Déserts médicaux : étudiants, doyens et Ordre des médecins veulent créer "un assistanat territorial"

Pour lutter contre les déserts médicaux, l'Ordre des médecins, la Conférence des doyens de médecine et les étudiants proposent de créer "l'assistanat territorial". Ce dispositif incitatif d'un ou deux ans serait proposé aux jeunes médecins sur la base du volontariat.
Pour faire face à la pénurie de professionnels de santé, le pouvoir politique est tenté depuis plusieurs années d'instaurer une contrainte à l'installation des jeunes médecins. La pression s'est intensifiée le 13 novembre 2024, avec une proposition de loi transpartisane visant à réguler l'installation des médecins, présentée par le député du parti socialiste Guillaume Garot.
Un projet contre lequel se sont insurgés internes et jeunes médecins, qui défendent leur liberté d'installation et contestent l'efficacité d'une régulation.
Dans la prolongation de l'idée d'un "service médical à la nation" émise par la Conférence des doyens, en octobre, différents acteurs ont donc lancé le 9 janvier leur contre-proposition à la régulation : l'Ordre des médecins, la Conférence des doyens de médecine, l'ANEMF et l'ISNI proposent de créer l'assistanat territorial, basé sur le volontariat.
Un dispositif incitatif avec des mesures d'accompagnement
Alors que la plupart des jeunes médecins commencent leur carrière par des remplacements, ils pourraient faire ce choix alternatif, pendant du statut d'assistant des hôpitaux.
L'assistanat territorial, "articulé avec la fin de l'internat pour permettre un continuum lors de la phase de docteur junior" s'adresse aux jeunes médecins (thèse et diplôme de DES validés). "Celui-ci doit s'appliquer à une "grande majorité des disciplines médicales car les difficultés d'accès aux soins ne concernent pas que la médecine générale", rappellent les signataires.
En lien avec l'ARS (agence régionale de santé), le jeune médecin exercerait dans une zone sous-dense durant un an ou deux ans, encadré par un contrat "gagnant – gagnant" comprenant "des mesures d'accompagnement à négocier avec les collectivités territoriales : facilités de transport, soutien aux jeunes parents (garde des enfants, scolarisation), accompagnement du médecin et de sa famille (accès aux infrastructures de loisirs, culturelles et sportives, facilité de logement, aide à l'installation...").
"La pénurie médicale étant répartie sur l'ensemble du territoire, cet assistanat permettrait de prioriser, année par année, les besoins en médecine", indique ainsi l'ANEMF.
Pour rendre cette proposition plus attractive, les médecins souhaitant exercer en libéral auraient accès à "des droits comparables à ceux des assistants hospitaliers", notamment l'accès au secteur 2. Ceux qui exerceraient deux ans auraient droit au titre d'ancien assistant, à une prime d'exercice territorial et pourraient bénéficier de l'accès au contrat de début d'exercice.
Pour les médecins souhaitant avoir un exercice hospitalier, cet assistanat en milieu hospitalier sous-dense permettrait de briguer une carrière de praticien hospitalier (PH), avec un échelon supérieur à ceux ne l'ayant pas fait. Le titre d'ancien assistant et la prime d'exercice territorial devraient, de même, leur être accordés.
Des effets à court et long terme
Pour les patients, les signataires espèrent un impact "rapide" sur l'accès aux soins car cet assistanat peut "être rapidement mis en œuvre", irrigant les zones sous-denses de "plusieurs milliers de médecins".
De plus, au-delà de la période d'assistanat, une partie de ces assistants territoriaux pourraient rester sur les territoires, puisque les études montrent que "les médecins généralistes s'installent le plus souvent à proximité de leurs lieux de naissance ou d'internat".
Par ailleurs, ce dispositif permettrait de disposer d'un vivier de maitres de stage universitaires (MSU) en zone sous-dense pour encadrer les docteurs juniors ambulatoires, un statut qui reste – lui aussi – à créer. Selon les signataires, l'assistanat territorial permettrait ainsi "d'aller plus loin" que d'autres projets comme cette création de docteur junior ambulatoire, le développement de stages hors CHU et facultés mais aussi l'appui sur les infirmiers en pratique avancée.
En outre, les assistants territoriaux devraient être exemptés de toute forme de contrainte à l'installation si celle-ci venait à être mise en place par la loi, estime Benoit Veber, président de la Conférence des doyens de médecine.
La proposition, qui n'a pas été signée par l'Isnar-IMG , a été remise à Yannick Neuder, le ministre chargé de la Santé et de l'Accès aux soins.