Reportage

Oraux des écoles de commerce : dans la peau d'un admissible à South Champagne Business School

Entre le 19 et le 30 juin, 550 élèves de prépa, admissibles au concours de la BCE, vont venir passer les oraux à South Champagne Business School, à Troyes.
Entre le 19 et le 30 juin, 550 élèves de prépa, admissibles au concours de la BCE, vont venir passer les oraux à South Champagne Business School, à Troyes. © Cécile Peltier
Par Cécile Peltier, publié le 27 juin 2018
10 min

Chaque année, pendant la deuxième quinzaine de juin, les élèves de prépa économique et commerciale, admissibles aux grandes écoles de commerce, se lancent dans un tour de France des oraux. Un périple festif et éreintant, riche en émotions. Escale à Troyes, à South Champagne Business School, avec les candidats au concours BCE.

Malgré le soleil matinal qui tape sur le toit de “la Rue”, la verrière toute en longueur emblématique de South Champagne Business School – le nouveau nom de l’ESC Troyes –, les “staffers” s’affairent, prêts à accueillir la soixantaine de candidats de ce 20 juin 2018. Au total, quelque 550 admissibles au concours BCE vont défiler sur le campus de l'école supérieure de commerce troyenne en dix jours. Des élèves de prépa, pour beaucoup originaires du grand Est, qui ont fait le choix de passer les oraux d’admission de SCBS.

Comme Noémie, 20 ans, une bonne partie sont arrivés hier soir. Élève de prépa ECS (option scientifique) au lycée Thiers, à Marseille, l'Aixoise apprécie le soutien logistique de la trentaine d’admisseurs en t-shirt rouge.

Ce n’est pas facile de partir seule à l’autre bout de la France, se repérer dans le métro parisien, courir pour attraper son train... Quand je suis arrivée hier soir, j’étais bien contente de ne pas avoir à gérer d’intendance”, reconnaît la jeune fille qui, pour 10 €, a pu bénéficier d’un des appartements mis à disposition par l’école, près du “Bouchon de champagne”, l'hypercentre médiéval.

Ce matin, l’équipe restauration a offert le petit-déjeuner, pendant que le pôle transport allait réceptionner les derniers arrivés à la gare.

Wii, ping-pong, billard pour oublier son stress

Élèves de première année du programme grande école, les staffers sont sélectionnés et formés par l’établissement. Ils sont là pour répondre aux questions des candidats, les guider et leur faire passer un bon moment. Avec l’espoir de les voir, au final, choisir SCBS. “J’ai voulu partager l’accueil formidable dont j’ai bénéficié l'année dernière, et au vu, des premiers retours, c’est plutôt réussi !”, se réjouit Clément. La preuve en direct : “J’étais beaucoup plus nerveux pendant le trajet, une fois dans l’école, ça va, les admisseurs et les discours nous mettent à l’aise”, reconnaît Lucas, 19 ans, en prépa à Amiens.

“On les met dans de bonnes conditions afin de leur faire oublier leur stress”, explique Fabien, membre du pôle “animation”. Wii, baby-foot, billard, casque de réalité virtuelle... : pour les besoins des concours, le campus a été transformé en salle de jeux, et entre les épreuves, les candidats prennent du bon temps. “On propose aussi des animations, des sorties au bowling, des laser games et, hier soir, un barbecue…”, énumère Fabien. “Un moment sympa”, reconnaît Pierre, en prépa ECE à Bourg-en-Bresse.

"Je ne voulais pas être un numéro"

À 11 h 30, tous les candidats se pressent dans le grand amphithéâtre pour les traditionnels discours de bienvenue. Après la présentation du programme grande école, PowerPoint à l’appui, c’est au tour du directeur général du groupe de s'adresser aux admissibles. Sans micro, avec chaleur, Francis Bécard les appelle à “être audacieux”, sans renoncer à leurs rêves. “Vous imaginez, si Nadal s’était ennuyé sur un court de tennis, il n’aurait jamais été numéro 2 mondial !”, plaisante-il. Entre deux considérations économiques, il vante les atouts de SCBS : son ambiance familiale, son suivi étroit des élèves, sa proximité avec l’École de design, les entreprises de la région...

Le président des admisseurs, Zakaria, enfonce le clou : “En, prépa, les profs disaient : "les petites écoles avec des petites promos, c’est pas les bonnes", mais moi je ne voulais pas être un numéro. Et on a tendance à l’oublier, mais on fait tous partie de la Conférence des grandes écoles !" Pour les écoles qui s’arrachent les élèves de prépa, les épreuves orales sont l’occasion de sortir leurs plus beaux atours.

Un déjeuner pour réseauter

Mascottes, musique endiablée, danses... Vers 12 h 15, les candidats, guidés par les staffers en folie quittent l’amphi. Direction le self pour un déjeuner qui mélange candidats, étudiants et membres des jury. Un moyen convivial de découvrir l'école autrement et de réseauter.

