Le projet de loi sur l'enseignement supérieur et la recherche va être discuté en mai à l'Assemblée nationale. Un de ses articles qui autorise les cours en anglais dans les universités pour les étudiants étrangers fait polémique chez les défenseurs de la langue française, qu'en pensez-vous ?
Comme vous le savez, c'est un projet de loi sur l'enseignement supérieur qui est porté par ma collègue ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. L'article 2, qui ouvre la possibilité d'enseigner dans d'autres langues que le français, donne lieu à des échanges intenses auxquels prennent part de nombreux intellectuels, des parlementaires et nos partenaires de la francophonie.
Vous connaissez ma conviction qui est que la francophonie n'est pas un handicap, mais une force. Une force dans le monde de demain qui sera multilingue.
Pour le reste, le Parlement va très bientôt débattre du projet, les échanges vont se poursuivre dans ce cadre démocratique. Mais soyons ambitieux pour notre langue que nous avons en partage avec 77 nations sur les cinq continents. Défendons-la. C'est une langue d'avenir.
Vous allez inaugurer l'assemblée générale de l'Agence universitaire de la francophonie début mai. Comment se porte la francophonie universitaire ?
La francophonie universitaire se porte plutôt bien. Elle est parfois méconnue. Qui par exemple sait qu'aujourd'hui il y a plus de 6.700 étudiants inscrits dans les formations bilingues ou les formations complètement francophones des universités du Cambodge, Laos et Vietnam (sans compter les étudiants inscrits dans les départements de français) : c'est la taille d'une université comme Le Havre ou comme Grenoble 3.
Il existe réellement un espace d'échanges universitaires et scientifiques qui est constitué autour d'une langue commune, qu'est le français et fondé sur des principes de solidarité et de partage. Cet espace n'est pas limité aux seuls pays francophones : beaucoup d'universités venant de pays non-francophones ont décidé d'entrer dans la francophonie universitaire et d'utiliser le français pour renforcer leur ouverture internationale et leurs coopérations. Cela offre plus d'opportunités à leurs étudiants, leurs enseignants et leurs chercheurs. L'évolution de l'AUF le montre : il y a eu récemment beaucoup d'adhésions d'universités d'Amérique du Sud, de Chine, d'Inde, ou même du Japon et l'Agence compte aujourd'hui 782 membres situés dans 98 pays...
Parmi les 650 participants à cette l'Assemblée générale, beaucoup viennent d'universités ou de pays dans lesquels le français n'est pas la langue principale. Et le choix du Brésil pour cette grande réunion internationale de l'AUF est une annonce très claire de ce choix d'une ouverture de la francophonie universitaire au-delà de la Francophonie historique et politique.
Où en est l'apprentissage du français à travers le monde ?
Le français est parlé par 220 millions de personnes dans le monde et les projections démographiques nous indiquent qu'à l'horizon 2050, il y aura 750 millions de francophones dont 80% seront en Afrique.
Avec plus de 116 millions de personnes qui suivent un apprentissage du ou en français, le français est la deuxième langue la plus enseignée dans le monde, après l'anglais. Le nombre d'apprenants a globalement augmenté de 13% entre 2007 et 2010, mais il existe des différences selon les continents : une baisse sensible en Europe (-17%) et une augmentation au Moyen-Orient (+13%) ou en Asie (+16%).
Il ne faut pas oublier dans ce nombre les personnes qui se sont engagées dans le réseau des écoles françaises à l'étranger. Plus de 450 établissements accueillent environ 250.000 élèves, dont une bonne partie ne sont pas des Français. Des chiffres en augmentation de 10% entre 2007 et 2010. De plus, 1,7 million d'élèves et d'étudiants suivent des cours dans les sections bilingues des réseaux nationaux d'éducation.