4e année d'internat en médecine générale : les internes appellent à la grève pour demander le report de la réforme

Alors que la réforme de la 4e année d'internat en médecine générale n'est pas encore finalisée, l'Isnar-IMG et l'Isni appellent à la grève, le mercredi 29 janvier. Les internes en médecine générale demandent le report d'une réforme qu'ils estiment "inaboutie" et "précipitée".
Leur appel est tombé le même jour que l'annonce du gouvernement de François Bayrou et la nomination d'un 6e ministre de la santé en deux ans, le 23 décembre. L'Isnar-IMG appelle les internes de médecine générale à la grève, le mercredi 29 janvier.
En cause ? La réforme de l'internat de médecine générale, qui instaure une 4e année d'études. Actée fin 2022, à l'occasion de la LFSS (loi de finance de la sécurité sociale) 2023, les premiers étudiants concernés entreront en 4e année à la rentrée 2026.
L'un des objectifs est de proposer une année de consolidation, avec un statut de docteur junior, en vue d'une insertion professionnelle renforcée. Une année supplémentaire qui doit aussi améliorer l'accès aux soins puisque les internes seront incités à réaliser leurs stages en zone sous-denses.
Depuis son officialisation début 2023, les internes de médecine générale sont opposés à cette réforme "imposée avec violence" et de nouvelles raisons ont mis le feu aux poudres, fin 2024.
Une mise en œuvre complexifiée par les retards
"Deux ans [après l'officialisation de la 4e année], rien n'a été fait pour corriger les défauts d'une réforme bâclée. Les textes réglementaires manquent toujours, les terrains de stage ne sont pas prêts, les conditions d'accueil et de rémunération des docteurs juniors ambulatoires restent floues et inacceptables", écrit l'Isnar-IMG le 23 décembre.
Si l'arrêté d'août 2023 a bien instauré la nouvelle maquette, "depuis, il ne s'est plus rien passé", explique Bastien Bailleur, président de l'Isnar-IMG. Les changements de gouvernement pouvant expliquer en partie ces blocages.
La réforme semble difficilement applicable dans les temps, puisque "le recrutement de maîtres de stage universitaire (MSU) a pris du retard. Conséquence : "plus de la moitié des internes parisiens ne feront pas leur 4e année en ambulatoire mais à l'hôpital". Et les chiffres de Lyon et Dijon sont comparables. "Nous avons appris cela récemment et ça a été l'étincelle" qui a provoqué l'appel à la grève, indique le président de l'Isnar-IMG.
Car cette année est prévue pour être "essentiellement effectuée en stage ambulatoire" confirmait encore le gouvernement en août 2023. "Cette 4e année, pré-professionnalisante, doit nous permettre d'apprendre la gestion de la patientèle, du cabinet, des comptes et du secrétariat : tout ce qui doit faciliter l'installation et qui n'est pas enseigné à la fac. À l'hôpital, on n'apprendra pas ces notions", poursuit Bastien Bailleul.
Une rémunération et un statut qui ne sont pas encore déterminés
Le principal point de blocage porte sur la rémunération du docteur junior ambulatoire. La Conférence des doyens de médecine plaide pour un alignement avec le salaire des docteurs juniors hospitaliers, à 2.375 euros brut, pour assurer une égalité de traitement. Pour l'Isnar-IMG, c'est oublier que les hospitaliers peuvent assurer des gardes qui complètent leur revenu. L'intersyndicale plaide donc pour une rémunération mixte, avec une part de salaire et une part de rémunération à l'acte.
Par ailleurs, des points cruciaux restent en suspens. S'il existe déjà un statut de docteur junior hospitalier, le statut de docteur junior ambulatoire pour ces nouveaux internes de 4e année de médecine générale n'est pas encore défini.
Premier accroc : pour accéder à ce statut, les internes doivent passer leur thèse d'exercice. Or, "on manque déjà d'enseignants et on a déjà du retard pour que les internes préparent et passent leur thèse", indique Bastien Bailleul. Les internes de 4e année de médecine générale pourront-ils exercer comme docteur junior s'ils n'ont pas passé leur thèse ?
De plus, les questions de l'encadrement par le MSU, des conditions d'accueil sur le terrain de stage et de la participation à la permanence des soins ambulatoires (PDSA) ne sont pas tranchées non plus.
Une grève le 29 janvier pour demander le report de la réforme
Pour demander le report de la réforme et faire entendre ses revendications, l'Isnar-IMG appelle donc à la grève, le 29 janvier et organise une manifestation, à Paris.
L'intersyndicale compte sur une mobilisation importante, soutenue par d'autres organisations. "Nous avons l'appui de Reagjir et nous espérons que d'autres structures nous rejoignent."
La mobilisation s'est déjà élargie aux internes des autres spécialités : le 8 janvier, l'Isni s'est joint à l'appel à la grève pour le report de la réforme afin de "permettre sa préparation dans de bonnes conditions".
L'Isni s'empare aussi de la revendication d'un statut de docteur junior ambulatoire et ce, pour les internes de toutes les spécialités. Ce qui n'étonne pas Bastien Bailleul. "Aujourd'hui, on a des étudiants bac+10 qui touchent moins que le SMIC horaire. La revalorisation de tous les internes et des docteurs juniors est une discussion à venir", estime-t-il.
Avec l'arrivée de Yannick Neuder, ministre chargé de la Santé et de l'accès aux soins, auprès de Catherine Vautrin, la ministre du Travail, de la Santé, de la Solidarité et des Familles, chacun espère une stabilité politique permettant à ce dossier d'être traité.
Reste à savoir si les revendications seront entendues et si le calendrier de la mise en place de la 4e année d'internat de médecine générale sera maintenu. "Si nous n'obtenons aucune garantie, nous poursuivrons évidemment le mouvement", prévient Bastien Bailleul.
Mise à jour : L'Isni suspend sa participation au mouvement de grève, le 27 janvier. L'Intersyndicale nationale des internes - de même que l'Anemf qui s'était joint à l'appel à la grève - indique avoir "obtenu des avancées majeures concernant la mise en place de la 10e année de médecine générale", auprès de Yannick Neuder.
Parmi ces avancées, l'Isni et l'Anemf citent "une campagne de recrutement spécifique" de MSU, une rémunération à l'activité, une PDSA basée sur le volontariat, une dérogation pour le passage de la thèse après l'entrée en phase de consolidation et la mise en place d'un comité de suivi pour mettre en œuvre la réforme.