Portrait

Ma vie d’étudiante en Iran : Maguelone lève le voile sur Téhéran

Maguelone a choisi l'Iran pour découvrir une société et une culture originales.
Maguelone a choisi l'Iran pour découvrir une société et une culture originales. © Photo fournie par le témoin
Par Sara Saidi, publié le 09 février 2017
1 min

À 21 ans, pour sa troisième année d’études à Sciences po Lyon, Maguelone a choisi une destination hors du commun : Téhéran. La capitale iranienne, mégalopole de plus de 8 millions d’habitants, n’est pas facile à apprivoiser mais rend l’expérience unique.

Quand elle a dû décider d'une destination pour son année à l'étranger lors de sa troisième année de Sciences po, Maguelone, spécialisée dans le monde arabe à Sciences po Lyon, hésitait d'abord entre le Liban et l'Égypte. "Ce sont mes parents qui m'ont poussée à choisir l'Iran. Dans ma famille on a toujours eu une image favorable de ce pays. Et puis l'Iran est le pays le plus sûr de la région." Partie pour une année scolaire, la jeune étudiante, ne regrette pas son choix : "Ici les gens sont complètement différents, courtois.(...) On se sent en sécurité".

Mais Téhéran, son trafic, sa pollution et ses plus de 8 millions d'habitants, ne sont pas faciles à apprivoiser. "Je suis arrivée pendant la période d'Achoura (fête religieuse chiite qui célèbre le martyr de l'Imam Hussein), il y avait de grands drapeaux noirs, c'était sombre. J'avais rendez-vous directement à l'université. Pour y arriver on a changé plein de fois de transports, je me suis demandée comment j'allais faire pour me déplacer, me repérer", se souvient-elle.

15 heures de cours de farsi par semaine

En arrivant à la faculté des études du monde de l'université de Téhéran, rien ne se passe vraiment comme prévu. Il faut dire que Maguelone et ses trois autres camarades français, sont les premiers à tester le partenariat mis en place par l'université de Téhéran et Sciences po Lyon, et se heurtent donc à quelques problèmes administratifs.

Contrairement aux autres étudiants étrangers, les étudiants de Sciences po sont dispensés de payer les frais de scolarité mais n'ont accès qu'à deux cours au choix. Ils ont tous choisi l'anthropologie et l'histoire de l'économie. Ce à quoi s'ajoute une séance hebdomadaire de discussion avec leur professeur référent francophone et des intervenants, ainsi que 15 heures de farsi que Maguelone a payé 700 €. "Les cours de farsi sont très bien, on progresse vite, les cours d'histoire de l'économie aussi, mais l'anthropologie est un peu dénaturée de son côté scientifique, le niveau n'est pas très élevé en général." Pour valider leur année, les étudiants français doivent rendre des dossiers à Sciences po. La jeune fille assure que le responsable du partenariat à l'IEP les a bien épaulé. "On a des échanges réguliers par mails, des rendez-vous Skype."

10 jours dans un dortoir pour filles

Trouver un logement aussi s'est révélé être un véritable parcours du combattant. Contrairement à ce que les étudiants pensaient, aucun logement n'était prévu pour eux sur place. En arrivant, Maguelone a vécu chez une amie de l'ami de ses parents : "Je me suis fait chouchouter, ça a été une bonne transition." L'université lui a proposé un dortoir au sous-sol de la faculté avec 15 lits superposés dans 30 m2 : "Je n'ai pas pu !", s'exclame-t-elle. La jeune étudiante est ensuite allée dans un dortoir pour filles du centre-ville à 100 € par mois. Elle partageait sa chambre avec cinq Iraniennes. Elle y est restée 10 jours.

Finalement, les étudiants français ont parlé de leur difficulté à trouver un logement autour d'eux et une connaissance a fini par leur proposer un logement personnel : "C'était le lendemain de mon anniversaire, c'était le plus beau cadeau qu'on m'ait fait !" se rappelle la jeune étudiante. Les quatre Lyonnais, partagent donc 100m2 pour environ 325 € chacun. Ils ont un grand séjour, une terrasse, et Maguelone a même sa propre chambre.

1 heure 30 de transport jusqu'à l'université

Leur appartement est situé à Niavaran, dans un quartier huppé du nord de Téhéran. Alors, pour se rendre en cours à Amir Abad, dans le sud de la ville, ils suivent un trajet d'une heure et demie dans les transports en commun : "Nous prenons d'abord un bus, puis le métro, puis à nouveau un bus qui nous emmène à l'université de Téhéran. Là, une navette gratuite nous emmène à Amir Abad, à la faculté des études du monde, énumère la jeune fille. Parfois, on se paie le luxe d'y aller en taxi", avoue-t-elle.

Lire aussi : Enseignement supérieur : la France veut rayonner en Iran

Pour ses dépenses, la jeune étudiante a reçu une bourse de 2.000 € de la Région Rhône-Alpes, et reçoit chaque mois 700 € de ses parents. Avec 50 à 75 € par mois, le transport fait partie des grosses dépenses : "Un trajet en soi ça ne coûte vraiment rien, mais comme on fait toujours de grands trajets, ça représente pas mal finalement". À cela s'ajoute 150 à 200 € par mois pour l'alimentation y compris à l'extérieur : "Pour les courses on divise tout. Et on a nos adresses maintenant, des endroits où on peut manger un plat complet pour 2,50 €", indique Maguelone.

