Écoles centrales : entre stratégie de site et politique de réseau

Propos recueillis par Céline Authemayou Publié le
Écoles centrales : entre stratégie de site et politique de réseau
Hervé Biausser - directeur général de CentraleSupélec // © 
Alors que la priorité gouvernementale est donnée aux stratégies de site, le GEC (Groupe des Écoles centrales), fondé en 1990, a signé fin mars 2014 un nouvel accord visant à accroître les interactions entre les cinq écoles d’ingénieurs du réseau (Paris, Lyon, Nantes, Lille, Marseille). Hervé Biausser, directeur général de CentraleSupélec, définit les grandes lignes de ce rapprochement. Objectif : faire bloc sur le front international.

Le Groupe des Écoles centrales a été créé en 1990, mais c'est la première fois que les établissements signent entre eux un accord formel. Pour quelles raisons le moment était-il désormais opportun ?

Il est vrai qu'aucun accord n'avait jamais formalisé cette alliance, bien qu'une association ait été créée en 2006. Nous fonctionnions jusqu'alors de façon informelle, en totale confiance. C'est toujours le cas, mais nous avons éprouvé le besoin de repréciser les choses par souci de transparence entre écoles et au vu du changement de contexte. La stratégie menée par l'État est une stratégie de site. La question se pose donc : que pouvons-nous faire en commun, entre Écoles centrales ? Cela méritait d'être précisé, que ce soit sur le plan national ou sur le plan international.

En France, vos écoles jouissent toutes d'une stratégie territoriale dynamique. Évoquons, par exemple, Nantes et son rapprochement avec Audencia, ou encore la future CentraleSupélec...

En effet, les écoles ont toutes une implantation régionale très forte. Chacune possède des réseaux très intéressants, mais il était nécessaire de réaffirmer qu'indépendamment de ces alliances qui font évoluer les périmètres, nous partagions toujours une stratégie commune.

Cette stratégie commune peut-elle passer par des échanges en matière de formation, par exemple ?

C'est déjà le cas, avec la reconnaissance croisée de la dernière année de la formation ingénieurs par les cinq écoles. Mais il est vrai que nous voulons aller plus loin. Le fait de pouvoir échanger des cours est effectivement un sujet sur lequel nous allons travailler. À l'ère du numérique, nous menons tous des projets dédiés aux MOOC. Nous allons réfléchir à un moyen de mettre en commun toute cette offre.

Du côté de l'international, là aussi, des alliances entre les écoles existent déjà. Comment comptez-vous les renforcer ?

L'histoire du groupe montre bien que les actions de coopération internationale ont été des réussites. Elles sont portées principalement par la formation initiale. En 1986, Centrale Paris lançait les doubles diplômes. Depuis, nous avons vu tout l'intérêt d'opérer ensemble : lorsqu'une école disposait d'un accord au Brésil, en Chine ou au Japon par exemple, nous avons proposé à l'établissement partenaire de généraliser l'accord à toutes les Centrales. Pour cela, il est indispensable d'avoir une offre pédagogique commune cohérente. D'autre part, l'expérience de Centrale Pékin nous a appris à travailler ensemble.

Notre objectif est donc clair : nous nous donnons l'opportunité de mener des actions communes sous la marque "Centrale". Si une école peut gérer un dossier au nom des quatre autres, nous voulons en revanche éviter qu'un établissement prenne une initiative sans en informer les autres.

C'est pourquoi cet accord est important : il va nous permettre de nous voir très régulièrement, pour échanger sur l'évolution de notre pédagogie, de nos cursus mais aussi sur notre ouverture à l'international. Tout cela a l'air évident, mais c'est encore mieux en le disant ! Plus nous serons transparents, plus vite pourront être prises les décisions.

Augmentation des frais de scolarité, "une question légitime"
Les écoles d’ingénieurs sous tutelle du ministère du Redressement productif annonçaient il y a quelques semaines une hausse de leurs droits de scolarité.
"Pour notre part, nous sommes aujourd'hui sous tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, il n’y a donc pas de sujet pour nous !", affirme Hervé Biausser. Le directeur général de CentraleSupélec indique tout de même qu’il "faut traiter ce sujet avec beaucoup de nuances : les équations financières des écoles publiques ne sont pas simples en ce moment et c’est un sujet très sensible, tant sur le plan social que sur le plan politique. Il est donc légitime qu’un certain nombre d’écoles se posent la question".
Propos recueillis par Céline Authemayou | Publié le