Georgia Tech Lorraine : "L'Institut Lafayette, une opportunité transatlantique pour des petites start-up tournées vers l'innovation"

Étienne Gless Publié le
Georgia Tech Lorraine : "L'Institut Lafayette, une opportunité transatlantique pour des petites start-up tournées vers l'innovation"
Le campus de Georgia Tech Lorraine a ouvert en 1990 à Metz © Georgia Tech // © 
Georgia Tech s'est implantée en France en 1990. Alors que cette université publique d'Atlanta inaugure le 26 mai 2014 un nouveau centre de recherche, le Lafayette Institute, son président, George P. "Bud" Peterson, revient sur un quart de siècle de présence et de développement à Metz.

George P. Comment se situe en termes de classement l'université publique que vous présidez ?

Selon l'édition 2014 du classement de US News & World Report, Georgia Tech arrive 7e meilleure université publique des États-Unis et 36e au niveau mondial. Nous sommes aussi la seule université technologique à figurer dans le top 10 des universités publiques américaines.

Georgia Tech compte 21.500 étudiants au total, répartis dans six "colleges" : arts, business, science, architecture, computing et engineering. Ce dernier rassemble à lui seul 13.000 élèves et constitue la plus grande école d'ingénieurs du pays, qui se situe au 5e rang national dans les classements. 60% de nos étudiants viennent de Géorgie, 30% d'autres États des États-Unis, tandis que 10% sont étrangers.

Quant à notre budget annuel, il s'élève à plus de 1,21 milliard de dollars (880 millions d'euros), dont 650 millions de dollars (476 millions d'euros) proviennent de contrats de recherche passés avec les industriels ou les gouvernements.

Quels étaient vos objectifs en vous implantant en France en 1990, et pourquoi avez-vous choisi la Lorraine ?

Nous encourageons nos étudiants à avoir une expérience internationale. 43% d'entre eux bénéficient actuellement d'un séjour à l'étranger avant l'obtention de leur diplôme, soit quatre fois plus que la moyenne nationale. En Europe, les pays sont plus petits et les étudiants partent plus facilement à l'étranger. Ouvrir un campus à l'étranger permet de faciliter cette mobilité.

En revanche, nous n'avons pas choisi la Lorraine. C'est Jean-Marie Rausch, l'ancien sénateur-maire de Metz, qui cherchait à revitaliser la région après la crise de la sidérurgie. Il a créé le technopôle de Metz, qui est devenu le deuxième de France après celui de Sophia-Antipolis, et il a sillonné les États-Unis pour trouver le bon partenaire universitaire.

C'est ainsi que Georgia Tech a ouvert son premier campus à l'international en Lorraine, en 1990. À l'époque, les universités technologiques américaines n'ouvraient pas de campus en Europe mais plutôt au Moyen-Orient, à Abu Dhabi par exemple. Depuis, nous avons ouvert des campus à Shanghai et Singapour.

Le campus de Georgia Tech en Lorraine a été créé pour revitaliser la région après la crise de la sidérurgie

Quel bilan dressez-vous de Georgia Tech Lorraine, près de vingt-cinq ans après son ouverture ?

Nous avons commencé par la formation. Les programmes conduisent à des diplômes de bachelors, masters et PhD dans les domaines du génie mécanique, du génie électrique et dans les sciences informatiques. GTL accueille environ 500 étudiants par an, dont 300 Américains du campus d'Atlanta. Le campus compte aussi des élèves français qui achèvent leur cursus d'ingénieur ou commencent un master of science qu'ils poursuivront à Atlanta. Tous les cours sont en anglais et assurés par des enseignants de notre université.

Nous avons également noué de solides partenariats avec d'autres écoles d'ingénieurs en Europe permettant d'offrir un programme de double diplôme : c'est le cas avec SUPELEC, les Arts et Métiers, les Mines de Paris ou encore TU-Munich.

Et qu'en est-il côté recherche ? En 2006, vous avez ouvert un laboratoire commun avec le CNRS.

À l'origine de cette UMI (unité mixte internationale), il y a Abdallah Ougazzaden, spécialiste des semiconducteurs dans le domaine optoélectronique et directeur de Georgia Tech Lorraine. Aujourd'hui, ce sont 50 chercheurs français et américains qui travaillent ensemble sur des projets en cryptographie, matériaux innovants ou encore robotique, pour créer des solutions technologiques dans les domaines de l'énergie, de la santé, de l'environnement ou de la sécurité nationale. 

Le 26 mai 2014, vous inaugurez le Lafayette Institute. Pourquoi avez-vous choisi d'appeler votre institut du nom de ce militaire français et à quelles activités sera-t-il dédié ?

C'est le fruit d'une longue amitié franco-américaine entre acteurs universitaires, économiques et politiques. Le marquis de Lafayette était basé à Metz en 1775 quand il a décidé de rejoindre les forces de libération lors de la Révolution américaine ! Et Metz a été libérée par les Américains en 1944.

L'Institut Lafayette fournira l'état de l'art de la recherche en optoélectronique et sera une plate-forme de transfert de technologie et de commercialisation de concepts innovants. Le bâtiment de 2.500 m2 abritera 500 m2 de salles blanches. Ce sera une boîte à outils où les industriels pourront venir développer les technologies.