Une expérience loin des clichés

Catapultée dans la capitale iranienne depuis quatre mois, Maguelone découvre la mégalopole, apprécie ses parcs et ses cafés : "Il y a un côté très vintage à Téhéran, comme la libraire qui vend des livres français du début des années 70-80, c'est la caverne d'Ali Baba ! À certains endroits le temps s'est arrêté au moment de la Révolution, on voit par exemple des devantures de cinémas restées telles quelles". Maguelone et ses amis, passent souvent leur week-end dans les montagnes, loin de la pollution. "On nous a parlé d'un parc d'attraction dans les montagnes que je n'ai pas encore fait !", s'enthousiasme-t-elle. Fait non négligeable, "on peut voyager pour pas cher", prévient Maguelone.

Un projet professionnel recentré sur l'Iran

"Pour des étudiants en sciences politiques, l'Iran est particulièrement intéressant, c'est un pays avec un système politique exceptionnel et qui a vécu en quasi autarcie", raconte Maguelone. Elle est très contente de ce voyage : "C'est ouf comme expérience, c'est enrichissant, on vit dans un pays qui n'a rien à voir avec le nôtre, on est plongé dans un autre monde, on rencontre des gens qu'on n'aurait pas rencontrés si on était resté en France". Enfin, elle affirme que cela permet de mieux se connaître également : "On vit dans un environnement pas simple, ça permet de tester notre résistance de temps en temps", affirme-t-elle.

Professionnellement, ce séjour l'a poussée à recentrer son domaine de recherche. "Il portait surtout sur le monde arabe, mais maintenant le Caucase m'intéresse aussi." Elle souhaite continuer les cours de farsi à son retour en France, en partenariat avec l'ENS Lyon. "Le monde arabe est galvaudé, beaucoup parlent l'arabe, il y a plus de compétition", réfléchit-elle. Professionnellement la jeune étudiante veut se diriger vers les relations internationales, en espérant pouvoir retourner en Iran, au moins pour entretenir son farsi. Elle conseille vivement à ceux qui envisagent de venir en Iran d'apprendre un tout petit peu de farsi. "Peu de gens parlent anglais, c'est bien d'avoir quelques notions de persan, et, ajoute-t-elle, essayer de trouver des contacts sur place à l'avance, un ami d'ami de la famille, un numéro en cas d'urgence, parce que les gens en France ont beau nous soutenir ils ne sont pas sur place, et puis les Iraniens sont toujours prêts à aider."

AVANT DE PARTIR...

Pour les visas
Si vous partez dans le cadre d'un partenariat avec votre établissement, l'université se charge de faire le visa. Il vous faudra juste aller le récupérer à l'ambassade d'Iran à Paris. Comptez 45 à 50 €. Attention ce visa est de 30 jours, à renouveler tout de suite pour avoir un permis de résidence. Ne dépassez pas ces 30 jours, sinon vous devrez payer une amende à hauteur de 7,50 € environ la journée de retard. Et ce n'est pas un visa à entrées multiples, il vous faudra donc faire une demande de sortie de territoire à chaque fois que l'envie vous prend de voyager ou de retourner voir votre famille.

L'assurance
Il n'y a pas encore d'assurance étudiante pour l'Iran mais ça pourrait changer avec le nombre croissant de partenariats suite à l'accord sur le nucléaire de 2015. Prenez cependant une assistance rapatriement.

SUR PLACE...

Le logement
Se loger en Iran est un véritable casse-tête. Il faut compter minimum entre 1.500 et 2.000 € de caution à payer comptant pour un studio de 30 m2. Ce à quoi s'ajoute le loyer qui dépend du quartier et de la caution. Plus la caution est élevée plus le loyer est bas. Comptez entre 200 et 300 € par mois de loyer si vous ne pouvez pas payer une forte caution.
Le prix des dortoirs peut aller d'une centaine d'euros le lit en chambre partagée, à 350 € dans une chambre individuelle. Cuisine et salle de bain partagées et... attention, couvre-feu vers 10 h 30.

Les transports
En Iran, les transports en commun ne sont pas chers. Une carte rechargeable s'achète au métro pour 1 ou 2 €. Elle comprend une dizaine de trajets environ (cela dépend de la distance). Les taxis sont chers quand ils sont pris seul, comptez 2 ou 3 € pour un trajet, contre 50 centimes si ce sont des taxis collectifs. Il existe également des "Ubers" (Snapp, Tap30) qui diminuent largement le prix du trajet.

Pour les devises
Les banques iraniennes ne sont pas encore reliées aux banques européennes, malgré les avancées dans ce domaine suite aux accords sur le nucléaire. Il faut donc penser à rapporter du liquide avec soi. Les bureaux de change n'opèrent que sur de grosses sommes et prennent une commission. Le meilleur moyen de ramener de l'argent c'est de se mettre d'accord avec un Iranien qui réside en France et qui possède un compte ou de la famille en Iran.
La monnaie iranienne est le rial iranien, mais les Iraniens parlent en tomans. 1.000 tomans iraniens équivalent à 10.000 rials.

Les communications
Les communications ne sont pas chères en Iran. Vous pouvez acheter une carte sim rechargeable pour 16.000 tomans soit 4 € sur présentation de votre passeport. Les recharges dépendent de vos communications et de votre utilisation d'Internet. Un mois d'Internet sur votre téléphone revient à environ 2 €. Mais attention, si vous consommez comme en France, le prix doublera rapidement. Pensez à installer un VPN avant de venir en Iran (pour pouvoir accéder aux sites censurés, comme Facebook, Twitter...). Il existe des VPN gratuits.

Les bourses
Pensez à vous renseigner auprès de votre Région pour les aides régionales.

Bons plans
Apprendre un minimum le farsi avant votre départ peut vous faciliter beaucoup de choses.
Pour les filles achetez des habits longs (qui couvrent les fesses) avant de partir. En septembre il fait chaud et l'hiver est rude à Téhéran.

Le site divar.ir est l'équivalent du boncoin chez nous, on y trouve de tout (logements, ustensiles, meubles...).

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