Pierre, très classe dans son costume-cravate, a pris place à côté de Mélina, staffeuse. En s’inscrivant aux oraux, l'étudiant s’est arrangé pour passer un à deux jours par campus. Objectif ? Sentir l’ambiance et faire le tour des associations". Il ne regrette pas cette première étape : “Je suis impressionné par le campus. C’est beau et la ville est plus grande que je ne l’imaginais. Le discours du président des admisseurs était assez classique, mais celui du directeur m’a beaucoup plu”, explique-t-il avant de s’interrompre pour écouter Romuald.

Pendant les repas, à SCBS, les admissibles sont mélangés avec des staffers et des membres du jury. Une autre manière de découvrir l'école de commerce.
Pendant les repas, à SCBS, les admissibles sont mélangés avec des staffers et des membres du jury. Une autre manière de découvrir l'école de commerce. © Cécile Peltier

À l’autre bout de la table, l’étudiant, qui rempile pour la deuxième année consécutive comme “responsable du pôle transport”, délivre à ses voisins endimanchés, une “formation express” au rocket pitch : l’épreuve orale originale qui les attend l’après-midi. Cela tombe bien, armé d’un mégaphone, un admisseur appelle ceux qui le souhaitent à une séance de préparation collective.

Un oral "en mode discussion"

À 14 h 30, guidée par les staffers, Juliette pénètre dans la salle et s'assoit dans le fauteuil blanc. Face à elle, ou plutôt avec elle, un enseignant-chercheur et une professionnelle. En effet, pour casser le côté tribunal de l’oral, la pièce a été transformée en salon. Et passées les premières minutes de stress réglementaire, la candidate, souriante, expose, schéma à l’appui, l’objet innovant conçu à partir de trois objets piochés dans une liste imposée par l’école. C’est le fameux "rocket pitch".

Cette fan de nouvelles technologies et de dessin a imaginé un système de lunettes de plongée connectées, relié à une montre, alimentée par l’électricité produite par les mouvements de palmes du plongeur. De quoi cartographier ses balades sous les fonds sous-marins. L’idée de ce “rocket pitch” ? Faire connaissance avec le candidat et “casser les discours un peu formatés". “On n’évalue pas la pertinence du projet, mais la créativité de l’étudiant, sa capacité à s’adapter à des contraintes, sa manière de s’exprimer, ses centres d’intérêt…”, explique Catherine Léon-Suberbielle, la directrice académique de SCBS.

L’entretien de personnalité qui suit est assez classique : pendant 20 minutes, Juliette déroule son parcours : la prépa ECT (option technologique) à Montpellier, ses voyages, sa passion pour le "serial entrepreneur" Elon Musk... “Quel est le dernier livre que vous lu ? Où vous voyez-vous en 2025 ?, etc.” De temps à autre, le jury l’interrompt pour lui demander une précision, toujours avec bienveillance. “On n’est pas là pour piéger le candidat, ni pour les juger en tant que personne. On teste son ouverture d’esprit, sa capacité d’intégration, ont voit s’il a le profil pour s’épanouir chez nous”, explique Catherine Léon-Suberbielle.

Tout s’est bien passé. Juliette est libérée. Il lui reste ses épreuves de langues : anglais et espagnol. Les notes obtenues serviront dans plusieurs autres écoles.

Un tour de France qui a un prix

Pendant ce temps, dans le patio, à l’ombre des parasols, les admissibles, vautrés dans les canapés moelleux, se détendent. Accompagnée de Solène, une amie de prépa, et de son petit ami, Baptiste, qui a accepté de jouer les chauffeurs, Élise se repose après son entretien : "Cela s’est bien passé, le jury nous met à l’aise. J’avais un peu réfléchi sur la base de mon CV à ce que je pouvais dire : mon stage de 3e en pharmacie, mon travail en centre de loisirs, ma contribution à un site qui explique les paroles de musique...", détaille-t-elle.

Boursière, elle ne paie pas les épreuves écrites, seulement les oraux. Mais même en préférant le covoiturage entre amis au train, la facture devrait tourner autour de 300-400 €”, explique l’étudiante qui va souscrire un prêt pour payer sa future école.

A SCBS, entre deux épreuves orales, les candidats du concours BCE se détendent en compagnie des étudiants "staffers".
A SCBS, entre deux épreuves orales, les candidats du concours BCE se détendent en compagnie des étudiants "staffers". © Cécile Peltier

Le trio reprendra la route demain matin, avec une première étape à Évry (91), où Solène, passe l’oral de l’Institut Mines-Télécom Business School (ex-Télécom École de management), puis à RSB (Rennes School of Business) où Élise est admissible.

Si aujourd’hui, ils ne jurent que par Troyes, les admissibles poursuivront demain leur tour de France des écoles où les attendent d’autres admisseurs et d'autres moments forts : INSEEC Paris ou Lyon, ISC Paris, EM Normandie, ESC Clermont, La Rochelle BS, Burgundy School of Business, parfois aussi Neoma et Kedge. La plupart des candidats rencontrés ici n'ont pas passé les écoles du top 10 du SIGEM (système d'intégration aux grandes écoles de management), membres de la BCE. Et c’est seulement une fois leurs résultats tombés qu’ils choisiront leur école. Pour l’ambiance, la ville, les spécialisations proposées, sans oublier les classements des établissements...

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