Décryptage

L'école 42 : les 5 clés de la code factory

À l'école 42, 900 iMac, répartis en trois salles de travail, accueillent les élèves 24 heures sur 24.
À l'école 42, 900 iMac, répartis en trois salles de travail, accueillent les élèves 24 heures sur 24. © Denis Allard / R.E.A
Par Céline Authemayou, publié le 25 mars 2015
1 min

Depuis sa création en mars 2013, l’école 42 attire tous les regards. Accessible gratuitement et sans condition de diplôme, l'établissement dédié aux passionnés du "code" et cofondé par le patron de Free, Xavier Niel, veut aussi se démarquer par sa pédagogie et ses locaux. Décryptage de la méthode 42, entre fantasmes et réalité.

L’établissement créé par Xavier Niel forme des développeurs Web, dans un environnement qui n’a rien à envier aux géants du numérique, tels que Google ou Facebook. Après une phase de sélection sur Internet, suivie par l’épreuve tant redoutée de la “piscine”, durant laquelle les candidats passent quatre semaines passées à coder nuit et jour, comment se déroule la scolarité ? Dans les coulisses de l'école 42 au travers de ses 5 fondements distinctifs.

1. Pensée pour être un lieu de vie


Les locaux sont flambants neufs, tendance et design. Située dans le nord-ouest de Paris, l'école 42 dispose de 4.000 m2, entièrement dédiés au numérique. Sur les murs, sont exposées des œuvres de street art. Dans le hall d'entrée, les skateboards et longboards des élèves trônent fièrement aux côtés de petites alcôves de bois et de tissu, qui permettent aux jeunes de discuter tranquillement dans une ambiance feutrée.

Outre les trois immenses salles informatiques qui accueillent chacune 300 iMacs, les étudiants disposent d'un espace dédié aux jeux vidéo, d'une immense terrasse sur les toits, de douches… Tout est pensé pour faire du bâtiment un vrai de lieu de vie, cool et fonctionnel, à l'image des structures proposées par les géants du net, Google ou Facebook.

Le système débrouille fait partie de l'esprit 42 !


Durant la période de sélection tant redoutée de la “piscine”, au cours de laquelle les candidats travaillent non-stop pendant quatre semaines pour obtenir leur ticket d'entrée à 42, le bâtiment se transforme en véritable camping. Les quatre douches sont prises d'assaut - tout au long de l'année, les serviettes de toilettes sèchent d'ailleurs sur les rambardes des escaliers -, les salles de réunion deviennent des dortoirs. Le système débrouille fait partie de l'esprit 42 !

2. Du CAP au normalien, place à la diversité


Gratuite, ouverte à tous les jeunes de 18 à 30 ans, sans conditions de diplôme. C'est avec ce credo que Xavier Niel lançait en grandes pompes 42 en mars 2013. Deux ans plus tard, force est de constater que le pari est tenu. 40 % des admis n'ont pas le bac et côtoient, autour des ordinateurs, aussi bien des titulaires de CAP (certificat d'aptitude professionnelle) que des diplômés de l’ENS (École normale supérieure) ou des jeunes sans aucun bagage scolaire. 

40 % des admis n'ont pas le bac
C'est le cas d'Arnaud, 21 ans. Ce jeune Suisse a quitté le système éducatif à 16 ans pour réaliser une année sabbatique : "À l'époque, j'étais perdu et choisir des études supérieures était pour moi source de stress." Il réalise alors des petits boulots, se forme seul sur Internet et part à l'étranger pour travailler dans les nouvelles technologies. Après trois mois passés à San Francisco et sept mois en Chine, il rentre en Suisse et découvre l'existence de 42. "Le système me plaît et correspond à mon besoin d'autonomie", confie le jeune homme.

Si l'école est gratuite, il faut tout de même se loger et subvenir aux besoins quotidiens. Arnaud peut, quant à lui, compter sur le soutien de sa famille. Certains doivent trouver un petit boulot. Car le gros point noir de la formation, c'est sa non-reconnaissance officielle, avec comme conséquence directe : pas de statut étudiant et donc pas de possibilités d'obtenir une bourse du CROUS délivrée sur critères sociaux.

