Décryptage

Écoles de commerce multicampus : qu'est-ce que ça change ?

Neoma Business School  Reims et Rouen
Les deux campus de Néoma BS, à Reims et Rouen. © Neoma
Par Cécile Peltier, publié le 15 avril 2016
1 min

De plus en plus d’écoles de management multiplient les campus pour déployer leur programme grande école. À la clef pour leurs élèves : des possibilités plus nombreuses en matière d’options, de stages ou de vie étudiante… Mais peut-on vraiment choisir son site ? Et ont-ils tous le même niveau ? La réponse avec trois étudiantes qui ont tenté l’expérience.

Au gré des fusions, des rachats et des nombreux développements, les écoles de management françaises sont de plus en plus nombreuses à proposer leur PGE (programme grande école) sur plusieurs campus.

Ainsi, l'INSEEC, historiquement basée à Bordeaux, s'est installée à Paris, puis à Chambéry et Lyon. Skema, fruit de l’union du Ceram et de l’ESC Lille, est implantée à Lille, Nice et Paris. Néoma, pour sa part, se retrouve à Reims et à Rouen… pour ne citer que quelques exemples (voir encadré).

À la clef pour les étudiants : un éventail plus large de spécialisations, l’occasion d’étoffer leur réseau ou encore de tester plusieurs villes à l’heure où la mobilité est indissociable, ou presque, de l’expérience étudiante. Mais sur le terrain, qu’en est-il au juste ? Décryptage à travers quatre exemples : l'EDHEC, l'INSEEC, Kedge et Néoma.

Peut-on choisir son campus ?

Tout dépend des écoles

À l’INSEEC, une fois admis, les étudiants ont le choix entre Bordeaux, Paris, Chambéry et le nouveau campus de Lyon, à partir de la rentrée 2016. Une facilité qui a “pesé” dans le choix de Clémence, étudiante en troisième année dans la capitale, après 2 ans passés à Bordeaux. “J’étais intéressée par la possibilité de bouger et notamment de passer par Paris, où je pensais qu’il fallait que je connaisse du monde pour démarrer ma carrière.”

La même liberté prévaut à Néoma, où il est possible de visiter virtuellement les deux campus de Reims et de Rouen, avant de se décider.

À Kedge, le match se joue entre Marseille et Bordeaux, d'abord chouchoute des étudiants. “La première année, il y a eu un déséquilibre en faveur de Bordeaux, mais cela s’est équilibré”, reconnaît Armand Bajard, directeur des programmes initiaux de Kedge. Après son oral sur le campus de Kedge dans la cité phocéenne, Margaux, aujourd’hui en deuxième année, a souhaité voir à quoi ressemblait le site bordelais, et s’est laissée séduire. “La ville m’a beaucoup plue. Je me suis aussi renseignée sur les associations présentes sur le campus, les MSc et j’ai décidé d’y aller en gardant à l’idée que j'étudierai sur les deux campus au cours de ma scolarité.”

À l’EDHEC, inversement, la première année du PGE a forcément lieu à Lille.

Le niveau est-il le même d’un campus à l’autre ?

Oui

“C’est une seule et même école avec quatre campus, mais un seul et même concours d‘entrée et un seul et même diplôme à la sortie”, insiste le directeur d’INSEEC BS, Jacques Chaniol. Lorsqu’elles ouvrent leur programme grande école dans une nouvelle ville, les écoles doivent assurer au ministère de l’Enseignement supérieur qu’elles seront en mesure de garantir le même niveau académique d’un campus à l’autre.

“Jusqu’aux spécialisations qui interviennent en M2, le programme est totalement identique sur les deux campus, assure Céline Davesne, directrice générale adjointe aux programmes chez Néoma. L’objectif est de faire vivre la même expérience académique aux étudiants.”

Chaque enseignement est piloté par un professeur, basé indifféremment à Reims ou à Rouen, qui veille à l’uniformité des cours, sanctionnés par un examen simultané sur les deux campus. Service international, accompagnement de carrière, développement personnel, etc. : "Les étudiants bénéficient exactement des mêmes services d’un campus à l’autre.”

Puis-je changer de campus en cours de scolarité ?

Oui

À l’INSEEC, sur 1.500 étudiants de troisième année, environ 20 % changent de site, en général pour avoir accès à un parcours de spécialité qui n’existait pas sur leur campus. Les “majeures” classiques – finance, audit, contrôle finance d’entreprise, GRH – sont proposées à Bordeaux et Marseille, mais “Wine and Spirit Management” seulement à Bordeaux et “Luxury, Brand Management”, uniquement à Paris.

De même à Kedge, à partir du cycle master, le parcours “métier supply chain" est disponible exclusivement à Bordeaux, et RSE à Marseille, en réponse à un besoin du tissu économique local. Attirée par le parcours audit-expertise qui lui permet d'obtenir des dispenses pour le DSCG (diplôme supérieur de comptabilité et de gestion), l'envie de découvir deux environnements, mais aussi par la possibilité de se rapprocher de sa région d’origine, Margaux, étudiante à Kedge a quitté Bordeaux en deuxième année pour Marseille.

