Témoignage

Médecine : ils racontent leur premier jour d'internes

N'ayez pas peur : les internes vont s'occuper de vous !
N'ayez pas peur : les internes vont s'occuper de vous ! © plainpicture/OJO/Chris Ryan
Par Catherine de Coppet, mis à jour le 02 novembre 2017
1 min

Jeudi 2 novembre 2017, près de 8.000 étudiants en médecine commencent leur premier stage en tant qu’internes. Un plongeon parfois vertigineux dans le grand bain, au regard des nouvelles responsabilités qui leur sont confiées. Témoignages à l'issue de cette première journée.

"Entre la fin de l'externat en juin et le début de l'internat début novembre, on gagne très peu côté connaissances, mais beaucoup côté responsabilités !" Pierre, 24 ans, interne de médecine générale dans un service de cardiologie depuis quelques heures, résume assez justement les enjeux de ce passage de cap pour des milliers d'étudiants en médecine...

Pour beaucoup d'entre eux, les premiers jours de travail en tant qu'internes sont synonymes de stress face au poids des choix qu'ils auront à faire face aux patients. D'autant que, pour la première fois depuis longtemps, ils sortent de quelques mois de vacances. "Les trois mois de pause après le concours [les ECNi] nous font vite perdre l'habitude de travailler de façon soutenue, avoue Evan, 25 ans, qui vient d'intégrer un service de psychiatrie. On est pressé de commencer avec ces nouvelles responsabilités, et en même temps un peu triste de voir la pause se finir !"

En première ligne

Sur le terrain, le changement de dimension est clair. "Être interne, c'est être en première ligne, souligne Pierre. Par rapport au poste d'externe, on est moins encadré pour prendre les décisions, même s'il y a toujours un médecin senior à l'écoute." De fait, les internes réalisent les premiers diagnostics, les premiers gestes et les premières prescriptions. Une nouveauté pour eux. "Les externes n'ont pas le droit de prescrire", rappelle Anthony, 26 ans, interne en psychiatrie. "On entre dans l'application, et on est seul à agir dans un premier temps", renchérit Matthieu, 25 ans, interne en médecine générale qui a fait sa rentrée dans un service d'onco-hématologie, aux soins palliatifs.

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Agir sans validation immédiate

Si les décisions sont toujours validées in fine par un médecin plus expérimenté, les internes doivent en effet être capables d'attendre cette validation, qui intervient au plus tard dans les deux à trois heures qui suivent. Et c'est souvent le plus angoissant ! En témoigne la première expérience d'interne pour Pierre, il y a quelques mois de cela. Il était alors FFI, c'est-à-dire "faisant fonction d'interne", une opportunité offerte en fin d'externat aux étudiants en attendant le début officiel de leur internat. Ils occupent les mêmes responsabilités qu'un interne dans un service, mais sans le titre officiel. "Je n'en menais pas large au début. Une nuit, j'ai été appelé aux urgences pédiatriques pour un bébé de 18 mois qui avait des convulsions et était en hyperthermie [élévation excessive de la température du corps], raconte Pierre. J'ai fait un diagnostic et prescrit une première dose de valium. Je connaissais la situation par les livres, mais je n'avais jamais traité ce cas en réel. Les parents étaient en panique. J'ai appelé le médecin senior de garde. Les cinq minutes qui ont précédé son arrivée ont été les plus longues de ma vie."

Pour son premier stage comme interne titulaire, en cardiologie, Pierre s'est bien préparé : "Je révise mes cours de cardio depuis un mois !" "Il faut bien se lancer pour avancer, se résoud Matthieu. Ce matin, l'une de mes collègues internes doit faire seule la visite, c'est-à-dire le tour des patients, avec toute l'équipe. Je sais qu'elle est bien stressée !"

Des livres à la pratique : un fossé

Le début de l'internat : le passage de la théorie à la pratique. "J'ai été surpris du fossé entre les livres et le "réel" lors de mes premiers jours, se souvient Anthony, qui entre dans son 5e semestre d'internat. J'ai découvert le rôle important qu'a le médecin dans la définition du cadre d'hospitalisation en psychiatrie : chaque jour, il faut décider si les sorties sont possibles pour le patient, de la pause cigarette à la permission à domicile. Je n'avais pas mesuré cette responsabilité."

Même sentiment chez Pierre, qui se prépare de son côté à sa première garde en tant qu'interne. "Tous les médecins ne seront pas là. Il n'y aura ni cardiologues, ni chirurgiens par exemple. Ce que je redoute le plus, c'est une urgence obstétrique, un accouchement. Je n'ai pas eu affaire à cette situation souvent, et on ne sait jamais comment ça va se passer. Je redoute les situations graves", avoue le jeune homme.

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Des collègues sur lesquels s'appuyer

Mais la pratique, ce n'est pas seulement le geste technique ou le diagnostic, c'est aussi le rapport au patient et aux familles. "Ma première nuit de garde en tant qu'interne, j'ai eu à prendre en charge une famille dont un parent venait d'être hospitalisé en psychiatrie. La situation était extrêmement difficile, il fallait répondre à leur inquiétude", se rappelle Anthony. Comment a-t-il géré la situation ? "Je me suis appuyé sur les infirmiers, qui avaient beaucoup d'expérience... C'est essentiel de pouvoir se faire aider." En fonction des services, l'acquisition de l'autonomie de l'interne se fait plus ou moins progressivement. "Le premier stage d'interne en psychiatrie est assez spécifique. Les médecins seniors sont là pour nous guider jusqu'à ce qu'on puisse se lancer seuls, avec leur accord, souligne Evan. C'est plus rassurant."

Une journée de nouveautés

Que la période pendant laquelle les jeunes internes sont supervisés soit courte ou plus longue, ils doivent faire face à une foule d'informations nouvelles, à intégrer rapidement. "J'ai dû changer de ville, je découvre un nouvel hôpital, de nouveaux fonctionnements. Émotionnellement, c'est très compliqué, avoue Matthieu. Entre ma première journée hier et ce soir, je découvre quatre nouveaux logiciels et je vais suivre trois formations pour les comprendre !"

Autre changement, et non des moindres, le regard des autres. "Je me suis rendu compte assez vite que mes paroles comptaient et que les autres soignants attendaient des réponses de ma part quand il y avait un problème, souligne Matthieu, qui conclut : "Il faut malgré tout arriver à demander de l'aide, ou dire quand on ne sait pas, mais c'est le plus compliqué."

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