Décryptage

Leur court-métrage 3D sur le harcèlement de rue fait le buzz

Léa Parker, Victor Dulon, Gaël Lang, Pierre Herzig et Claire Bataille (de gauche à droite) ont écrit et réalisé "Hé Mademoiselle".
Léa Parker, Victor Dulon, Gaël Lang, Pierre Herzig et Claire Bataille (de gauche à droite) ont écrit et réalisé "Hé Mademoiselle". © Département photo de l'ETPA école soeur de l'ESMA Toulouse.
Par Isabelle Maradan, publié le 04 avril 2016
1 min

En moins d'une semaine, plus de 250.000 personnes ont vu "Hé mademoiselle", un film de fin d'études réalisé par cinq diplômés de l'ESMA. En cinq minutes chrono, ce court-métrage d'animation offre un condensé des formes que peut prendre le harcèlement de rue. Un sujet lourd, cuisiné à la sauce légère et sucrée de la comédie musicale.

"'Hé mademoiselle' commence comme une comédie musicale un peu gnian-gnian avec une princesse Disney et les spectateurs déchantent", résume Victor Dulon, 23 ans, l'un des cinq diplômés de l'ESMA, qui ont réalisé ce film, lors de leur formation à l'animation 3D. Avec Léa Parker, 23 ans, Claire Bataille, 24 ans, Pierre Herzig, 26 ans, et Gaël Lang, 29 ans, Victor a passé un an à donner vie aux déambulations chantantes de Zoé, exposée à un condensé d'expériences de harcèlement de rue.

Sélectionné au Carrefour de l'animation début décembre 2015, à Paris, ce court-métrage vient de recevoir le grand prix du jury au festival du court-métrage étudiant Polycule de Bruxelles. Mise en ligne, le 26 mars 2016, la vidéo de cinq minutes a déjà été vue plus de 250.000 fois.

Tous les archétypes du harcèlement de rue en 5 minutes

Après sa sortie du métro, la créature printanière à la démarche légère chante un Paris merveilleux dans les rues d'une capitale inhabituellement dépeuplée. Elle va d'abord se faire siffler, avant de recevoir les "t'es bien mignonne", "elle est trop bonne" "nous ignore pas" "fais pas la fière"...  "'Hé Mademoiselle' ne parle pas de tous les hommes, insiste Victor, mais montre tous les archétypes du harcèlement de rue en un temps très court." Sans vous spoiler la fin de ce film de cinq minutes, que nous vous laissons découvrir, nous pouvons vous assurer que vous ne serez pas déçus par la chorégraphie finale d'une héroïne soudain beaucoup moins guimauve.

 

Traitement léger pour sujet lourd

Le traitement choisi est aussi léger et festif que le sujet est lourd. Un parti pris qu'explique Léa Parker, à l'origine du thème de travail du groupe. "Le côté doux et sucré de la comédie musicale où évolue un personnage de fiction tranche avec la réalité lourde du harcèlement de rue. L'idée était de créer un contraste, pour alléger le propos et surtout pour illustrer le gap qui existe entre la façon dont est perçu ce phénomène par ceux qui le minimisent et celles qui le vivent", justifie Léa, qui a choisi le "secteur artistique" pour "véhiculer des messages et des convictions". 

"C'est pas si grave que ça, ça te fait plaisir"

Pour sa part, Victor considère avoir été "éduqué dans le respect des femmes", mais reconnaît volontiers qu'il n'avait "pas vraiment conscience de l'existence de tout ça" et surtout "pas conscience que ces mots pouvaient affecter autant quelqu'un", avant de plancher sur le sujet. Et c'est d'abord à des garçons comme lui, le "mâle lambda", comme il dit, que s'adresse ce film. "Quand la fille avec laquelle j'étais à l'époque m'a parlé des remarques quotidiennes qu'on lui lançait dans la rue, j'ai d'abord minimisé en disant quelque chose comme 'c'est pas si grave que ça et ça te fait plaisir'", avoue Victor.

Susciter une prise de conscience

Le jeune homme porte désormais un regard affuté sur des agressions jusqu'alors invisibles à ses yeux. Il déplore d'avoir à les observer quasi quotidiennement et espère que le visionnage de ces cinq petites minutes permettra à d'autres "mâles lambda" de sortir de leur cécité. "Homme en costard, petit jeune en terrasse ou gamin des cités, le harcèlement de rue n'a pas de visage, précise Léa. Il peut même être très poli".

Déconstruire les clichés et susciter une prise de conscience sont les objectifs de ce film. Les commentaires hostiles qu'il a pu générer ne font que prouver que le chemin qui reste à parcourir est encore long. "Quand on les lit, on se demande vraiment si on est en 2016", se désole Victor.

EN SAVOIR +

Stop harcèlement de rue : le site internet de ce collectif militant contre le harcèlement de rue, né en mars 2014, recense toute l'information sur la question. 

> Paye ta schnek et Harcèlement de rue agrègent les témoignages de harcèlement dans l'espace public.

> Everyday Sexism, en anglais, permet de témoigner de ses expériences quotidiennes, mineures ou majeures, du sexisme. 

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