle) par exemple. L’Ira (Institut régional d'administration) pourrait aussi nous rejoindre.

Quelles seront les priorités de votre mandat ?

L’Etat est en phase de contractualisation avec Lyon pour les cinq prochaines années et dans ce contexte, nous avons trois axes de développement. Tout d’abord, accompagner et soutenir les stratégies des établissements. Avant, nous construisions, maintenant, nous sommes en soutien. Pour la fusion de Lyon 1 et Lyon 2 par exemple, c’est leur projet mais nous les accompagnerons. Il y a aussi d’autres projets de rapprochement dans le monde de l’ingénierie et cette coordination est imaginée par la Comue.

Par ailleurs, porter et piloter des objets d’intérêt commun. Il s'agira d'activités pour rapprocher les sciences et la société, et d'une activité pour favoriser l’entrepreneuriat. Nous coordonnerons aussi les travaux immobiliers, la carte d’étudiant Izly pour tous les établissements, ou encore le schéma directeur de la vie étudiante.

Enfin, valoriser le site Lyon-Saint Etienne, qui représente 250 acteurs de l’enseignement supérieur et 230.000 étudiants. Le site est très fier de l’ensemble de ses écoles. Il y a peu de Comue aussi grosses que celle-ci. Même l’université Paris-Saclay a moins d’acteurs autour de la table, bien que ce soient des acteurs prestigieux et solides.

Quels sont les projets à venir de la Comue Université de Lyon ?

Les projets à venir se dessinent eux aussi autour de trois axes. D'une part, nous voulons donner du sens. Des acteurs se rapprochent, comme les universités Lyon 1 et Lyon 2, ou un projet ingénierie à venir. La Comue a un rôle d’urbaniste par rapport à ces constructions. Nous devons aussi nous occuper de la copropriété : faire les chemins qui relient les différentes constructions, penser des objets partagés…

D’autre part, nous menons un projet de grande transition écologique. Tous les établissements sont conscients du jour de dépassement de la planète. Taper dans la caisse d’épargne n’a qu’un temps, il faut reconstruire un mode de vie. Je souhaite que la Comue porte un grand projet de coordination de transition vers une politique de développement durable. Nous devons repenser notre modèle et éviter le greenwashing. Chaque chef d’établissement a pris un projet et la directrice de l’ENTPE (Ecole de l'aménagement durable des territoires), établissement qui dépend du ministère de l’Ecologie, coordonnera les plans de transition du site. Il y aura aussi certainement un grand projet immobilier pour que l’ensemble du site Lyon-Saint Etienne réponde aux accords de Paris d’ici dix ans. L’université doit être exemplaire sur ce sujet.

Enfin, nous voulons susciter des initiatives. Nous sommes à l’écoute d’un très grand nombre d’acteurs : il faut leur proposer des appels à projets qui pourraient leur convenir, et si besoin accompagner leur réponse.

Quelles seront les conséquences de la fusion de Lyon 1 et Lyon 2 pour l’université de Lyon ? Après l’échec de l’Idex, êtes-vous optimiste quant à la réalisation de ce projet prévu pour 2024 ?

C'est un projet récent, lancé il y a trois mois. Je constate un rayonnement conséquent pour un projet neuf, ce qui prouve que c’est une bonne idée. Rapprocher Lyon 2 et Lyon 3 pose des questions car certains départements de ces deux universités ont des thématiques similaires mais ce n’est pas le cas de Lyon 1 et Lyon 2 qui sont plus complémentaires.

Je souhaite que la Comue porte un grand projet de coordination de transition vers une politique de développement durable.

Est-ce qu’ils seront prêts pour janvier 2024 ? On ne peut que leur souhaiter même si le trajet sera long. Le délai est court mais il est réaliste. C’est un travail de dialogue, d’harmonisation des pratiques et du travail… qui amène des inquiétudes au sein du personnel. Il faut anticiper tout cela. Nous les voyons tous les mardis matin et ils nous font retour sur leurs avancées. Quand ils souhaiteront qu'on les accompagne, ce qui n'est pas encore le cas, la Comue sera à leurs côtés. Il s’agit bien d’un projet du site piloté par les deux établissements et l’ensemble de la communauté apporte son soutien.

Des formations communes à plusieurs établissements de la Comue verront-elles le jour à la rentrée 2022 ?

Si la Comue pourra bien coordonner l’offre de formations et accompagner la création de nouveaux diplômes interdisciplinaires, elle n’aura pas vocation à délivrer des diplômes nationaux. Cette orientation nouvelle est un élément majeur de notre reconstruction.

Dans les mois à venir, nous voulons construire des masters portés par plusieurs établissements. Nous devons encore statuer sur les établissements et les thématiques. Nous pouvons imaginer des nouvelles formations dans lesquelles plusieurs membres seront acteurs. Par exemple nous pourrions faire appel à des ressources de Lyon 1 et Lyon 2, complétées par le conservatoire de musique, par une école d’ingénieurs... La richesse des formations du site est tellement grande que le monde des possibles est ouvert.


La Comue Université de Lyon

L’Université de Lyon est une Communauté d’universités et établissements (Comue) qui rassemble 11 membres et 24 associés à Lyon et Saint-Étienne.
Elle coordonne et pilote de grands projets structurants pour le compte des établissements du site selon trois axes : contribuer à un pôle universitaire attractif, responsable et au service de ses publics étudiants, enseignants, chercheurs et personnels ; proposer des axes de formation et de recherche en adéquation avec les évolutions de la société ; et valoriser le territoire Lyon Saint-Étienne en lien avec tous ses acteurs.
Les membres :
Université Claude Bernard-Lyon 1, Université Lumière-Lyon 2, Université Jean Moulin-Lyon 3, Université Jean Monnet- Saint-Étienne, ENS de Lyon, École Centrale de Lyon, INSA de Lyon, Sciences Po Lyon, VetAgro Sup, École nationale des travaux publics de l'État, École nationale d'ingénieurs de Saint-Étienne, CNRS.

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