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Décryptage

Prépas d’excellence : les dessous de la sélection

Par Jessica Gourdon, publié le 09 mars 2011
5 min

“Tous les jours, il en arrive des sacs pleins.” Des candidatures à ses prépas, Patrice Corre, proviseur du lycée Henri-IV à Paris, n’en manque pas. “10.000 dossiers, pour 550 places”, confie-t-il.

Il faut dire que ce lycée du quartier Latin est un rêve de premiers de la classe, avec chaque année des dizaines d’admis à Polytechnique, à HEC ou aux ENS (écoles normales supérieures). Son voisin Louis-le-Grand affiche le même genre de tableau de chasse, tout comme Sainte-Geneviève dite “Ginette” (Versailles), ou Le Parc (Lyon).

Pour la sélection, les candidats sont classés


Comment sélectionnent ces prépas d’élite, convoités par des élèves de toute la France ? Comme les autres, elles classent les candidatures, de la meilleure à la moins bonne. Sachant qu’au moment de la procédure Admission postbac, l’élève obtient une place dans le 1er de ses choix où il est le mieux classé.

Pour établir ce fameux classement des candidatures, tous les proviseurs se l’accordent : les notes en elles-mêmes ne signifient pas grand-chose. “Un 13/20 dans un établissement X peut valoir un 17/20 dans un autre”, souffle Philippe Freydefont, proviseur du lycée Thiers, à Marseille.

Pour classer les candidats, les professeurs vous évaluent à l’aune de votre environnement. Pour cela, ils disposent d’un document auquel vous n’avez pas accès, où figurent votre classement dans les matières qui comptent (1er et 2e trimestres de terminale), l’effectif de la classe, son niveau (de “faible” à “excellente”), et des appréciations.

“Quelqu’un qui est 6e dans une très bonne classe a toutes ses chances chez nous. Mais s’il est dans une classe moyenne, on ne le prendra que s’il est 1er partout”, illustre le proviseur du lycée du Parc, Pierre-Jean Bravo.

Renseignez-vous sur le niveau de votre classe


Ainsi, dans une terminale L évaluée comme “bonne” (et non “très bonne”) d'Hélène-Boucher (Paris), une élève a été admise en prépa littéraire à Henri-IV avec 15 en histoire (2e), 14 en lettres (3e) et 14 en philo (2e).

Dans une classe notée “moyenne”, une élève du lycée privé Levasseur (Saint-Denis de La Réunion) a été prise avec 16 en histoire (1re), 17,5 en littérature (1re) et 13,5 en philo (1re). Toutes deux ont été classées autour de la 320e place, et font partie des dernières reçues (le lycée est descendu jusqu’à la 400e place pour constituer 4 classes de 45 élèves).

Pour maximiser vos chances lors de la procédure Admission postbac, vous avez intérêt à utiliser tous vos vœux, et à demander plusieurs filières. Pour les scientifiques, sachez que les prépas “bio” et PTSI (physique-technologie) sont généralement moins sélectives que les MPSI (maths-physique).

De même, privilégiez les lycées qui ont plusieurs classes de la même section : il y a 6 classes de maths sup’ à Louis-Le-Grand, mais seulement 2 à Henri-IV. En revanche, Louis-le-Grand n’a que 2 hypokhâgnes A/L, quand Henri-IV en remplit 4. “C’est notre prépa HEC qui est la plus sélective, car nous n’avons qu’une classe”, remarque Joel Vallat, proviseur de Louis-le-Grand.

Faites une simulation de bourses


Dans certains lycées, vous avez la possibilité de doubler votre vœu en demandant une place en internat : une solution maligne pour multiplier ses chances d’être bien classé.

En outre, depuis 2 ans, les lycées ont des consignes strictes pour augmenter leurs volumes de boursiers : n’oubliez pas de faire une simulation sur www.cnous.fr, car les critères de sélection sont différents de ceux du lycée. “À dossiers équivalents, je demande à mes équipes de privilégier, dans leur classement, les boursiers”, explique Pierre-Jean Bravo.

Le savoir-être compte aussi


D’autres lycées, comme Sainte-Geneviève, accordent de l’importance à des facteurs comme la capacité à vivre en groupe et à avoir l’esprit d’équipe. “Cela fait partie de nos caractéristiques. Nous recherchons cela dans les lettres de motivation, que nous demandons, en plus de la procédure APB. Nous aimons aussi détecter les étudiants au caractère bien trempé”, explique le proviseur de “Ginette”.

Les élèves “maison” sélectionnés comme les autres


Ceux qui ont fait leur lycée dans ces établissements sont-ils avantagés par rapport aux autres ? “Oui, dans le sens où nos classes sont d’un excellent niveau”, remarque Joel Vallat. Les professeurs savent aussi mieux évaluer ces candidatures. Mais ces élèves restent sélectionnés comme les autres.

À Henri-IV, si 40% des élèves de terminale restent en prépa dans leur lycée, une part équivalente poursuit en prépa ailleurs, car ils n’ont pas été pris. Au total, les élèves “maison” ne représentent, à Henri-IV, que 20% des admis.

“Passer son bac dans un lycée d’excellence n’est pas du tout un préalable indispensable”, conclut le proviseur du lycée du Parc. “Mieux vaut être 1er dans un lycée normal que 15e dans un des meilleurs lycées de France

En résumé
1. Votre moyenne compte moins que votre classement et le niveau de votre classe. Demandez à vos profs leur avis sur cet aspect.
2. Dans le système APB, vous ne perdez rien à viser haut. Mais faites au moins 2 vœux de sécurité pour ne pas vous retrouver sur le carreau.
3. Doublez vos voeux par des demandes d’internat, lors qu’il en existe.

Polytechnique, ENS Ulm, HEC : d’où viennent les bêtes à concours ?
En théorie, toutes les prépas mènent à ces écoles. Mais pas dans les faits…
HEC. Parmi les 377 admis issus à HEC en 2010, 128, soit 1/3, ont suivi leur classe préparatoire dans seulement 4 établissements !
Henri-IV en a envoyé 44, Sainte-Geneviève, 34, IPESUP, 26 et Saint-Jean de Douai, 24.
ENS Ulm. Sur les 100 admis de la voie littéraire (75 A/L, et 25 B/L), 48 ont fait leur prépa à Henri-IV, et 24 à Louis-Le-Grand.Polytechnique.
Sur les 400 admis à Polytechnique en 2010, 147, soit 37% venaient de 2 lycées : Louis-Le-Grand et Sainte-Geneviève. Une proportion stable depuis plusieurs années.


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