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Après la censure du gouvernement, le monde de l’éducation à nouveau dans l’expectative

Ariane Despierres-Féry Publié le
Après la censure du gouvernement, le monde de l’éducation à nouveau dans l’expectative
Le gouvernement de Michel Barnier aura tenu moins de trois mois. // ©  Eric TSCHAEN/REA
EDITO. Les réformes étaient déjà suspendues à l’adoption du budget 2025, elles le sont désormais à la nomination d’un nouveau gouvernement. A la rapidité des réformes succèdent l’instabilité et le manque de visibilité pour les acteurs de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur.

Annonces et réformes se poursuivent à grande vitesse depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017. Un rythme contesté par les professionnels de l’éducation qui connaissent bien la difficulté à déployer des changements profonds dans les établissements. Ils contestent aussi le manque de concertation sur des sujets pourtant clés.

Du côté du supérieur, le manque de moyens tend aussi les relations avec le ministère depuis des années. A ces relations mouvementées se greffent désormais l'incertitude et l'inquiétude après la chute de l'éphémère gouvernement Barnier.

L’instabilité se poursuit à la tête de l’Education nationale

L’instabilité est un autre marqueur des difficultés rencontrées par l’Education nationale qui aura connu non moins de cinq ministres en deux ans. Désormais, c’est la censure du gouvernement Barnier et de son projet de budget pour 2025 qui remet à nouveau en cause les réformes annoncées ou engagées.

Alors que le Conseil d’Etat a retoqué la mise en place des groupes de besoins pour des questions techniques, Matignon n‘aura pas eu le temps de publier le texte qui aurait pu en valider l’application pour la rentrée 2025. Que décidera la prochain Premier ministre ? La mise en place s’est parfois faite dans la douleur à la rentrée 2024 faute de moyens, de ressources humaines et surtout d’adhésion d’une partie du corps professoral, mais ils étaient en place…

Enseignants et personnels de direction tiennent la barre en pleine tempête

Que deviendront les réformes du lycée pro et du choc des savoirs, sans oublier la réforme de la formation des enseignants et celle du brevet, la grande consultation nationale sur l’orientation ? Nul ne peut le dire. Une chose est sûre, enseignants et personnels de direction tiennent la barre et poursuivent dans l’adversité leur mission de former la jeunesse du pays. Et pour cela n’oublions pas de les remercier et de les respecter.

Mais jusqu’à quand tiendront-ils le premier service public de France ? Ils ont été bousculés par les réformes, ils ne se sentent souvent pas reconnus dans leur rôle, leur rémunération. Ils craignent pour l’avenir de leur métier, de leur vocation. Ils sont attaqués et même assassinés parce que défenseurs de la République, de la laïcité, ferment du vivre ensemble. Alors combien de temps tiendront-ils encore, eux le maillon fondamental de notre avenir ?

Universités en danger, un nouveau cap est franchi

Du côté du supérieur aussi la censure du gouvernement aura des impacts. Si le budget 2025 ne verra pas le jour, les présidentes et présidents d'université ont voulu marquer le coup ce 3 décembre.

Car ils alertent depuis des années sur le manque de moyens. Désormais c’est bien de la survie de leurs établissements et formations, de leurs missions fondamentales qu’ils parlent. La journée "Universités en danger" aura cristallisé leurs craintes : aux restrictions budgétaires qui frappent depuis plusieurs années l’enseignement supérieur et la recherche ne pourront s’ajouter les transferts de charge envisagés sur des budgets déjà fragiles.

Sans investissement dans l’enseignement et la recherche, l’avenir du pays amputé

Ils énumèrent les conséquences possibles, concrètes et immédiates comme la réduction de leurs capacités d’accueil, des budgets de rénovation et d’investissement ou encore la fermeture de formations voire de campus délocalisés. Mais plus grave encore, ils craignent que l’université, l’autre pilier de nos démocraties, ne puisse plus jouer son rôle. Sans investissement dans l’enseignement et la recherche, c’est bien l’avenir du pays que l’on amputerait.  

Que décidera demain le nouveau ministre ? Quid de la seconde partie de la réforme des bourses tant attendue et nécessaire ? Quid du label pour réguler le supérieur privé lucratif ? Que deviendra Parcoursup ? Face à la gravité de la situation financière du pays, le tabou de l’augmentation des frais de scolarité à l’université sera-t-il aboli ?

Sans parler d’autres réformes tout aussi cruciales comme celle des études de santé qui faute d’être satisfaisante, doit encore être amendée selon les doyens des facultés de médecine et les futurs médecins.

Qui pour se saisir des dossiers brûlants ?

A n’en pas douter les sujets à traiter en urgence et les incendies à éteindre seront au menu des premières semaines pour les prochains ministres de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Qui aura le courage d'accepter ces postes et quelle sera leur latitude ?

Ariane Despierres-Féry | Publié le