Olivier Dugrip est recteur de la région Auvergne-Rhône-Alpes depuis 2019. Il revient pour EducPros sur la rentrée 2024, ainsi que sur les besoins et les défis qu’il doit relever dans sa région académique.
Comment s’est passée la rentrée ?
La rentrée s’est très bien passée. Elle a été réussie techniquement et surtout sereine au sein des établissements.
Nous avons anticipé le recrutement des professeurs ainsi que leur affectation comme le recrutement de professeurs contractuels qui ont pu être accueillis dans les établissements avant la rentrée. Nous avions donc l’ensemble de notre potentiel mobilisé pour accueillir les élèves dans de bonnes conditions.
Aujourd’hui il ne manque pas d’enseignants dans l’académie ?
À la rentrée, nous avions tous nos postes budgétaires pourvus. Cela signifie qu’il n’y avait pas de postes vacants. Pour cela, nous avons recruté plus de contractuels que l’année précédente.
En revanche, nous avons des difficultés de ressources humaines pour assurer des remplacements dont les besoins sont apparus depuis la rentrée scolaire. Et là, effectivement, nous nuançons selon les territoires et selon les disciplines.
Comment faites-vous face à ces difficultés de remplacement ?
D’abord, grâce au Pacte enseignant qui commence à trouver son rythme de croisière. Si ce n’est pas un moyen d’accroître notre ressource humaine, il permet d’assurer les heures à nos élèves en mobilisant la ressource enseignante disponible.
Mais nous connaissons des difficultés ponctuelles sur certaines disciplines et dans certains territoires. Par exemple, en lettres modernes, nous avons des besoins en remplacement que nous ne réussissons pas à assurer.
Nous avons constitué une "brigade de professeurs" spécifique à Lyon, qui sont des TZR (titulaire sur zone de remplacement) spécialement affectés à ces enseignements à distance.
Certains territoires ont également des besoins importants. C’est notamment le cas du pays de Gex dont le niveau de vie est élevé, si bien que nos professeurs ont des difficultés à se loger. Dans ce cas spécifique, nous avons mis en place un dispositif d’enseignement à distance au sein des établissements, pour les cours où nous ne disposons pas de remplaçants.
Nous avons pour cela constitué une "brigade de professeurs" spécifique à Lyon, qui sont des TZR (titulaire sur zone de remplacement) spécialement affectés à ces enseignements à distance. Les élèves sont accueillis dans une salle de classe surveillée par un AED (assistants d'éducation). Nous avons expérimenté ce système, l’année dernière. Cette année, il est complétement opérationnel et donc mis en place de manière régulière.
La mise en place de dispositifs du choc des savoirs comme les groupes de besoins a-t-elle pu se faire dans tous les établissements de votre académie ?
Nous avons donné aux collèges les moyens nécessaires à la mise en œuvre de ces groupes. Pour certains établissements, elle s’est faite dès la rentrée. Pour d’autres, elle pourra débuter au retour des vacances de la Toussaint. Dans l’académie de Lyon, cela représente environ 200 ETP (équivalent temps plein) supplémentaires en français et en mathématiques.
Les établissements ont dû surmonter des difficultés pratiques et organisationnelles, avec une nouvelle gestion de l’emploi du temps et une plus grande coordination de la part des équipes pédagogiques.
À quels défis faites-vous face au sein de votre académie ?
La région Auvergne-Rhône-Alpes connaît une grande diversité : à la fois très urbaine, avec une forte concentration de population dans certaines villes, et très rurale dans d’autres.
C’est aussi une académie caractérisée par un fort dynamisme démographique. Depuis 2014, nous avons accueilli pas moins de 20.000 élèves supplémentaires dans le second degré. Cela a nécessité un effort des collectivités territoriales qui ont ouvert des écoles, collèges et lycées et nous avons créé plus de 1.300 ETP en 10 ans pour accueillir les nouveaux élèves.
Quelles sont vos priorités pour votre académie ?
Depuis ma nomination dans l’académie en 2019, j’ai mis l’accent sur le développement de la voie professionnelle. Nous avions un système sous-dimensionné par rapport aux attentes des élèves et la réalité économique de l’académie qui est la première région industrielle de France.
Nous avons créé un peu plus de 1.000 places supplémentaires en lycée professionnel et répondu à l’appel à manifestation d’intérêt "Compétence et métiers d’avenir" avec un objectif sur les quatre prochaines années : créer 2.000 places dans le secteur industriel sur l’ensemble de la région Auvergne-Rhône-Alpes.
J’ai mis l’accent sur le développement de la voie professionnelle. Nous avions un système sous-dimensionné par rapport aux attentes des élèves et la réalité économique de l’académie qui est la première région industrielle de France.
Nous avons aussi transformé notre carte des formations à hauteur de 8%. Et nous allons mobiliser les moyens supplémentaires de l’AMI pour implanter de nouveaux plateaux techniques et moderniser nos formations, en développant les enseignements numériques et le dispositif des professeurs associés.
Enfin, ma priorité est d’accompagner le parcours de chacun de nos élèves vers la réussite, quel que soit le territoire d’où il vient : urbain ou rural. Mais aussi accompagner la réussite des élèves issus de l’éducation prioritaire. Car dans ces établissements, nous sommes encore en deçà de l’objectif et de la moyenne nationale. C’est donc dans ces établissements que nous devons porter notre effort.
Un sujet prioritaire selon vous pour la prochaine rentrée ?
Selon moi, il s’agit de l‘école inclusive et l’accompagnement des élèves à besoins particuliers. Malgré l’augmentation importante du nombre d’AESH (accompagnants d'élèves en situation de handicap) ces dernières années, il y a toujours un décalage entre les besoins d’accompagnement et les moyens que nous pouvons mobiliser.
Cela suppose que l’État continue son effort et le PLF (projet de loi de finances pour 2025) montre que c’est un besoin pris en compte. Et cela suppose également que nous-mêmes soyons attentifs au bon pilotage de ces moyens sur nos territoires pour répondre du mieux possible aux besoins des élèves.
Notre série : les enjeux des académies, vus par les recteurs
Pour comprendre les enjeux de chaque territoire, EducPros vous propose une série d'interviews des recteurs. Rentrée scolaire, spécificités et projets académiques, formation des enseignants et réformes : c'est l'occasion de faire le point sur les grandes questions nationales et locales.
L'entretien d'Olivier Dugrip est le troisième de notre dossier. Vous pouvez également consulter l'interview de :