Reportage

Les externes passent les premiers ECOS : "Le plus stressant, c'est de ne pas savoir sur quoi on va être évalué"

Par Pauline Bluteau, publié le 29 mai 2023
6 min

C'est désormais un passage obligé pour tous les externes en médecine : les ECOS, pour examens cliniques objectifs structurés, compteront pour intégrer l'internat. Rencontre avec les étudiants en quatrième année de médecine à l'université de Poitiers qui passent leurs tout premiers oraux, entre stress, larmes et soulagement.

"Diiiiing". Toute la journée, la sonnerie ponctue les allées et venues des étudiants en blouse blanche. Dans le couloir, on assiste à un ballet de portes qui s'ouvrent et se referment avec des externes parfois tout sourire, parfois moins, mais souvent très concentrés.

L'heure n'est pas à la rigolade : pour la première fois, les quelque 220 étudiants en quatrième année de médecine à l'université de Poitiers passent les ECOS. Ces nouveaux examens permettent de valider le diplôme de formation approfondie en sciences médicales (DFASM), soit leur externat, de la quatrième à la sixième années de médecine.

Chaque année donc, les étudiants passeront les ECOS. En sixième année, ils se confronteront en plus aux ECOS nationaux : il s'agit du même exercice mais celui-ci sera décisif pour intégrer l'internat, choisir sa spécialité et son lieu d'affectation.

Le stress des ECOS, les premiers oraux

L'enjeu, les étudiants en quatrième année l'ont bien perçu. Dans la salle d'attente, la tension est palpable. Quoi que… Quand on leur demande dans quel état d'esprit ils se trouvent, tous répondent "stressé !", une évidence. Mais chacun a sa méthode pour se détendre et éviter de penser à l'oral. Un petit groupe, composé de Jack Sparrow, Carlos de Bob l'éponge et Luc Besson, joue aux devinettes pendant que d'autres revoient leurs cours entre flexion et extension, pose de diagnostic, démarche à suivre… et beaucoup de jargon médical.
Il faut dire que le temps est long pour les externes. Convoqués à 7h30, ils passeront par groupe de cinq au cours de la matinée. Les derniers devront attendre midi pour se présenter. Les deux Mathilde, Arthur, Martin et Lou-Ann tentent donc quelques blagues pour détendre l'atmosphère. "Ohh cette sonnerie… faut que ça s'arrête", s'agace Mathilde qui anticipe déjà quelques pleurs si l'oral se déroule mal.
"En fait, le plus stressant, c'est de ne pas savoir sur quoi on va être évalué et c'est aussi la peur de se retrouver en difficulté sur un sujet qu'on a vu mais qui demande des connaissances assez précises. Se retrouver devant les examinateurs et devoir dire des choses qu'on ne connait pas… c'est la hantise", assure Arthur. "Ohlala, je pense que ça ne s'est pas bien passé…", répond l'autre Mathilde, celle qui porte des lunettes, en regardant partir les derniers candidats dans l'allée. Les portables sont interdits, tout est fait pour que les étudiants ne se croisent pas car les sujets sont les mêmes pour tout le monde.

Cinq mises en situation plus réelles que jamais

Après des heures d'attente, la porte s'ouvre. Les étudiants signent la feuille d'émargement, et le stress monte d'un cran. Un à un, les externes avancent dans le couloir, chacun se positionne derrière la porte désignée. Pour ce parcours, il y a cinq stations, autrement dit cinq mises en situation. Une première sonnerie retentit : les candidats peuvent lire le sujet affiché sur la porte. Ils ont une minute pour prendre des notes. La sonnerie retentit à nouveau, ils peuvent entrer dans la salle.
À l'intérieur, deux examinateurs - des enseignants-, les attendent, accompagnés d'un patient standardisé. Chaque scenario est basé sur une scène du quotidien, "cela représente vraiment ce qu'ils feront dans leur pratique clinique lorsqu'ils seront médecin, quelle que soit leur spécialité", souligne Etienne-Marie Jutant, docteur en pneumologie et organisateur des ECOS.
La première station est assez classique : les étudiants se mettent dans la peau d'un médecin remplaçant et accueille un (faux) patient, joué par Claude, un jeune retraité, qui rencontre des difficultés de sommeil et de ronflement. Après une batterie de questions, les candidats parviennent au diagnostic : Monsieur Bernard a un syndrome d'apnée du sommeil, il a besoin d'examens complémentaires. "Cela se base sur leurs compétences théoriques mais c'est vraiment la mise en pratique, la qualité de l'interrogatoire, l'examen, la prise en charge qui est évaluée", précise l'organisateur.

Un premier entraînement avant l'année prochaine

Sept minutes plus tard, la sonnerie retentit à nouveau. Le scenario est terminé, les étudiants peuvent sortir et passer au suivant. En plus de l'apnée du sommeil, les étudiants seront confrontés au syndrome du canal carpien, à la réalisation d'une ponction lombaire, de la neurologie et de l'ophtalmologie avec des imageries à interpréter et enfin, de la rhumatologie avec la prise en charge de la goutte.
Si Arthur, Lou-Ann et Martin restent très mesurés en sortant de chaque salle, les deux Mathilde réagissent très différemment. Dans la quatrième salle, Mathilde, la brune sans lunettes, s'effondre tout en reprenant très vite ses esprits en se présentant à la cinquième station. Plus loin, Mathilde, elle, ressort toujours le sourire aux lèvres : "Il y a des stations où, oui, j'ai lu et je savais ce que je devais faire mais la plus compliquée, c'était celle sur la goutte, c'était une annonce de diagnostic et on n'a pas l'habitude d'en faire", estime-t-elle.
Après 45 minutes d'épreuves, la toute dernière sonnerie retentie. Les portes s'ouvrent et le soulagement se dessine sur tous les visages. "Ohlala heureusement qu'il y avait de la pneumo à la fin !", "J'ai des trop grandes mains, je n'ai pas réussi à mettre les gants… J'ai perdu trois minutes avec des pu*** de gants…", "Qui sait expliquer une polygraphie ventilatoire, ici ?". Les commentaires fusent et les sourires reviennent. Malgré des avis mitigés sur leur réussite, les premiers ECOS sont terminés. Rendez-vous dans un an, même jour, même heure… même examen mais cette fois avec d'autres difficultés pour leur cinquième année.

Vous aimerez aussi

Contenus supplémentaires

Partagez sur les réseaux sociaux !