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Reportage

"On n'a jamais fait ça, on apprend plein de trucs" : à l’école d’architecture de Lille, 30 lycéens en stage intensif

A l'ENSAP Lille, moins de 5% d’étudiants sont issus de filières pros et technologiques.
Pendant une semaine, les lycéens découvrent les études en école d'architecture. © Léa Fournier
Par Léa Fournier, publié le 28 février 2025
5 min

Pendant une semaine, trente lycéens découvrent les exigences des études d’architecture à l’ENSAP Lille. Sélectionnés sur critères sociaux et académiques, ils participent à un stage intensif organisé par la Fondation Culture & Diversité. Cette semaine leur offre une première expérience immersive dans une filière sélective.

Pistolet à colle en main, Rania s’applique à fixer des morceaux de carton les uns avec les autres. Si l’activité paraît ludique, il ne s’agit pourtant pas d’un jeu : la jeune femme de 18 ans participe cette semaine à un stage d’architecture intensif.

Trente lycéens, venus de toute la France, se retrouvent cette semaine du 24 au 28 février 2025. Ils sont accueillis à l’ENSAP Lille (59), l’École nationale supérieure d'architecture et de paysage, pour découvrir les études en école d'architecture. Dans la salle de cours, chacun est affairé à découper un morceau de carton au cutter, à fixer de la mousse dessus, ou à assembler des éléments à la colle chaude.

Cette initiative, portée et financée par la Fondation Culture & Diversité, vise à lever les freins sociaux, géographiques et psychologiques qui limitent l’accès aux grandes Écoles de la Culture pour les jeunes issus de milieux modestes. Une immersion totale et gratuite dans la vie étudiante, rythmée par des ateliers pratiques, des rencontres et des activités créatives.

Une semaine pour se projeter

Le programme "Égalité des Chances" de la Fondation, créé en 2009, rassemble aujourd’hui vingt ENSA . Tous les ans, elles se relaient pour recevoir des lycéens de terminale – deux écoles accueillent un total de 60 élèves chaque année. Un stage sélectif, comme l’explique Marguerite Eloi, chargée de mission à la Fondation : "Nous évaluons la cohérence du projet d’orientation des candidats, leur motivation. Il y a des critères académiques. Et nous portons bien sûr une attention particulière à leur contexte social."

Les lycéens fabriquent et assemblent différents éléments de leur construction.
Les lycéens fabriquent et assemblent différents éléments de leur construction. © Léa Fournier

Pour Pierre Semal, professeur d’art et technique de la représentation, c’est l’occasion "de diffuser la culture architecturale à des personnes qui ont vraiment envie d’y accéder et qui sont très motivées". L’enseignant considère que des actions de ce type sont essentielles. "Dans notre école, on a moins de 5% d’étudiants issus de filières pros et technologiques. Il y a une sorte de plafond de verre : ils ont tendance à se dire que ces bacs ne peuvent pas mener à des études supérieures", expose-t-il. Or, Pierre Semal entend bien montrer que l’ENSAP Lille est "ouverte à tous les publics".

Tout au long de la semaine, le professeur encadre les jeunes. D’ici vendredi, ils devront concevoir et restituer une maquette avec cinq pavillons, sur un espace en pente. Ce mardi, les lycéens sont occupés à fabriquer et assembler différents éléments de leur terrain. Sourire aux lèvres, Pierre Semal passe dans les différents groupes pour observer les constructions. "Ils sont très motivés et curieux… Je souhaite vraiment leur apprendre un maximum de choses !"

Un apprentissage immersif

"C’est archi-intéressant !", assure Rania. Elle est actuellement en bac pro TBAA à Paris (75) et envisage de devenir architecte depuis trois ans. "J’aime construire des choses avec mes mains, dessiner…" raconte-t-elle. Elle est ravie de ces premiers jours à l’ENSAP. "On n'a jamais fait ça, on apprend plein de trucs."

Encadrés par des enseignants et des étudiants en master, les lycéens "vont très vite", précise Pierre Semal. Ils expérimentent la conception de maquettes, font des croquis d’observation. "Ils font en une semaine ce que les étudiants de première année réalisent en un semestre."

Lors du stage, les lycéens expérimentent la conception de maquettes et font des croquis d’observation.
Lors du stage, les lycéens expérimentent la conception de maquettes et font des croquis d’observation. © Léa Fournier

Au-delà des cours théoriques et pratiques, d’autres activités sont organisées autour de l’architecture, avec une visite du Vieux-Lille et de la villa Cavrois par exemple. Il y a aussi des moments de détente : une soirée pizza, des jeux de société, des défis créatifs comme la construction d’une tour en bâtonnets. "On essaie aussi de les préparer aux entretiens d’admission en travaillant la prise de parole en public", ajoute Marguerite Eloi.

Un engagement au-delà du stage

Pour les participants, cette semaine représente une opportunité unique. Trésor, 19 ans, y voit aussi un avantage stratégique : "Sur Parcoursup, ça montre notre motivation. C’est une vraie expérience par rapport aux autres." Venu du Havre pour participer, il est heureux de cet accompagnement. "En plus, on aura de l’aide de la part d’étudiant pour notre lettre de motivation." 

Car le suivi des lycéens se prolonge au-delà du stage. Les ENSA sont sélectives. Alors pour mettre toutes les chances du côté des jeunes, la Fondation Culture & Diversité leur offre un accompagnement sur Parcoursup, un mentorat et une aide financière pour les frais de dossier et de transport. Avec 61% des anciens participants intégrant une école d’architecture, l’impact est réel.

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