Enquête

Exclusif. APB, "angoissant" et "injuste" pour un tiers des étudiants

Les nouveaux étudiants sont heureux d'avoir plus de libertés mais stressés par leurs nouvelles contraintes.
Les nouveaux étudiants sont heureux d'avoir plus de libertés mais stressés par leurs nouvelles contraintes. © plainpicture/Lubitz + Dorner
Par Laura Taillandier, publié le 13 septembre 2017
8 min

SONDAGE. À la veille de leur première rentrée dans l’enseignement supérieur, ce sont des étudiants stressés, peu préparés mais, malgré tout, très enthousiastes qui s’apprêtent à découvrir ce nouvel univers. S’ils ont un avis très critique sur APB, selon notre baromètre publié le 13 septembre, ils sont également divisés sur la question des prérequis à l'entrée de l'université.

APB : peut (beaucoup) mieux faire. C'est l'avis des néo-bacheliers qui se sont frottés à la plate-forme d'orientation. Pour 31 % des étudiants ayant répondu au questionnaire en ligne de l'Etudiant intitulé "Êtes-vous déjà dans la peau d'un étudiant ?", APB est avant tout "injuste".

La procédure est également jugée "angoissante" par 27 % d'entre eux mais aussi "opaque" (17 %). Un cinquième des étudiants mettent tout de même en avant son côté "pratique" (19,5 %) quand seuls 4 % trouvent le dispositif "équitable".

Un regard plus sévère en 2017

Le regard porté sur APB est encore plus sévère chez les bacheliers confrontés au logiciel en 2017 : 33,7 % le juge "injuste" et 28 % "angoissant". Une position très tranchée alors que le gouvernement a d'ores et déjà acté une réforme de la procédure pour la rentrée 2018.

Pourtant, la très grande majorité de ces nouveaux étudiants (près de 90 %) ont obtenu la formation de leur choix, via APB. Et ce dès la première phase (presque 76 %). Plus d'un tiers d'entre eux sont en plus inscrits dans une filière en tension (PACES, STAPS, éco, psycho, droit...). Donc potentiellement sujette aux aléas du tirage au sort...

Les étudiants partagés sur les prérequis

Comment alors améliorer l'entrée dans l'enseignement supérieur ? Alors que l'instauration de prérequis en licence est en débat, plus de 45 % des étudiants interrogés approuvent cette idée de sélection. C'est en effet pour eux, un bon moyen de "laisser la chance à ceux qui en ont les capacités" et "sont vraiment intéressés". "Je trouve injuste que des personnes qui n'ont pas les bases requises pour une filière soient prises au dépend de ceux qui s'y sont préparés pendant tout leur lycée", souligne une bachelière scientifique, qui entre à l'université en Île-de-France.

"Beaucoup trop de gens s'inscrivent à l'université sans être assidus le reste de l'année, ces prérequis sont une preuve de motivation et cela évitera des doublements ou redoublements d'année", relève pour sa part un étudiant de prépa, en Occitanie. "Étant donné que nous sommes trop nombreux à vouloir aller à l'université, il me semble normal qu'un examen d'entrée ou des prérequis soient instaurés dans toute les universités françaises à différents échelons (L1, L3, M1, M2)", fait valoir un autre élève qui démarre un BTS à la rentrée en Auvergne-Rhône-Alpes.

"Avec des prérequis, je n'aurais pas été pris"

D'autres sont plus hésitants. "Si un élève travaille et a d'excellents résultats, il ne devrait pas être sanctionné par un manque de places", "mais il ne faudrait pas laisser sur la touche les élèves qui ont une moindre moyenne (...). Peut-être faudrait-il instaurer partout un test d'entrée, choisir les meilleurs et ensuite faire comme on peut...", suggère une étudiante à l'université en Guadeloupe. Une partie non négligeable des étudiants avoue d'ailleurs ne pas avoir d'avis sur la question des prérequis (36 %). Cette proportion monte à 41 % parmi les nouveaux bacheliers.

des étudiants n'a pas d'avis sur la question des prérequis.

