Interview

François Fillon : "Les droits d'inscription en licence doivent augmenter raisonnablement"

François Fillon est favorable à une réforme du bac et à l'augmentation des frais de scolarité en master.
François Fillon est favorable à une réforme du bac et à l'augmentation des frais de scolarité en master. © LIONEL BONAVENTURE/POOL-REA
Par La rédaction de l'Etudiant, publié le 19 avril 2017
1 min

40 % de contrôle continu au bac, l'indication de prérequis à l'université, le retour des classes européennes au collège, des frais de scolarité libres en master... Dans un entretien réalisé par écrit pour l’Etudiant, le candidat des Républicains développe les idées qu'il voudrait mettre en place. Cet échange s'inscrit dans une série d'interviews, tous les candidats à l’élection présidentielle ayant été sollicités par notre rédaction.

Vous dites vouloir supprimer le tirage au sort pour les licences en tension. Êtes-vous donc favorable à une sélection à l'entrée à l'université ?

Je récuse le terme de sélection que vous ne trouverez pas dans mon programme. Le défi de la massification (plus de 300.000 nouveaux étudiants dans les 10 ans qui viennent) nous oblige à envisager les choses sérieusement. Et il y a urgence ! D'une part, lorsque l'on sait que les filières universitaires classiques sont marquées par un terrible taux d'échec des bacheliers en première année : 58,5 % ! D'autre part, lorsque l'on constate que, parallèlement, les filières sélectives (classes préparatoires, grands établissements, IUT, BTS, formations de santé...) sont privilégiées par les étudiants et leurs familles puisque celles-ci attirent aujourd'hui la moitié des bacheliers généraux.

Dans les filières dites en tension, il n'est pas normal de recevoir des élèves tirés au sort.

Je reste fondamentalement attaché à la liberté d'accès à l'université. L'État a le devoir de garantir l'accès des bacheliers à l'enseignement supérieur. Mais il a aussi le devoir de permettre aux élèves de faire des choix éclairés pour leur avenir d'étudiant. Les universités doivent pouvoir indiquer aux lycéens quels prérequis elles souhaitent pour les différentes filières qu'elles offrent. Dans les filières dites en tension, il n'est pas normal de recevoir des élèves tirés au sort. Il me semble plus juste de retenir ceux qui se sont préparés dès le lycée à la voie d'enseignement supérieur pour laquelle ils postulent, qui s'y sont particulièrement bien investis et qui ont l'envie et le talent nécessaires pour réussir.

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Pouvez-vous détailler votre réforme du bac ? Ira-t-elle de pair avec une réforme globale du lycée ?

Le ministre de l'Éducation nationale fera une véritable réforme du baccalauréat, avec la volonté d'en restaurer toute la signification de premier grade universitaire. Il s'agit de repenser l'organisation de nos baccalauréats général et technologique, pas seulement pour les simplifier mais aussi pour en revaloriser le contenu. Si le baccalauréat continue à être délivré avec 11 ou 12 épreuves sans exigences fortes, il deviendra un parchemin sans valeur.

Le baccalauréat, premier grade universitaire, doit permettre à tous un accès réussi à l'université. Toutes les disciplines seront prises en compte, notamment par le contrôle continu. Mais le bac comprendra quatre épreuves – une en français en première, trois choisies par le lycéen dans sa série en terminale – plus solides par leur niveau et comptant pour 60 % des résultats. L'organisation des enseignements du lycée devra être revue pour bien préparer les élèves au nouveau baccalauréat.

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Reviendrez-vous sur la réforme du collège ?

Oui. Pourquoi tant d'acharnement contre ces parcours d'excellence qui répondent à de vraies attentes des parents, mais aussi de notre société aujourd'hui ouverte sur le monde ? Un exemple : la suppression des classes européennes ! C'est ce qui a pu nourrir des départs massifs vers l'enseignement privé sous contrat... Par un aveuglement égalitariste d'un autre temps, la ministre a entraîné l'enseignement public dans une spirale descendante...

Des améliorations doivent être apportées à APB.

La plateforme d'inscription APB vous semble-t-elle aujourd'hui satisfaisante ?

APB est désormais un outil que les élèves, comme leur famille, connaissent. Des améliorations doivent y être apportées. Par exemple, pour y préciser des informations complémentaires telles que les taux de réussite, les taux d'insertion. Très rapidement, ces données seront collectées et mises à disposition des élèves et de leurs parents afin que l'élève fasse ses choix sur APB en toute connaissance de cause. Il saura aussi quelles matières l'université recommande dans son parcours au lycée pour intégrer une première année en STAPS (sciences et techniques des activités physiques et sportives) ou en droit. APB doit mieux symboliser la continuité des parcours entre le lycée et l'enseignement supérieur. Nous devrions alors pouvoir permettre aux jeunes d'aller plus facilement vers la voie du succès et de l'emploi.

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Vous êtes le seul candidat à souhaiter une augmentation des frais de scolarité à l'université. Pourquoi ?

Les frais de scolarité sont un tabou français. Comme le demandent la plupart des universités, les droits d'inscription en licence doivent rester fixés au niveau national et augmentés raisonnablement avec une dispense pour les étudiants boursiers.

Pour les autres niveaux, les conseils d'administration des universités doivent avoir la liberté de fixer les frais de scolarité applicables aux étudiants préparant les diplômes nationaux de master et de doctorat. Ils pourront, par exemple, fixer ces frais en fonction de critères tirés des disciplines mais surtout des débouchés professionnels offerts aux diplômés.
La CPU (Conférence des présidents d'université) sera appelée, dans un souci de bonne harmonisation sur le territoire national, à formuler des propositions de plafond par catégories de master ou de doctorat. À la faveur des demandes d'accréditation présentées par les universités – procédure d'accréditation qu'il faudra d'ailleurs alléger – l'État s'assurera du respect de ce plafond. Les étudiants boursiers resteront exonérés de participation aux frais de scolarité en master.

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Le système actuel des bourses est perfectible. En premier lieu, il importe de maintenir les bourses au mérite dont le gouvernement actuel, après avoir voulu la suppression, a réduit le montant. Mais ces dispositifs – par simple effet de seuil – sont insuffisants. Il faudra, en second lieu, donner plus de liberté aux établissements pour inventer les moyens d'aider financièrement leurs étudiants qui en ont besoin. Au-delà, une réorganisation de fond doit être mise en chantier en liaison avec le CNOUS (Centre national des œuvres universitaires et scolaires), notamment pour le logement et la santé des étudiants.

Faut-il selon vous réformer la Sécurité sociale étudiante ?

Il y a eu des réflexions parlementaires à ce sujet. La discussion doit se poursuivre avec les organisations étudiantes et leurs mutuelles. L'État a la responsabilité de veiller à la santé de toute la population, et donc des étudiants.

Les régions auront la responsabilité de préparer des jeunes au baccalauréat professionnel.

Vous proposez de "revaloriser et développer les formations professionnalisantes" ainsi que l'alternance. Comment comptez-vous faire ?

La totalité de l'enseignement professionnel du second degré (lycées professionnels, apprentissage) sera confié aux régions et aux branches car elles connaissent les besoins d'emplois sur leur territoire. Les régions auront donc notamment la responsabilité de préparer des jeunes au baccalauréat professionnel, qui doit rester un diplôme national d'insertion directe dans la vie professionnelle. Si les régions estiment alors, en liaison avec les branches professionnelles, que certains profils de bacheliers professionnels présentent un intérêt particulier pour réussir en section de technicien supérieur, elles pourront proposer les adaptations nécessaires de la carte des BTS.

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