Reportage

Une année à l’école des profs : "J'ai pris confiance en moi"

Au bout de quatre mois, les enseignants-stagiaires commencent à prendre leurs marques en classe.
Au bout de quatre mois, les enseignants-stagiaires commencent à prendre leurs marques en classe. © plainpicture/Blend Images/Hill Street Studios
Par Erwin Canard, publié le 18 janvier 2018
6 min

IMMERSION À L'ESPÉ. Épisode 4. Davantage de confiance en eux, de meilleures relations avec les élèves, des habitudes de travail qui se créent : Clémentine et Théo, enseignants-stagiaires de français en lycée, reviennent sur leurs premiers mois en tant que professeurs.

Quatre mois. Cela fait désormais quatre mois que les enseignants-stagiaires en lycée du master 2 MEEF (métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation) option lettres modernes de l'Espé de Paris ont fait leur première rentrée en tant que professeurs. En 2017, ils ouvraient pour la première fois la porte de leur classe et accueillaient "leurs" élèves, les premiers de leur carrière.

"Les premiers temps étaient un peu durs"

Fin septembre, Clémentine avouait avoir des problèmes de gestion de classe. Théo, lui, indiquait être dans un "stress" constant. "Les premiers temps étaient un peu durs, mais c'était le cas pour tout le monde. On découvrait le métier", reconnaît Théo, en cette mi-janvier. "Le début était difficile, notamment au niveau de la prise en charge des classes", se souvient Clémentine.
Depuis, les enseignants-stagiaires ont pris leurs marques, notamment dans leur relation avec les élèves. "Au fur et à mesure des cours et des semaines qui s'enchaînaient, le contact avec les élèves s'améliorait, le trac s'effaçait, on créait des affinités et ça facilitait la prise en main et la transmission des enseignements", constate Théo. "J'ai pris confiance en moi. Il y a une confiance mutuelle qui s'est instaurée et du relâchement dans le bon sens du terme au niveau de la discipline, poursuit Clémentine. Les rapports sont plus détendus, ce qui donne des cours beaucoup plus intéressants tant pour eux que pour moi." En somme, ajoute-t-elle, "le cadre est beaucoup plus propice au travail qu'en début d'année".

"J'ai changé ma façon de faire"

Le travail est également facilité par la progression des enseignants-stagiaires dans leur savoir-faire professionnel. Leur apprentissage du métier se fait à vitesse grand V, vu qu'ils sont confrontés concrètement aux problématiques. "Nous prenons des habitudes de travail, explique Clémentine. Par exemple, je sais combien de temps il me faudra pour élaborer un cours. Nous connaissons également les difficultés des élèves, donc nous pouvons davantage adapter les cours à leur niveau." La manière de faire cours a ainsi pu évoluer. "Depuis le début, j'ai changé ma façon de faire, admet Théo. On nous apprenait surtout à rendre l'élève maître de ses apprentissages mais je me suis vite rendu compte que c'était impossible dans une classe de 36 élèves, dont beaucoup ont peu d'affinités avec l'école. Désormais, je suis beaucoup plus directif, je laisse moins d'ouverture et ils écoutent beaucoup plus."
En outre, les conseils de leurs formateurs et collègues apportent beaucoup aux stagiaires. "Les visites des tuteurs Espé et terrain m'ont fait progresser, notamment sur la gestion de classe. Mais aussi sur la pédagogie, pour m'aider à répondre à la question : comment passer des savoirs universitaires à la transmission aux élèves", indique Clémentine.
On dit du métier de professeur qu'il s'apprend tout au long de la vie. Après seulement quatre mois d'expérience, la pratique est encore loin d'être parfaite. Les stagiaires sont conscients de la marge de progression qu'ils ont devant eux. "La transposition des savoirs pour les élèves reste difficile, souligne Clémentine. Il y a aussi la faculté à se laisser porter par eux : j'arrive avec une fiche de cours toute faite et j'ai envie que cela se passe comme c'est écrit. Mais les élèves apportent des choses intéressantes et je dois davantage, parfois, me laisser porter par cela." La question de la gestion de classe, qui occupait les têtes des stagiaires en début d'année, semble alors dépassée. Pour Théo, l'une des principales problématiques "est la clarté des enseignements, la pédagogie. Je pense que c'est, pour une grande part, l'expérience qui peut améliorer cela."

"Une lutte quasi quotidienne"

La réalité du métier et des élèves a aussi pu surprendre les enseignants-stagiaires. "On se rend compte qu'il est difficile de faire progresser tout le monde, encore plus avec une classe de près de 40 élèves. Il faut toujours répéter, faire de la discipline : c'est une lutte quasi-quotidienne", explique Théo. "J'avais de grandes attentes et, dans un premier temps, j'ai été un peu déstabilisée, avoue Clémentine. Probablement car l'image du métier était biaisée puisque j'étais une bonne élève, attentive, et que je ne me rendais peut-être pas compte que, pour certains, c'était plus difficile…" "C'est assez loin de l'image d'Épinal des élèves qui engloutiraient un savoir sans résistance", confirme Théo.
Pas de quoi, en revanche, les faire baisser les bras, voire réfléchir à changer de métier. "Je me vois bien faire ce métier pendant des années, même si je suis un peu inquiet par ce qu'on peut entendre sur la dégradation des conditions de travail de la part de profs plus anciens", indique Théo. Quant à Clémentine, elle estime "être à sa place" : "C'est mon métier, je n'ai plus de doutes."
L'Etudiant en immersion à l'Espé

Comment les enseignants-stagiaires appréhendent-ils leur première année devant des élèves ? Comment vivent-ils cette année de M2 MEEF réputée lourde et difficile ?
Toute cette année scolaire 2017–2018, l'Etudiant vous amène au cœur de la promotion 2018 du M2 MEEF option lettres modernes de l'Espé (École supérieure du professorat et de l'éducation) de Paris (75), sur le campus Molitor (XVIe arrondissement). Vous suivrez les péripéties de la trentaine d'enseignants-stagiaires affectés en lycée, des cours qu'ils suivent… à ceux qu'ils donnent.

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