Michel Quéré (recteur de Rennes) : "L’ambition des élèves bretons n’est pas à la hauteur de ce qu’elle devrait être"

Isabelle Dautresme Publié le
Michel Quéré (recteur de Rennes) : "L’ambition des élèves bretons n’est pas à la hauteur de ce qu’elle devrait être"
MichelQuéré, recteur Rennes- mars 2013 // DR // © 
Après trois années passées à observer le système éducatif à la tête de la DEPP (Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance), Michel Quéré a été nommé recteur de Rennes début janvier 2013. Fluidité des parcours, poursuite d’études dans l’enseignement supérieur, ESPÉ… Il expose à EducPros ses priorités pour l'académie bretonne, dans le cadre de notre série d'entretiens avec les recteurs.

Quelles sont les particularités de l’académie de Rennes ?

En matière de résultats aux examens, Rennes se trouve toujours parmi les deux ou trois premières académies, avec Nantes et Grenoble. Cette belle performance s’explique en partie par l’accent mis ici sur la continuité des parcours. La liaison CM2/6e par exemple est de très grande qualité. Il en va de même pour la liaison collège/lycée. Rennes se distingue également par la grande fluidité des parcours : entre les voies professionnelle, technologique et générale, les passerelles sont réelles.

Quel est le principal point faible de l’académie de Rennes ?

Etre présentée comme l’académie de toutes les réussites n’encourage pas le mouvement. Or, je pense que cette académie a besoin d’évoluer, de se transformer. Il existe par exemple d’importantes disparités entre établissements à l’intérieur du même bassin. Disparités contre lesquelles nous devons lutter.

Il faut aller vers une professionnalisation du pilotage des établissements. À cet effet, les corps d’inspection ont un rôle essentiel à jouer. Je vais demander aux inspecteurs pédagogiques d’accompagner au plus près les personnels de direction des établissements dont ils sont référents,  dans la recherche d’une plus grande performance. Ce travail peut se faire établissement par établissement mais aussi collectivement, en référence à la notion de bassin qui est à la bonne échelle pour appréhender des dynamiques éducatives et en comprendre les déterminants.

Si l’académie de Rennes affiche de très bons résultats au bac, qu’en est-il des poursuites d’études dans l’enseignement supérieur ?

L’ambition des élèves bretons n’est pas à la hauteur de ce qu’elle devrait être au regard de leurs performances scolaires. Trop peu de bacheliers professionnels accèdent à l’enseignement supérieur. Les filières courtes de l’enseignement supérieur opèrent une sélection au bénéfice des bacheliers généraux.

Que comptez-vous faire pour encourager cette poursuite d’études, notamment des bacheliers professionnels et technologiques ?

Il faut que nous réfléchissions à des mesures d’accompagnement des jeunes bacheliers professionnels pour les mettre en condition de réussite. L’alternance peut aussi être une bonne option.

Il y a également un travail à faire au niveau des chefs d’établissement de lycée avec BTS. Ils ont parfois trop tendance à jouer la carte de la sécurité en choisissant des bacheliers généraux plutôt que de prendre le risque d’accueillir des bacheliers professionnels ou technologiques, et de les mettre en situation d’obtenir un diplôme. C’est mon rôle de recteur de piloter et d’accompagner ces proviseurs.

Et concernant l’enseignement supérieur ?

L’académie de Rennes se distingue par le caractère multipolaire de son enseignement supérieur. Il existe trois pôles : Rennes 1, Rennes 2, l'université  Bretagne Ouest (UBO) et à côté, une université avec un volume d'étudiants plus faible, l’université Bretagne Sud (UBS), à Vannes.

Cela tient aux particularités géographiques de l’académie, et ne permet pas de donner une image forte de l’université bretonne. Or, il faut que nous soyons visibles et reconnus non seulement en France mais aussi et surtout à l’international. Il est encore trop tôt pour dire précisément de quelle manière cet objectif pourra être atteint mais je ne pense pas que la bonne solution soit la fusion, comme cela l’a été pour des académies comme Aix-Marseille ou Strasbourg. Il y a sûrement un modèle  à inventer.

Il y a eu une prise de décision collective des présidents d’université pour dire que le portage de l’ESPÉ sera assuré par le PRES


Quelle est l’université qui va porter l’ESPÉ ?

Il y a eu une prise de décision collective des présidents d’université pour dire que le portage de l’ESPÉ (Ecole supérieure du professorat et de l’éducation) sera assuré par le PRES. Réalistement, le PRES n’est pas en capacité  d’absorber, pour l'instant, un projet tel que l’ESPÉ, compte tenu de l’importance des enjeux de gestion, de ressources humaines, de finances, etc, qu’il implique.

Il nous faut donc trouver des dispositions transitoires. On peut imaginer, par exemple, que les personnels qui formeront l’ESPÉ seront détachés, tout en continuant à être gérés administrativement par leur université d’origine. Dans le souci de ne pas mettre en avant une université plutôt qu’une autre, nous avons choisi, de façon collégiale, deux chefs de projet : Nicole Ménager de Rennes 2 et Jean-Marie Filloque de l’UBO.

Quels sont vos projets pour les mois à venir ?

Je réfléchis aujourd’hui aux instruments de gouvernance que je vais mettre en place pour piloter au mieux l’académie. Je m’attache à construire une gouvernance collégiale entre le recteur, les DASEN (directeurs académiques des services de l’éducation nationale) et les services du rectorat.

C’est d’autant plus important que Rennes est l’une des rares académies à confier aux DASEN la responsabilité de gestion du premier degré, des collèges mais aussi des lycées. Je souhaite également travailler plus étroitement avec les corps d’inspection.

Isabelle Dautresme | Publié le