ChatGPT ? "Un gain de temps énorme" pour les lycéens et étudiants qui utilisent l'IA dans le cadre de leurs études

DOSSIER. L'intelligence artificielle est un outil puissant pour les lycéens et les étudiants : résumés de cours, corrections d'exercices, mises en forme de rapport… Largement répandue, l'utilisation des IA comme ChatGPT reste pourtant peu encadrée par les établissements.
Comment les lycéens et les étudiants utilisent-ils l'intelligence artificielle aujourd'hui ? D'après une étude du Digital Education Council publiée en août 2024, 86% des étudiants de 16 pays dont la France utilisent l'IA dans le cadre de leurs études, dont plus de la moitié au moins une fois par semaine.
Alors que Paris accueille ces 10 et 11 février le Sommet mondial pour l'action sur l'IA, l'Etudiant a rencontré des étudiants et lycéens pour comprendre comment ces derniers utilisent ChatGPT et ses avatars ainsi que les avantages, les inconvénients et les limites de l'outil.
ChatGPT, plus fort que Google ?
Mathilde, étudiante en médecine à l’université de Caen (14), utilise l'IA quasiment tous les jours. "Elle me sert beaucoup pour corriger l’orthographe et la syntaxe dans les devoirs, y compris dans mon mémoire", explique la jeune femme de 28 ans. Pour elle, l'IA est un correcteur "rapide, fiable, et toujours disponible".
L'étudiante s'en sert aussi pour réviser. "Par exemple, je lui demande de faire des QCM sur les liaisons ligamentaires du genou. Ou je lui demande de me réexpliquer un point de cours particulier, et je finis par comprendre", illustre-t-elle.
Dans son quotidien, ChatGPT a remplacé Google. Qu'il s'agisse de trouver une recette de cuisine ou de savoir quelle huile de moteur mettre dans sa voiture, c'est à l'IA qu'elle s'adresse. "Sur Google, ça prend un temps fou. Chat GPT donne la réponse instantanément, ça évite de passer par plein de sites."
Pour Charlotte, en deuxième année de licence économie à l'université de Caen, l'IA représente aussi "un gain de temps énorme". "Par exemple, les bibliographies des rendus universitaires ont des normes très précises. Je donne le livre que j'ai lu et la page où j’ai trouvé la citation et l’auteur, et ChatGPT me fait la biblio aux normes." Une tâche qui lui prenait 15 à 20 minutes, et désormais réalisée en moins de deux minutes.
Comme Mathilde, elle l'utilise aussi pour se faire réexpliquer quelques points, en l'occurrence les consignes de certains exercices.
L'IA peut corriger des exercices et faire des erreurs
Les lycéens se saisissent aussi de cet outil. Melvin, en classe de 2de au lycée Jacques Prévert de Savenay (44), s'en sert environ trois fois par semaine pour ses devoirs. Soit pour expliquer un terme qu'il ne comprend pas, soit pour lui demander la réponse d'un exercice.
"On peut aussi prendre des photos de l’exercice et lui demander les réponses", indique Melvin. L'utilisation de l'IA est pour lui ambivalente : "Ça nous aide à comprendre, mais l’inconvénient, c'est que ça peut donner moins envie d’apprendre."
Angela, en terminale STMG dans le même lycée, se sert de l'IA deux à trois fois par mois, lorsqu'elle a des devoirs importants. Son utilisation très épisodique de ChatGPT consiste à lui demander des réponses à des devoirs afin de comparer avec son propre travail. "Je ne modifie pas, je veux seulement vérifier", assure la lycéenne.
L'IA peut selon elle devenir un outil de travail dans le futur. Mais pour l'instant, "ce n'est pas une source sûre". "Je passe le bac à la fin de l’année. Les profs ne veulent pas qu’on utilise l’IA pour travailler à notre place, car ce n’est pas comme ça qu’on aura le bac", ajoute-t-elle.
L'intelligence artificielle peut en effet être source d'erreurs. Charlotte a par exemple arrêté de lui demander de résumer un cours ou de tirer les infos essentielles d’un livre. "Il y avait des erreurs. Parfois, il me citait des informations qui n'y figuraient même pas", raconte l'étudiante. Les sources utilisées par l'intelligence artificielle ne sont par ailleurs pas toujours mentionnées, ni fiables. "Il lui est arrivé d'utiliser un tweet, ça ne convient pas à de la recherche universitaire", souligne-t-elle.
Manque de consignes des enseignants
À l'heure actuelle, les professeurs et les enseignants ne forment pas leurs élèves à l'utilisation de Chat GPT. "Mes profs disent qu’il ne faut pas tout le temps s’y fier. Je suis d'accord, mais ils ne nous expliquent pas comment savoir si c'est fiable", pointe Melvin. Selon lui, l'utilisation de l'IA est autorisée, mais déconseillée.
Le professeur de philosophie d'Angela a quant à lui précisé qu'il utilisait un outil pour vérifier que les élèves n'utilisent pas l'IA dans leurs devoirs. Une technique également évoquée par les enseignants à l'université. Pour autant, la limite entre ce qui est autorisé ou non reste floue. Mathilde s'étonne par exemple que les consignes quant à la rédaction de son mémoire de plusieurs pages ne mentionnent pas l'intelligence artificielle.
Selon elle, "les enseignants ne réalisent peut-être pas à quel point l'utilisation de l'IA est répandue dans la société. Ils sont à 10.000 lieux de savoir utiliser ChatGPT. Ma sœur a passé le bac l’année dernière et elle m’a dit la même chose : nous avons un cran d’avance sur certains profs", souligne-t-elle.
Chaque lycéen et étudiant a donc sa propre vision de ce qu'il est acceptable de faire. "La limite que je me fixe, c’est que je refuse que l’IA fasse le travail à ma place. Et de toute façon, ça se voit à sa façon d'écrire", affirme Mathilde. Une règle que chacun est libre de se fixer ou non : certains de ses camarades de promotion ont déjà rédigé l'entièreté de leur mémoire avec ChatGPT.
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