Philippe Choquet : "Il faut une loi de programmation sur le financement de l’enseignement supérieur"

Propos recueillis par Ariane Despierres-Fery Publié le
Philippe Choquet : "Il faut une loi de programmation sur le financement de l’enseignement supérieur"
Philippe Choquet, président de la Fesic et directeur d’UniLassalle répond aux trois questions d’EducPros. // ©  FESIC
Quel rôle des écoles associatives pour accompagner les étudiants et les transitions en cours ? Enjeux du supérieur, paroles de dirigeants, Philippe Choquet, président de la Fesic et directeur d’UniLassalle répond aux trois questions d’EducPros.

Revoir le financement du supérieur, réaffirmer le rôle des grandes écoles associatives, transformer l’écosystème académique pour répondre aux transitions, sont autant d’enjeux sur lesquels accélérer pour Philippe Choquet, et à considérer comme un investissement pour l’avenir.

Quelles sont les actions à engager pour permettre un développement plus rapide et plus harmonieux du supérieur ?

Ce n’est pas tant un développement plus rapide qui est souhaitable que la prise en compte de son rôle crucial dans le développement de notre pays et dans la réponse aux enjeux de la transition écologique et énergétique. L’effort consenti par la société doit être compris comme un investissement pour les générations à venir.

La question du financement est centrale dans un contexte de hausse du nombre d’étudiants et de compétition internationale. L’enseignement supérieur privé a largement contribué à l’accueil de nouveaux étudiants, regroupant ainsi près de 25% des étudiants en France en 2021. Une loi de programmation sur le financement de l’enseignement supérieur, telle que proposée par la CDEFI et France universités, pourrait être une bonne occasion de discuter sereinement des pistes possibles !

Ce besoin de financement explique des évolutions de statut et des regroupements. Sur ce sujet, la position de la FESIC est claire : affirmer le rôle des grandes écoles associatives au bénéfice des étudiants et de la société. Nous devons préserver le tiers-secteur non-lucratif (EESPIG) : des écoles qui, par leur indépendance financière et de gestion, remplissent leurs missions de service public. C’est pourquoi nous souhaitons que l’accompagnement financier de l’État soit renforcé pour conserver son rôle d’effet de levier.

L’Etat doit pouvoir encourager les initiatives tout en valorisant très clairement la qualité des formations.

Il est par ailleurs impératif d’assurer la pérennisation du financement de l’apprentissage, un modèle qui répond à deux principales exigences de notre secteur : qualité de la formation et ouverture sociale.

Au-delà du financement, le développement harmonieux du supérieur doit passer par une revue de son cadre juridique. L’Etat doit pouvoir encourager les initiatives tout en valorisant très clairement la qualité des formations.

Les formations choisies par nos jeunes sont certifiées, évaluées et contrôlées de la même façon que celles des établissements publics, nous souhaitons qu’ils aient accès aux mêmes services publics universitaires que leurs camarades du public (santé, bourses, bibliothèques...).

Quel impact de la réforme du lycée sur le supérieur constatez-vous ? Quels aménagements devraient être apportés ?

Il est un peu tôt pour avoir une vue d’ensemble, tant la crise Covid a perturbé les enseignements. Cela dit, nos écoles ont pu accueillir des profils plus variés d’étudiants. Pour autant le choix des triplettes de spécialités a conduit à une désaffection pour les matières scientifiques.

Nos écoles remarquent que certains jeunes ont davantage de difficultés dans ce qui était auparavant considéré comme un socle commun nécessaire à la réussite dans le supérieur. Des périodes de préparation au programme développé dans nos formations post-bac sont ainsi de plus en plus nécessaires.

Le choix des triplettes de spécialités a conduit à une désaffection pour les matières scientifiques, il semble urgent de retrouver un équilibre.

Plusieurs organismes se sont également fait l’écho d’une désaffection des filles pour les matières scientifiques ce qui a conduit à une baisse de l’orientation vers les écoles d’ingénieurs. Il semble urgent de retrouver un équilibre de recrutement en la matière.

Les transitions écologiques, économiques et sociétales sont au cœur des préoccupations : comment le supérieur peut-il/doit-il y répondre ?

A la Fesic, nos établissements forment des femmes et des hommes professionnels, acteurs engagés dans le développement durable de notre société, au niveau environnemental mais aussi social et économique.

La question des transitions est centrale et transverse : elle concerne et doit irriguer tout le cursus de l’étudiant.

C’est donc d’abord en donnant toute leur place à ces enjeux de transitions écologique, économique et social au sein de nos formations que nos établissements sensibilisent et forment leurs étudiants.

La question des transitions est centrale et transverse : elle concerne et doit irriguer tout le cursus de l’étudiant, dans les écoles de management, d’ingénieurs, comme d’art et de sciences humaines. Les efforts doivent s’intensifier dans les années à venir.

C’est l’ensemble d’un écosystème académique que nous transformons pour répondre à ces enjeux, c’est une biodiversité de solutions qui nous permettra d’apporter les réponses efficaces ! Et cela ne se fera pas sans la science.

Nos communautés académiques, scientifiques et étudiantes doivent se retrouver sur l’essentiel pour faire de nos institutions de l’enseignement supérieur des moteurs de transitions pour l’ensemble de la société : au service de l’intérêt collectif, comme le rappelle le nom de notre fédération !


EducPros poursuit sa série d’interviews pour donner la parole aux dirigeants du supérieur. Objectif : évoquer avec eux les enjeux qui animent leur secteur, en matière d’enseignement, de recherche, de relations avec le monde économique, de développement et de structuration à l’échelle nationale et internationale. Rendez-vous tous les 15 jours, le vendredi, pour découvrir l’analyse d’un dirigeant du sup’.
- Eric Lamarque
- Pierre Mathiot
- Delphine Manceau

Propos recueillis par Ariane Despierres-Fery | Publié le