Bancs d’essai

Le réseau social Quora, la foire aux "pourquoi"

200 millions d'utilisateurs seraient actifs chaque mois sur Quora.
200 millions d'utilisateurs seraient actifs chaque mois sur Quora. © CC0 Public Domain
Par Paul Conge, publié le 05 juillet 2017
1 min

Sur le réseau social Quora, créé il y a neuf ans aux États-Unis, on pose les questions les plus loufoques et les plus sérieuses du monde. Les étudiants y échangent à foison. En avril, Quora lançait sa version française. Enfin !

Ce réseau social, beaucoup l'imaginaient détrônant Facebook. Il ne l'a pas fait, mais le site de questions-réponses Quora s'est imposé comme une sorte de pendant intello de Twitter, de Wikipédia sans l'anonymat, de Facebook sans les trolls, en séduisant toujours plus de membres. Selon son fondateur, il avoisine aujourd'hui les 200 millions d'utilisateurs mensuels. Aux États-Unis, où il a émergé en 2009, il fait fureur. En France, avant même son lancement officiel en avril 2017, certains le qualifiaient déjà, assez sobrement, de "meilleur site du monde".

Des questions-réponses sérieuses et farfelues

Ce qui fonde l'originalité de Quora, c'est le défi originel qu'il s'est lancé : répondre à toutes les questions, absolument toutes, que peut se poser un être humain. Sur cette agora du Web, encyclopédie en ligne aussi gigantesque que tentaculaire, les internautes déposent n'importe quelle question, de la plus complexe à la plus farfelue. Que se passerait-il sur Terre si tout le monde était milliardaire ? Quelle est la meilleure façon de réagir quand on vous crie dessus ? Si l'univers s'étend, dans quoi est-ce qu'il s'étend ? Et surtout, combien coûte une panthère noire ?

À la suite de ces questions, des experts de tout poil, souvent diplômés dans le domaine dans lequel ils interviennent (doctorats en sciences physiques, diplôme de docteur en médecine...) se passent le relai pour tenter d'apporter la réponse la plus précise possible à ces questions existentielles, capillotractées ou hyperspécialisées, souvent avec un sérieux déconcertant.

Pourquoi "les électrons ne s'écrasent-ils pas sur le noyau" ?

Ce qui frappe à la lecture des nombreux "sujets" discutés sur Quora (animaux, maladies psychologiques, radicalismes en politique, etc) c'est que les étudiants forment un segment très actif des collaborateurs, tout comme la communauté des enseignants. Ils l'utilisent comme une énorme foire aux questions (FAQ), celles qu'ils n'osent jamais poser à leurs professeurs, celles qu'ils oublient d'aborder, celles qu'ils ne formulent jamais.

Ici, des étudiants en droit de l'université de Rouen s'interrogent sur la notion de culpabilité en justice en citant Euclide. Là, un normalien lyonnais disserte sur l'écriture des formules logarithmiques, un fil de niveau bac+1... Sur cet autre post, un étudiant en prépa HEC explique la vision quantique de la structure des atomes à un second qui veut enrichir ses cours de sciences physiques en se demandant pourquoi "les électrons ne s'écrasent-ils pas sur le noyau"Des questions toujours au carrefour de ce qui leur est enseigné en cours et de ce qui les taraude dans leurs réflexions plus personnelles ou dans leur vie quotidienne.

Des vécus "qu'on ne retrouve pas ailleurs"

Rien d'anormal à ce que les étudiants y soient si nombreux, juge Sihem Fekih, chargée des relations internationales à Quora. "Une de nos missions est d'être une plate-forme de connaissance. Dans sa scolarité, un étudiant passe énormément de temps à faire des recherches sur Internet pour se construire son opinion, trouver des informations. Quora est arrivée pour permettre l'accès à ce type d'informations d'une manière beaucoup plus directe et personnalisée, grâce à des retours d'expériences, et des formes de vécus qu'on ne retrouve pas ailleurs."


"Comment étudient les élèves excellents ?", demande par exemple un étudiant curieux, qu'une requête Google n'a pas contenté. "Il leur suffit d'écouter en cours", répond simplement un enseignant en économie, à qui se greffe une étudiante qui témoigne de son passé douloureux de "bête à concours".


Mieux, Quora se mue même en service d'assistance où les étudiants glanent de bons tuyaux et résolvent leurs casses-têtes. "Je suis lycéen, où est-ce que je peux travailler dans l'urgence pour survivre ?", demande un jeune de 19 ans, à qui il est suggéré de candidater pour des jobs d'été. Un juriste en devenir se triture les méninges : "Comment devenir avocat après un bac S ?"

Demandes de soutien ou partages de soucis, tous comptent, en retour, sur les réponses documentées de la vaste communauté d'enseignants-chercheurs et de spécialistes, sur laquelle repose le fonctionnement tout entier du site. "La qualité des auteurs est un des axes qui nous assure un certain niveau de crédibilité, affirme Sihem Fekih. On remplit un profil, on indique ses qualifications : chercheur au CNRS, assureur, artiste... Chacun a tout intérêt à avoir un profil réel, avec lequel il peut gagner en visibilité." Vote positif, vote négatif : le système d'évaluation attaché à chaque publication aurait en outre pour effet d'évacuer les réponses erronées.

Plus que de renseigner sur tout et n'importe quoi, Quora met en relation des personnes qui n'auraient jamais eu la chance de se croiser. À l'instar de ce "quoriste" qui a monté sa start-up, en trouvant sur la plate-forme des investisseurs pour la financer.

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