À quelques semaines de déposer une nouvelle candidature Idex, l'USPC revoit sa stratégie. Comment expliquez-vous ce changement de cap ?
Fin 2016, les présidents des quatre universités de l'USPC [Paris 3, Paris 5, Paris 7 et Paris 13] ont élaboré une feuille de route, adoptée par leurs conseils d'administration respectifs. Tous les membres de l'USPC ont ensuite rédigé une lettre d'intention en février 2017, à destination du CGI (Commissariat général à l'investissement). Les réflexions sur l'université cible se sont poursuivies durant le premier semestre 2017, dans un contexte de plus en plus propice aux expérimentations.
Elles ont, d'une part, conduit à une prise de position commune de Paris-Descartes, Paris-Diderot, de l'IPGP (Institut de physique du globe de Paris) et de Sciences po — ces établissements ayant exprimé une ambition partagée, celle de créer une université intensive en recherche, internationalement reconnue et homogène en termes de critères de qualité — et, d'autre part, amené Paris 3 à se situer en tant que partenaire plutôt qu'en tant que membre à part entière de cette nouvelle université.
Aujourd'hui, les discussions sont toujours en cours entre les chefs des établissements et leurs instances. Ces dernières se prononceront sur les évolutions envisagées dans les prochaines semaines. Celles-ci dessinent deux ensembles complémentaires au sein de l'USPC. Un premier, pluridisciplinaire, rassemblant deux universités et deux grands établissements, avec des forces reconnues dans les domaines de la santé et des sciences du vivant, des sciences exactes et des géosciences, des sciences humaines, sociales et politiques : c'est cet ensemble qui constituerait une nouvelle université.
Le second serait composé des autres membres de l'USPC, partenaires de cette université et porteurs de missions et de compétences spécifiques et reconnues, par exemple dans le domaine des humanités, des langues et des civilisations. Les organismes de recherches membres de l'USPC, en particuliers le CNRS et l'Inserm, soutiennent ces évolutions.
Faut-il voir derrière cette décision de reconfiguration du projet une impulsion du CGI et/ou du ministère ?
C'est d'abord une décision des présidents et des directeurs des établissements qui ont procédé à une analyse de leur environnement et de la situation, en appréciant les opportunités et les risques, en considérant les attendus du jury international, en effectuant un travail de comparaison avec leurs homologues français et à l'international et, surtout, qui ont partagé leur ambition. Bien sûr, le label Idex et le financement attenant sont importants, mais il n'y a pas eu de demande explicite ni du CGI, ni du ministère de choisir tel ou tel modèle. Cela relève entièrement du choix des établissements et de leurs instances.
Le statut que vous proposez nécessite un ajustement des textes réglementaires, qui devrait passer par une ordonnance. N'y a-t-il pas une part de risque dans ce projet, qui, en l'état actuel du droit, ne peut être mené ?
Le nouveau gouvernement a indiqué que les universités devaient proposer des modèles de gouvernance qui leur conviennent, adaptés à leur projet. Il a ainsi encouragé l'expérimentation. Cette question était déjà à l'agenda du gouvernement précédent et l'est davantage dans le contexte actuel. Il y a donc bien une part de risque, mais l'enjeu mérite l'expérimentation envisagée.
Dans ce projet, il y a une part de risque, mais l'enjeu mérite l'expérimentation envisagée.
Comment fonctionnera cet EPSCP avec statuts dérogatoires, plus particulièrement pour l'IPGP et Sciences po ?
L'IPGP a une mission nationale d'observation des risques naturels, qui n'est pas la mission classique d'une université. C'est une mission qui l'amène à être réactif, qui nécessite une grande autonomie et qui justifie qu'il conserve sa personnalité morale. Idem pour Sciences po, qui possède une marque très forte, reconnue à l'international, et qui fonctionne avec un modèle économique particulier.
L'objectif est donc que la future université bénéficie de la notoriété des marques existantes, portées par ses composantes et vice versa, puisque cette université aura elle-même une forte reconnaissance internationale. Il faut donc trouver le bon équilibre entre une université et ses attributs en tant qu'établissement, et des composantes fortes, autonomes et agiles, au sein de cette université.
Vous déposerez le nouveau projet d'Idex le 18 décembre. Le calendrier semble très serré...
Il est objectivement tendu. À chaque inflexion, il y a une impression de soudaineté, pourtant une grosse partie du travail réalisé par les quatre universités en 2016 et au premier semestre 2017 nous est aujourd'hui utile. Les présidents et les directeurs d'établissements visent une création de l'entité début 2019. Les instances de l'USPC seront saisies du projet Idex, mais il n'y aura pas de vote au conseil d'administration du regroupement sur les statuts du futur ensemble. Seuls les conseils d'administration des établissements concernés examineront d'ici à décembre une ébauche de statuts. Ébauche car le calendrier est serré, mais aussi parce que les ordonnances préciseront le cadre de l'expérimentation.
- Lire la biographie EducPros de François Houllier