Alternance dans une autre ville : comment s'en sortir avec deux loyers ?
Quand l'alternance n'est pas possible dans la ville où ils étudient, les apprentis se voient dans l'obligation de cumuler deux loyers pour vivre près de leur école et leur entreprise. Des apprentis racontent à l'Etudiant comment, avec les aides disponibles, ils essaient de faire baisser les factures.
Thalie* n'a pas vraiment eu le choix. Quand elle a commencé à chercher son contrat d'apprentissage, l'année dernière, elle s'est vite rendue compte qu'elle devrait envisager les aller-retours entre Aix-en-Provence et la capitale pour réaliser son alternance. "Dans le domaine du cinéma, les offres se concentrent essentiellement à Paris", explique l'étudiante, apprentie dans une boîte de production depuis septembre.
Comme elle, de nombreux étudiants en apprentissage se voient dans l'obligation d'accepter des contrats dans une autre ville que celle où ils étudient, dans un contexte où la concurrence se densifie pour trouver un contrat en alternance. "Je ne pouvais pas faire la difficile", confirme Yvana, qui a accepté un contrat à Grenoble, alors qu'elle étudie à Montpellier.
L'alternance dans une autre ville : trouver un deuxième appart
Quand ils ont enfin décroché le sésame du contrat, une autre difficulté ne tarde pas à apparaître pour les alternants : trouver un deuxième logement dans la ville de l'entreprise. "On reste étudiants, donc les propriétaires peuvent être exigeants en termes de garants", rappelle Merlina.
L'étudiante, en école d'ingénieurs à Montpellier, a passé plusieurs semaines à faire des visites, "le soir, après le travail", avant de trouver un appartement dans la capitale, à proximité de son employeur. "Pendant ce temps, je dormais chez ma sœur, qui habite à Paris", explique-t-elle.
"J'ai eu un énorme coup de bol : des amis d'amis ont eu vent d'un logement qui se libérait", explique de son côté Lucas, en alternance dans un média parisien. Le jeune apprenti de 23 ans se réjouit d'avoir pu trouver à la dernière minute. "Avec l'école, je n'avais pas eu le temps de faire des visites, je me disais que j'allais devoir squatter à droite à gauche", ajoute-t-il.
La recherche est d'autant plus exigeante qu'elle s'appuie souvent sur un budget encore plus resserré que d'habitude. "Étudiant déjà dans une ville où les loyers sont chers, j'ai fait en sorte de ne pas payer trop cher mon deuxième appart", assure Thalie.
Cumuler deux loyers, un budget conséquent
Avec le salaire qu'elle touche, l'étudiante a à peine de quoi payer ses deux loyers. "Je dois débourser 720 euros pour mon appart parisien, et 440 euros pour celui d'Aix, que je partage avec mon copain", détaille l'alternante. En additionnant les deux montants, c'est déjà un peu plus que les 1.100 euros que son entreprise lui verse tous les mois.
Pour s'en sortir, la jeune femme de 22 ans s'appuie sur l'aide Mobili-jeune de 100 euros, qu'elle touche tous les mois pour payer son nouveau loyer. Elle peut également compter sur les APL : "la CAF nous verse 365 euros pour le logement d'Aix", explique-t-elle. Mais les deux aides sont loin d'être suffisantes pour gérer les à-côtés : "En attendant de pouvoir toucher la prime d'activité, mes parents m'aident sur le reste des dépenses."
Le budget logement est tout aussi conséquent pour Merlina, qui cumulait pendant un temps deux loyers, un à Paris et un à Montpellier, avant de décider de se séparer d'un de ses appartements. "Je payais 450 euros d'un côté, et 740 euros de l'autre : au total, cela représentait bien 80% de mes revenus", assure-t-elle.
Répéter les locations courtes
Selon les différents rythmes en alternance, les apprentis qui cumulent deux loyers ont parfois le sentiment de perdre de l'argent. "Financièrement, ce n'était pas intéressant de payer un mois de loyer, alors qu'on ne restait que deux semaines à l'école", explique Lucas.
Pour éviter de "payer dans le vent", le jeune apprenti a opté pour une solution plus ajustable : les locations Airbnb. "Avec un ami, on se partage les frais : je loue la première semaine sur l'appli, lui il réserve la deuxième. C'est pratique, il y a moins d'administratif à gérer", explique-t-il. Lucas admet s'en sortir pour environ 300 euros pour deux semaines de location à Aix-en-Provence. Sans compter son logement parisien de 640 euros qu'il doit payer tous les mois.
Ilona aussi est passée par Airbnb pendant un temps. "J'essayais de m'arranger avec le propriétaire directement, pour ne pas avoir à payer les frais de service de l'application", explique-t-elle. L'alternante en école de commerce, qui doit faire l'aller-retour entre Lyon et Marseille toutes les deux ou trois semaines, s'est aussi appuyée sur ses proches pour limiter les frais.
"Je dormais sur un matelas chez mon amie, à Marseille, pour les périodes d'école, raconte-t-elle. Heureusement que je m'entendais bien avec elle, parce que vivre à deux dans un 18m², ça peut être compliqué". Aujourd'hui, Ilona a son propre appartement dans la cité phocéenne, et attend la prime d'activité le mois prochain pour mieux gérer ses dépenses.
En plus des colocations, les étudiants essaient aussi de faire des économies sur les transports en anticipant le plus possible leurs déplacements en train, voire en négociant avec leur entreprise pour se déplacer pendant la semaine, moins chère que le week-end.
La piste des résidences pour alternants
Autre solution, moins répandue : les résidences dédiées aux alternants. Yvana, en apprentissage dans une entreprise spécialisée dans l'électronique à Grenoble, loge dans ce type de résidence lorsqu'elle est à l'école, à Montpellier. "Je paye ma chambre à la semaine : cela me coûte environ 76 euros", détaille-t-elle.
Sa résidence sociale, gérée par une association, dispose d'une quinzaine de logements divisés en plusieurs chambres et s'adresse principalement aux étudiants justifiant d'un contrat en apprentissage et aux personnes aux faibles revenus. "Une bonne alternative, cela me permet de ne pas payer deux loyers", affirme la jeune femme.
Dans la même ville, Sud Alternance, une résidence dédiée aux alternants et gérée par le Crous de Montpellier, peut également accueillir jusqu'à 100 étudiants dans des studios. Ailleurs en France, des résidences spécifiques ou foyers de jeunes travailleurs proposent aussi aux alternants des solutions ponctuelles. Mais le nombre de places reste limité.
*Le prénom a été modifié.
Des aides régionales pour alternants
La plupart des régions en France propose des aides dédiées aux alternants. Elles concernent majoritairement la mobilité, mais peuvent également porter sur le remboursement de certains équipements nécessaires pour votre formation.
Par exemple, en Auvergne-Rhône-Alpes la carte SNCF gratuite Illico solidaire accorde une remise de 75% sur tous les billets de train régionaux en seconde classe : elle est réservée aux personnes en recherche d'emploi ou en contrat aidé.
En Ile-de-France, la région accorde avec l'ARA (l'aide régionale à l'apprentissage) aux apprentis une aide de 115 à 375 euros selon le niveau d'études pour faire face à vos différents frais.