“Pour accéder à ma majeure, il fallait que j’ai la moyenne à tous mes partiels”, confie Margaux, qui s’est mise très tôt en relation avec l’administration des deux campus. L’occasion d’élargir son cercle d’amis et de découvrir une autre ville. Mais au final, le phénomène est limité : il y a environ 30 migrations par an de Bordeaux à Marseille et inversement.

À l’EDHEC, la répartition géographique est très claire :  en M1, les étudiants ont le choix entre rester à Lille pour suivre la filière “business management”, ou intégrer à Nice la filière “financial economics”, comme Sarah, 20 ans. Une mobilité soumise à une sélection sur la base de résultats académiques. “Pour bouger, il fallait une note suffisante en maths et statistiques et en macroéconomie, au moins 12 de moyenne et pas de rattrapage dans ces matières.”

Certains étudiants demandent aussi à déménager afin de poursuivre leur scolarité en alternance, souvent à Paris. Mais attention, décrocher un contrat n’est pas toujours évident. Lâchée par l’entreprise qui lui avait promis de l’embaucher, Clémence, en troisième année à l’INSEEC, s’est rabattue sur un stage alterné. Une expérience “plutôt cool” au final, puisqu’elle fait ses armes dans l’entreprise de jeux vidéo de ses rêves, mais sans les avantages de l’alternance : elle gagne juste assez pour couvrir le loyer de sa chambre chez l’habitant, et doit payer les frais de scolarité. Mais Clémence est philosophe : “Je ne regrette rien. Être à Paris me permet de développer mon réseau !”

L’expérience étudiante est-elle la même ?

Non, pas totalement

Si les écoles font un effort pour assurer à tous les étudiants le même niveau de services – cafétéria, infrastructures sportives, BDE... –  et créer une identité commune – réseaux sociaux, séminaire d’intégration, rencontres interassociatives, comme le Kick Start Week-end à Kedge –, chaque campus a sa personnalité.

“On a essayé d’avoir une identité commune à travers la construction du bâtiment, les amphis, la signalétique, mais l’environnement est différent, et donc l’expérience étudiante un peu aussi”, reconnaît Sylvie Jean, directrice des admissions du programme grande école et de l’année prémaster de l’EDHEC.

Sarah, étudiante en M1 finance sur le campus de Nice, après une année à Lille, peut en témoigner : “À Lille, le campus est à l’extérieur de la ville mais dispose d’un parc et d’infrastructures sportives très agréables, comme la piscine. À Nice, il est plus petit mais avec vue sur mer…”

La spécificité de chaque campus tient aussi aux associations, souvent différentes d’un site  à l’autre. Frustrée par l’absence à Nice de Schola Africa, l’ONG dans laquelle elle s’est beaucoup investie, Sarah apprécie l’ambiance familiale du campus niçois. “C’est plus petit qu’à Lille, et je suis davantage amenée à me mélanger avec des étudiants internationaux ou issus d’autres programmes.”

Déménager peut aussi avoir un coût, notamment en matière de loyer. Pensez à solliciter votre école. L’INSEEC met par exemple à disposition de ses étudiants un système interne de partage d’appartements.

Le choix du campus a-t-il un impact en termes d’employabilité à la sortie ? 

Cela dépend

À la sortie, votre diplôme sera le même, quel que soit le campus par lequel vous serez passé. Et les écoles sont d'accord : souvent, le poste que vous décrocherez ensuite ne dépendra pas de la ville où vous aurez effectué vos études. “80 % des étudiants viennent d’une autre région et repartent une fois leur diplôme en poche, et sur l’ensemble, 30 % environ commencent à l’étranger”, remarque Armand Bajard de Kedge.

“Tout dépend de la voie vers laquelle on se dirige, ajoute Margaux. Pour moi qui m’oriente vers l’audit, c'est moins la région en elle-même que la spécialisation qui va être déterminante. En revanche, quelqu'un qui souhaite se spécialiser dans le vin aura sans doute intérêt à aller à Bordeaux, à la fois pour le MSc et pour la réputation viti-vinicole de la région...” Avis aux amateurs !

Les écoles de management multicampus en France

Parmi les 38 grandes écoles de commerce, 12 proposent leur programme grande école sur deux, voire trois ou quatre campus en France.

Les voici : 

- EDHEC, Lille, Nice, Paris.

- EM Normandie, Caen, Le Havre, et Paris à compter de la rentrée 2016.

- ESCE, Lyon, Paris.

- ESSCA, Angers, Paris.

-ICD, Paris, Toulouse.

-ICN, Metz, Nancy.

-Ieseg, Lille, Paris.

- INSEEC BS, Bordeaux, Chambéry, Paris, et Lyon à partir de la rentrée 2016.

-IPAG Paris, Nice.

- Kedge, Bordeaux, Marseille.

- Néoma, Reims, Rouen.

- Skema, Lille, Nice, Paris.

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