François Rousseau : "En matière de droits d'inscription, les écoles doivent jouer à armes égales"

Céline Authemayou Publié le
François Rousseau : "En matière de droits d'inscription, les écoles doivent jouer à armes égales"
Installée sur le campus Artem depuis 2012, l'école d'ingénieurs Mines Nancy est interne à l'université de Lorraine. // © 
Rapprochements stratégiques, droits d'inscription… Directeur de Mines Nancy depuis mai 2016, François Rousseau revient sur la place singulière de son école d'ingénieurs au sein de l'Institut Mines-Télécom.

François Rousseau, directeur de Mines NancyVous êtes à la tête d'une école d'ingénieurs à la position particulière au sein de l'Institut Mines-Télécom, du fait de son rattachement au ministère de l'Éducation, alors que l'Institut fait partie du ministère de l'Économie. Comment se concrétise cette différence institutionnelle ?

Mines Nancy est, depuis sa création, une école hybride. Elle a toujours fait partie de l'université de Lorraine, sous des formes différentes selon les moments de son histoire. Aujourd'hui, elle est école interne à l'université, au sein du collegium Lorraine INP.

Cette particularité institutionnelle est à l'origine de bon nombre de différences entre Mines Nancy et les autres écoles membres de l'Institut Mines-Télécom. En termes de recherche, par exemple, l'école n'a pas de laboratoires propres. Elle ne pilote donc pas sa recherche.

Autre différence notable, elle concerne vos droits d'inscription. Depuis trois ans, les écoles de l'IMT, qui dépendent du ministère de l'Économie, voient leurs droits augmenter. À la rentrée, ils s'établiront à 2.150 €, quand les vôtres stagnent à 610 €…

Il est vrai que c'est, pour nous, une vraie difficulté. Dans un monde de compétition, il faut pouvoir jouer à armes égales et disposer des mêmes ressources. Le fait que nos droits de scolarité soient sensiblement inférieurs à ceux des autres Écoles des mines est un handicap. Nous aimerions pouvoir nous aligner. Nous discutons de ce point avec l'université mais je ne vois pas pourquoi ni comment les règles pourraient changer

Mais il y a quand même un aspect positif à ces frais peu élevés : cela rend accessible notre école à un public qui ne pourrait pas payer plus.

Pour tenter de compenser cette différence, vous avez créé en 2014 une "contribution d'excellence". En quoi consiste-t-elle ?

Sur la base du volontariat, les étudiants peuvent verser à l'école une somme, laissée à leur appréciation. Cette contribution, qui entre dans le cadre de la campagne de levée de fonds de Mines Nancy "Ambitions 2016", s'adresse à tous les élèves. Si nous n'exigeons aucune somme, nous recommandons cependant un montant qui correspond à la différence entre les droits des écoles de l'IMT et les nôtres. En 2014, année de sa création, nous avons récolté 47.000 € versés par 53 contributeurs. En 2015, 110 familles ont versé plus de 90.000 €.

Cette initiative a un vrai écho auprès des étudiants et de leurs familles. En école d'ingénieurs, un élève coûte deux fois plus cher qu'à l'université. Ce n'est donc pas aberrant qu'il contribue un peu plus au financement de la formation.

Un pied dans l'IMT, l'autre dans l'université de Lorraine. Comment construisez-vous votre stratégie au sein de ces deux réseaux ?

Je dirais même que nous comptons trois réseaux, si l'on ajoute à cette liste Artem. Chaque appartenance remplit un rôle particulier, complémentaire l'un envers l'autre. L'université nous permet d'avoir accès à l'excellence scientifique. L'IMT renforce nos liens avec les entreprises et l'entrepreneuriat. Quant à Artem, l'alliance nous ouvre à d'autres cultures. C'est d'ailleurs l'un des grands enjeux de mon mandat : faire en sorte qu'une culture commune se crée sur ce nouveau campus, à tous les niveaux (étudiants, enseignants…).

Enfin, j'ajouterai que Mines Nancy était très appréciée en Lorraine. Avec le redécoupage des régions, nous devons nous faire connaître des nouveaux interlocuteurs, dans un Grand Est qui compte désormais deux grands pôles universitaires : Metz-Nancy et Strasbourg. Il est important pour nous de continuer à jouer notre rôle de leader dans notre nouvelle région.

L'université nous permet d'avoir accès à l'excellence scientifique. L'IMT renforce nos liens avec les entreprises et l'entrepreneuriat. Quant à Artem, l'alliance nous ouvre à d'autres cultures.

Au sein de l'IMT, plusieurs écoles vont fusionner. C'est le cas de Mines Nantes et de Télécom Bretagne, tout comme de Mines Douai et de Télécom Lille. Faut-il s'attendre à des rapprochements du côté du Grand Est ?

Pour le moment, il n'y a pas de discussions concrètes. Nous sommes proches de Télécom Nancy et de l'ENSG (École nationale supérieure de géologie), qui appartiennent toutes deux à l'université et qui sont associées à l'IMT. Nos liens sont déjà très forts. Mais d'éventuelles discussions ne pourront avoir lieu que lorsque nous serons certains que Mines Nancy peut conserver son identité hybride.

Changement de statut pour l’Institut Mines-Télécom
En janvier 2015, Bercy demandait aux six Écoles des mines (Albi, Alès, Douai, Nantes, Paris et Saint-Étienne) placées sous sa tutelle de faire évoluer leurs statuts afin de devenir des écoles internes du grand établissement IMT (Institut Mines-Télécom) au 1er janvier 2017.

Le texte, passé au Cneser du 20 juin 2016, va doter les écoles du statut d'EPSCP (établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel). De plus, une modification du décret de création de l'Institut Mines-Télécom de 2012, amplifiera l'"autonomie de décision" des directeurs. 
Lire la biographie EducPros de François Rousseau
Céline Authemayou | Publié le