3. Sans cours ni profs


Une école sans enseignant, c'est possible ? C'est en tout cas le pari de 42. Pour accompagner les 1.700 élèves, l'équipe pédagogique ne compte que… 12 membres ! Pour réaliser ce tour de force, la méthode est simple: les cours n'existent pas. "On ne cherche pas à ce que l'étudiant sorte avec des connaissances, affirme Nicolas Sadirac, directeur général et cofondateur de l'établissement. Pourquoi les stocker quand tout est disponible sur le Web ? Les élèves doivent acquérir la capacité d'aller chercher l'information quand ils en ont besoin. Car dans un monde qui évolue très vite, ce qui est vrai à un jour peut être faux le lendemain".

Plus que l'acquisition de connaissances, il est donc demandé aux étudiants de faire preuve de débrouillardise pour aller fouiller le Web à la recherche des concepts et théories nécessaires pour réaliser leurs projets. Pour valider la formation, il faut réaliser un certain nombre de projets, qui ne sont pas évalués par les enseignants mais… par les élèves eux-mêmes, tirés au sort pour se pencher sur le travail de leurs camarades. "Nous rédigeons tout de même des barèmes, pour guider les étudiants dans leur évaluation", précise David Giron, responsable pédagogique.

La terrasse de l'école 42 fait partie des aménagements prisés des étudiants.

4. Boulot, boulot, boulot


Pas de profs, pas de cours, donc la belle vie ? "Avant de vivre de votre passion dans l'entreprise de vos rêves, il faudra travailler dur", prévient l'école sur son site. Si le programme a été conçu pour s'échelonner sur trois ans, la durée est en réalité beaucoup plus variable : les apprentis développeurs les plus rapides peuvent espérer terminer leur cursus en moins de deux ans, là où d'autres pourront passer plusieurs années. Les élèves l'avouent volontiers, tenir le rythme requiert une certaine motivation et une endurance à l'effort.

“Le travail est vraiment intense et la notion du temps peut vite devenir inexistante…”


"Mon but est de sortir le plus vite possible, avoue Antoine, 25 ans. Entré en novembre 2014 à 42, le jeune homme est diplômé de l'école de commerce Audencia. Après cinq années d'études dont deux de prépas, ils espèrent bien rejoindre le monde du travail le plus vite possible. C'est pourquoi il ne compte pas ses heures : "je me suis fixé des horaires assez rigoureux, explique-t-il. Le matin, j'arrive avant 10 heures et je repars rarement avant vingt heures. Je viens également les week-ends. Le travail est vraiment intense et la notion du temps peut vite devenir inexistante…"

Selon la direction, seulement 8 à 10 % des élèves ont arrêté la formation depuis la création de l'établissement. Parmi eux, une majorité aurait trouvé un emploi après la période de stage obligatoire. D'autres se sont réorientés. "On compte assez peu d'échec par incapacité", précise Nicolas Sadirac, qui prédit un avenir radieux aux 1.700 élèves.

5. La promesse d'un emploi assuré


Si Xavier Niel s'est lancé dans l'aventure 42, c'est avant tout pour permettre à des jeunes de trouver un emploi dans un secteur qui recrute fortement : le numérique. "La Commission européenne estime à 50.000 le nombre de postes disponibles chaque année dans ce secteur, en Europe", note Christian Colmant, délégué général de l'association Pasca@line, qui associe le monde de l'éducation et les entreprises autour des technologies numériques. 

“La force de l'école est de baser sa pédagogie sur la collaboration”
Des start-up aux grands groupes, nombreuses sont les sociétés qui viennent à 42, pour y organiser notamment des “hackathons” : durant deux jours (souvent le week-end), les élèves sont appelés à plancher sur des projets d'applications donnés par les entreprises. “La force de l'école est de baser sa pédagogie sur la collaboration, apprécie Guillaume Roques, directeur des relations développeurs pour la zone Europe, Moyen-Orient et Afrique chez Salesforce. Aujourd'hui, c'est un élément indispensable, qui va permettre aux sociétés de se développer et de décrocher de nouveaux marchés.”

La non-reconnaissance du diplôme par l'Etat ne semble pas poser de soucis aux recruteurs, qui affirment être prêts à embaucher les futurs diplômés. Reste tout de même à attendre quelques années, pour observer l'insertion professionnelle des quelque 900 diplômés de la première "promotion".

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