Témoignage

Après la prépa, les nouveaux élèves ingénieurs "se sentent revivre"

Barbecue du week-end pour les étudiants des Arts et Métiers ParisTech, en blouses traditionnelles, à Cluny.
Barbecue du week-end pour les étudiants des Arts et Métiers ParisTech, en blouses traditionnelles, à Cluny. © Virginie Bertereau
Par Laura Makary, publié le 27 septembre 2017
7 min

Après deux, voire trois années de classes préparatoires, les élèves ingénieurs fraîchement intégrés laissent derrière eux le stress des concours et expérimentent le quotidien en école. Redécouverte des loisirs, baisse de la pression, cours moins encadrés, les étudiants ressentent une impression générale de soulagement.

Une autre vie. C'est cela que les anciens élèves de prépa qui arrivent en écoles d'ingénieurs découvrent, une fois les épreuves écrites et orales derrière eux. Le stress des concours et le rythme soutenu de la classe préparatoire ont beau être formateurs, ces deux à trois années demeurent des moments intenses pour les étudiants. Et pour beaucoup, le premier sentiment, une fois le cap passé, est bel et bien le soulagement.

Moins de pression, plus d'activités

C'est exactement ce que ressent Pierre, élève en première année de l'ESPCI Paris, après une prépa PC* au lycée Montaigne, à Bordeaux. Et cette école, il en rêvait. "J'ai voulu intégrer l'ESPCI dès mes débuts en prépa et je suis ravi d'y être ! Je ressens beaucoup moins de pression depuis que je suis arrivé à l'école. La prépa est très rythmée, on a la tête dans le concours, pour lequel il faut tout donner. Alors qu'une fois à l'école d'ingénieurs, on se retrouve dans une ambiance étudiante normale. On peut se voir avec les autres élèves, et pas seulement dans le cadre des cours", explique l'étudiant, qui envisage de poursuivre en thèse après son cycle ingénieur.

Depuis qu'il a quitté la prépa, Pierre a repris le sport et "une vie sociale". "Déjà, je peux dormir ! C'est super d'avoir des soirées libres, je vois mes amis, je rencontre des nouvelles personnes, ça fait beaucoup de bien. Le sport aussi m'avait manqué. Avec le recul, quand je vois l'accumulation de devoirs, de cours, de khôlles, je me demande comment j'ai pu vivre tout ça et tenir le coup", confie-t-il. Même constat pour Laurine, à l'ENSCMU (École nationale supérieure de chimie de Mulhouse). "J'ai pu reprendre le sport, sortir le soir, regarder un film, bref, toutes ces activités mises de côté. Nous avions un gymnase en prépa, mais difficile de trouver le temps d'y aller", explique l'étudiante.

"Je me sens revivre"

Comme eux, Emma vient de réussir un concours, celui de l'ENSGTI (École nationale supérieure en génie des technologies industrielles), à Pau. "J'ai dû mettre la musique et le sport entre parenthèses le temps de la prépa. Je suis soulagée et contente de retrouver un équilibre. Je me sens revivre", lance-t-elle avec une joie non dissimulée. Prochaine étape pour la nouvelle étudiante : rejoindre l'orchestre universitaire de Pau à la flûte traversière et découvrir les nombreux sports proposés par son école.

L'ambiance, elle aussi, est bien différente une fois en école d'ingénieurs. "On se voit davantage, on fait plus de choses ensemble. Finalement, je voyais peu mes camarades de prépa, ou alors, on ne parlait que de cours entre nous. Ici, il y a moins de compétition et beaucoup de projets communs. Le travail est collectif et festif, on n'a pas la tête que dans les devoirs et les khôlles", s'enthousiasme Victor, arrivé depuis quelques semaines à l'ENSEEIHT (École nationale supérieure d'électrotechnique, d'électronique, d'informatique, d'hydraulique et des télécommunications), à Toulouse.

Des cours plus pratiques, moins d'encadrement

Autre point que l'étudiant apprécie : les cours, plus pratiques et plus spécialisés. "Je suis très intéressé par l'électronique et les cours, même magistraux, sont plus pratiques et liés à cette thématiques, comme les TP. Ce sont des matières qui me plaisent, moins larges qu'en prépa, où l'on a des maths, de la physique de façon générale", détaille Victor.

Mais attention cependant à rester concentré. "Les professeurs ne sont pas derrière nous tout le temps, comme c'était le cas en prépa, où nous étions beaucoup plus cadrés. Désormais, il faut apprendre à se gérer soi-même, notamment en amphi, où il vaut mieux être devant pour bien entendre le cours", relève Emma, à l'ENSGTI. De plus, le fait d'être plus nombreux sort les étudiants de cette ambiance de lycée, préservée lors des deux années de CPGE (classe préparatoire aux grandes écoles). "Dans des cours regroupant une promo de 85 élèves, le professeur ne peut pas voir des sourcils qui se haussent ou quelqu'un qui décroche, comme lorsque nous étions 30 dans une petite classe", ajoute Pierre, de l'ESPCI.

Ne pas se laisser déborder

Le relâchement, c'est justement le risque pour les anciens élèves de CPGE, désormais "débarrassés" des concours. Sylvie Malo, directrice des études de l'ENSICAEN, les met particulièrement en garde. "Souvent, les élèves issus de prépa pensent que le plus dur est derrière eux. On ne fait pas l'appel dans la plupart des cours. C'est souvent la première fois qu'ils vivent hors du foyer familial, la tentation d'une vie étudiante à foison peut donc être forte ! Il est important de ne pas se laisser déborder. Il faut rester concentré, sous peine d'avoir des difficultés à rattraper les révisions pour les examens de décembre et janvier", souligne-t-elle.

Lors de l'amphi de rentrée des étudiants de première année, elle tient d'ailleurs à présenter les statistiques de redoublement. "On pourrait penser que les élèves de prépa ont un meilleur niveau que ceux de DUT (diplômes universitaires de technologie), par exemple. Pourtant, ce sont ceux qui redoublent le plus, car ils se laissent entraîner dans le sport, les soirées et la vie associative", tranche-t-elle. Nouveaux élèves ingénieurs, attention donc de trouver le bon équilibre entre réjouissances étudiantes et travail régulier en cours.

Quatre conseils pour votre nouvelle vie

Aller vers les élèves issus d'autres formations. "J'encourage les étudiants venant de prépa et de DUT à se mélanger, notamment lors des TP, car leurs compétences se révèlent très complémentaires", relève Sylvie Malo, directrice des études de l'ENSICAEN.

Ne pas hésiter à poser vos questions aux enseignants. "Si l'on n'ose pas pendant un cours en amphi, il est possible d'aller voir le professeur à l'issue du cours. Ou de poser ses questions lors des TD, en plus petit comité. Il faut les solliciter si l'on n'a pas bien compris une notion", insiste la directrice des études.

Commencer à réfléchir tôt à votre projet professionnel, ou au moins à votre future majeure. "Nous encourageons les étudiants à se rendre aux forums entreprises ou aux conférences pour rencontrer des salariés et des anciens et échanger avec eux. À l'ENSICAEN, les élèves doivent choisir leurs premières spécialisations dès la deuxième année", explique Sylvie Malo.

Garder l'esprit ouvert une fois arrivé à l'école. "Même si un élève est passionné par exemple de physique et veut en faire son métier, il ne faut pas se bloquer, et au contraire garder l'esprit le plus ouvert possible. En découvrant d'autres matières, on peut toujours changer d'avis. La décision est en tout cas la leur, nous ne sommes là que pour leur donner le plus de clefs possibles", conclut Sylvie Malo.

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