Des chiffres plus nuancés que les résultats de notre baromètre publié l'an passé où plus de 57 % des sondés se prononçaient pour la sélection à l'université. "Ce n'est pas parce qu'un élève n'est pas excellent dans sa filière d'attribution, comme L ou ES, qu'il ne sera pas bon à l'université. Tout change du lycée à l'étape supérieure, et les niveaux peuvent également changer, évoluer", note ainsi une étudiante à l'université en Nouvelle-Aquitaine.

Même avis pour cet étudiant universitaire en Centre-Val-de-Loire, titulaire du baccalauréat en 2015 : "Certaines personnes vont très bien réussir à l'université alors qu'elles éprouvaient des difficultés au lycée, et inversement certains très bons élèves seront perdus à la fac car ils seront moins encadrés, donc ils iront en prépa ou en BTS." "Si il y avait eu des prérequis, je n'aurais jamais été pris en psychologie", observe un bachelier technologique, en région Pays-de-la-Loire.

Des étudiants stressés mais enthousiastes

Cet étudiant a hâte de démarrer son année de psychologie comme beaucoup des nouveaux bacheliers. En effet, plus du tiers se disent "enthousiastes" (37 %) à la veille de la rentrée. Ce qui n'empêche pas la majorité d'être aussi "stressés" (42 %) à l'idée de découvrir l'enseignement supérieur.

Si seulement la moitié d'entre eux a le sentiment d'être déjà dans la peau d'un étudiant (51 %), ils sont plus nombreux à se sentir à la hauteur des exigences de leur filière. 60 % pensent en effet réussir avec brio leur première année. Un chiffre qui cache de fortes disparités selon la filière : 50 % en BTS, 55 % à l'université, 65 % en prépa, 75 % en école d'art...

des étudiants pensent réussir leur première année

Insuffisamment préparés ?

Pour les nouveaux étudiants, l'entrée dans le supérieur représente de grands changements par rapport au lycée comme "le rythme des cours, les emplois du temps, l'autonomie, la responsabilisation...", énumère une étudiante en BTS, en Île-de-France, issue d'un bac pro. "Malheureusement trop de différences mal préparées et mal expliquées", regrette une étudiante à l'université dans le Grand-Est. La moitié des étudiants (47,83 %) s'estiment en effet insuffisamment préparés et informés sur l'enseignement supérieur. Ils sont encore plus nombreux (54 %) à ne pas sentir prêts parmi ceux qui débutent un parcours universitaire. Pourtant, la plupart (65 %) ont déjà visité leur nouvel établissement et celui-ci a même organisé un temps d’accueil pour ces étudiants dans 64 % des cas voire 70 % à l'université.

C'est ce que signifie devenir étudiant pour 82 % des sondés

Devenir étudiant signifie avant tout avoir "plus de responsabilités" pour 82 % des sondés. Des contraintes qui s'accompagnent d'un sentiment de liberté (43 %) mais beaucoup moins de fun (14 %). "Nous allons devoir être plus autonomes car nous ne sommes plus autant encadrés et puis nous devons être plus responsables. L'ambiance pourrait être plus studieuse", résume une étudiante en prépa en Île-de-France. "Je vais pouvoir me gérer moi-même sans que l'on m'infantilise. On me fait confiance, j'ai cette fois vraiment le pouvoir sur ma scolarité. Les emplois du temps sont moins étouffants", juge une étudiante à l'université en Normandie.

"Je vais devoir gérer mon budget, donc mon compte en banque, les transports. Être sérieuse dans mes études tout en étant loin de ma famille", témoigne une étudiante, en Provence-Alpes-Côte d'Azur, titulaire d'un bac S. Pour certains, le changement avec le lycée se résume encore plus simplement : "Faire enfin ce que j'aime."

Méthodologie

Ce sondage a été mené en ligne du 23 août au 4 septembre 2017 auprès des lecteurs de l'Etudiant.
1.736 étudiants y ont répondu dont une majorité de diplômés du baccalauréat en 2017 (51 %) et 2016 (21 %). Parmi les répondants, figurent une grande partie de filles (76 %) et de bacheliers S (43 %) et ES (23,5 %). Ces étudiants sont inscrits pour l'essentiel à l'université (55 %), en prépa (10 %), en BTS (6 %), DUT (6 %) et domiciliés en Île-de-France (27 %) et Auvergne-Rhône-Alpes.

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