Universités-grandes écoles : un mariage de raison

Propos recueillis par Maëlle Flot Publié le
Valérie Pécresse a installé officiellement le 4 juin 2008 la commission sur « les nouveaux partenariats » entre universités et grandes écoles. Christian Philip, représentant personnel du président de la République pour la francophonie, homme politique lyonnais, universitaire et ancien directeur de cabinet de François Fillon à l’enseignement supérieur, de 1993 à 1995, préside cette commission. Il a confié en exclusivité à Educpros ses objectifs , mais aussi énoncé les écueils à éviter sur ce sujet toujours sensible.

Ne craignez-vous pas de raviver la guerre universités-grandes écoles ?
Au contraire. Dans l’intitulé de la mission, la ministre parle de partenariats. Le choix du terme n’est pas anodin. Partenariat ne veut pas dire nécessairement rapprochement ou création d’une nouvelle structure commune. La ministre m’a d’ailleurs essentiellement parlé de rapprochement pour les formations et la
recherche. Nous allons leur dire « vous avez votre identité, nous allons vous aider à travailler en commun sans remettre en cause cette identité ». L’analogie avec l’Union européenne s’impose au professeur de droit européen que je suis. Le partenariat, ce n’est pas la guerre, c’est tout le contraire.

Quelle va être votre méthode de travail ?
Il faut casser un certain nombre d’idées reçues. Les grandes écoles font de la recherche, et le font mieux qu’on le dit parfois. Des formations universitaires dépassent en qualité celles de grandes écoles. Ma mission ne consiste pas à réécrire une énième histoire de cette dichotomie. Ce n’est pas non plus mon rôle de déterminer les points forts des uns et des autres. Il faut resituer la réflexion de façon plus opérationnelle. La course à la taille critique, parfois dénoncée par les grandes écoles, répond-elle à un effet de mode ? La taille critique se joue
aussi à l’international par ce qu’on est capable de présenter en commun. Les PRES (pôles de recherche et d’enseignement supérieur) ou les RTRA (réseaux thématiques de recherche avancée) s’inspirent déjà de cette démarche.

Comment convaincre les établissements de la nécessité de ces partenariats ?
Les universités vont notamment pouvoir travailler avec de nouveaux étudiants sélectionnés sur concours. Elles savent aussi que les régions investissent dans l’enseignement supérieur à condition d’avancer de façon groupée. Nous ne sommes pas à l’heure du mariage forcé. Si certains établissements ne souhaitent pas travailler ensemble, très bien, c’est leur autonomie ! Mais, pour reprendre l’analogie européenne ou encore celle de l’intercommunalité, sans partenariat, il n’y aura pas d’aides à la clé pour eux. C’est exactement le discours tenu par la ministre aux acteurs du plateau de Saclay. L’État peut inciter par une politique volontariste, dans le cadre de la politique contractuelle notamment. Nous allons aussi nous assurer que la législation permet toutes les formes possibles de partenariat.

Allez-vous aborder la question de la place des prépas dans le système éducatif ?
Je ne crois pas que nous ayons intérêt à sortir d’un système qui fonctionne. Il est en revanche nécessaire de proposer des passerelles, pourquoi pas des concours communs ou des diplômes communs entre universités et grandes
écoles. Aujourd’hui, nos écoles produisent par exemple de très bons ingénieurs, mais ces derniers ne sont pas reconnus comme tels à l’étranger, où le plus souvent ils doivent passer un PhD. Il faudrait peut-être également inciter à de meilleurs contacts entre les enseignants de grandes écoles, le monde  universitaire et celui de l’entreprise.

Propos recueillis par Maëlle Flot | Publié le