L'objectif de l'UMI était de susciter des publications de recherche. Celui de l'Institut Lafayette est de créer des innovations technologiques au service du développement économique. Nous avons les deux mêmes outils sur notre campus américain, permettant de renforcer un savoir-faire à la fois en recherche et en développement économique. Notre équipe d'Atlanta travaille étroitement avec celle de Metz. Cela fournira une opportunité transatlantique pour des petites start-up tournées vers l'innovation.

L'Institut Lafayette est un projet conséquent, doté d'un budget de 27 millions d'euros environ. D'où vient l'argent ?

Essentiellement des collectivités locales (communauté d'agglomération, département, Région Lorraine), de l'État français et de l'Europe. Mais l'idée est que, cinq ans après son lancement, l'Institut s'autofinance grâce aux contrats de recherche qu'il aura noués avec l'industrie, par exemple.

Les MOOC fleurissent en France depuis quelque temps. Que pensez-vous de cette tendance ?

Pouvoir assister à n'importe quel moment depuis n'importe où à un cours en ligne est un concept formidablement attractif. Mais je n'utiliserai pas encore bien longtemps le mot MOOC. Il a fait son temps. Je pense que l'avenir est au "technology-assisted learning", l'éducation assistée par les technologies. C'est une période excitante. L'enseignement supérieur change très très vite.

L'avenir est au "technology-assisted learning", l'éducation assistée par les technologies, qui peuvent constituer une nouvelle source de revenus

En France, le gouvernement veut favoriser les regroupements et faire émerger 30 grands pôles universitaires. Quel regard portez vous sur les évolutions de l'enseignement supérieur français ? 

Nous avons connu ce même mouvement de concentration aux États-Unis. On a vu au Texas des petites universités se regrouper en un seul système universitaire. En Géorgie, nous avons 34 universités publiques, huit d'entre elles ont fusionné en une.

Nos universités publiques étaient à l'origine financées par les gouvernements des différents États. Mais, actuellement, seulement 15% environ de leurs ressources proviennent des États. Notre budget à Georgia Tech est de 1,2 milliard de dollars. Il y a six ans, nous recevions 300 millions de dollars de l'État, cette année 108 millions de dollars seulement. En conséquence, le coût de l'éducation augmente de façon croissante et le coût des études pour les familles aussi. Je pense que la même chose est en train d'arriver en Europe – pas seulement en France.

Aux États-Unis, il existe une tradition très ancrée et ancienne de philanthropie dans les universités. Nous sommes très souvent contactés par des établissements européens pour parler de notre expérience, de la manière dont nous nous y prenons pour convaincre les individus de soutenir financièrement l'université.

À mon sens, l'Europe évolue vers le modèle américain. Je ne dis pas que c'est nécessairement une bonne chose. Mais les États ne pouvant plus autant financer l'éduaction, il faut trouver des ressources alternatives : augmenter les dons, mais aussi la contribution des étudiants et de leurs familles. Nous pensons par ailleurs que les enseignements assistés par les nouvelles technologies ("technology-assisted learning") pourraient bien constituer une nouvelle source de revenus. Il y a du potentiel, qui suppose un changement de mentalité. Car, en général, les universités ne savent pas faire beaucoup d'argent, elles savent plutôt en dépenser !

Chronologie : les grandes dates de Georgia Tech en Lorraine
1990 : ouverture sur le technopôle de Metz de Georgia Tech Lorraine, premier campus à l'international du Georgia Institute of Technology (Georgia Tech d'Atlanta). Georgia Tech Lorraine n'accueillait encore que 140 étudiants américains en 2000. Ils étaient 600 en 2013. L'objectif est d'atteindre 1.000 élèves par an d'ici à 2020.

2006 : création avec le CNRS d'une unité mixte internationale (UMI 2958 GT-CNRS ) associant aussi les Arts et Métiers, SUPELEC, ainsi que les universités de Franche-Comté et de Metz. Les équipes de recherche travaillent dans les domaines des réseaux sécurisés de communication, des matériaux intelligents ou encore de la robotique.

2009 : un laboratoire miroir est créé sur le campus de Georgia Tech, à Atlanta.

2013
: un accord est signé au Maroc par Geneviève Fioraso, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, le CNRS, Georgia Tech et des universités marocaines pour étendre l'UMI au Maroc.

2014 : inauguration du Lafayette Institute, laboratoire de recherche dédié à l'optoélectronique. Le projet est présenté comme un incubateur "open lab", destiné à simplifier les relations entre les recherches publique et privée grâce à l'expertise de Georgia Tech en matière de transfert de technologie et de commercialisation.

CommaWikipedia: The comma, from the Greek komma, is a punctuation mark, and it appears in several variants in various languages. It has the same shape as an apostrophe or single closing quotation mark in many typefaces, but it differs from them in being placed on the baseline of the text. Some typefaces render it as a small line, slightly curved or straight but inclined from the vertical, or with the appearance of a small, filled-in number 9. It is used to separate parts of a sentence such as clauses and lists of three or more things.

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