Etudes de sages-femmes : pour les futures diplômées en maïeutique, la mise en place d'une sixième année de formation effective à la rentrée 2024

Désormais, les étudiants en maïeutique auront six années d’études avant de devenir sage-femme. Une réforme en profondeur du cursus mise en place à la rentrée prochaine, pour les étudiants entrant en premier cycle.
Ces premiers textes semblent satisfaisants pour les acteurs concernés. Dans la foulée de la loi du 25 janvier dernier, qui réforme la formation de sage-femme, un décret et un arrêté publiés le 3 juillet 2024, créent le 3e cycle des études de maïeutique. Pour les étudiants qui seront dans cette filière en septembre 2024, après avoir validé leurs examens à l'issue d'un PASS ou d'une LAS, les études dureront désormais six ans, contre cinq années précédemment.
La note de présentation de ce décret, telle qu'elle a été présentée au Cneser en mai dernier, précise que le texte "porte dans un premier temps sur le référentiel de formation du premier cycle. Les travaux se poursuivent et l’arrêté présenté sera complété dans les prochains mois de deux chapitres relatifs au deuxième et troisième cycles".
Ces travaux, menés par un groupe de travail dédié, s’appuient notamment sur le rapport de l’Igas-IGESR de juillet 2022. Concernant le premier cycle de la formation sage-femme, ce rapport préconisait "d’alléger les enseignements médicaux généraux pour les recentrer sur les compétences spécifiques aux sciences maïeutiques, de rééquilibrer les enseignements théoriques portant sur l’obstétrique et la pédiatrie avec ceux portant sur la gynécologie et les nouvelles compétences des sages-femmes".
Une formation sage-femme fondée sur l’approche par compétences
Le référentiel de formation, en annexe de l’arrêté, est basé sur une approche par grands domaines de compétences. "L’approche par compétence […] impacte l’organisation des enseignements qui seront désormais organisés en six domaines de compétences exprimées en situations professionnelles et déclinées en capacités :
le domaine prénatal,
le domaine périnatal,
le domaine postnatal,
le domaine gynécologique,
le domaine recherche,
le domaine générique."
"Cette approche est une amélioration mais pas une révolution", pointe Isabelle Derrendinger, présidente du conseil national de l’ordre des sages-femmes et également directrice de l’école du CHU de Nantes (44). "Cette nouvelle répartition des domaines concerne tous les cycles. C’est une évolution pédagogique à travers un apprentissage progressif, que l’on voit dans toutes les formations du supérieur."
Pour Jeanne Conan, VP en charge de l'enseignement supérieur de l’ANESF , cette nouvelle répartition recentre l’apprentissage sur les compétences propres au métier de sage-femme, "notamment avec la place grandissante de la gynécologie". "Ce domaine est arrivé tardivement dans la formation, en 2009. Depuis plusieurs années, nous revendiquons un accroissement des enseignements théoriques et cliniques dessus, c’est chose faite avec cette réforme. Et en plus, la gynécologie est abordée dès le premier cycle de formation !"
Revalorisation du volume horaire
Le référentiel de formation est également basé sur un parcours personnalisé. "S’il existait auparavant la possibilité de faire un parcours propre, par exemple en faisant un autre type de master, là, la dimension personnalisée est renforcée, insiste Isabelle Derrendinger. La preuve, ce parcours passe de six ECTS à minimum douze ECTS."
Cette individualisation du parcours pourra se traduire par des unités d’enseignements permettant à l’étudiant soit d'approfondir ses connaissances spécifiques mais aussi de découvrir d’autres disciplines qui ne soient pas forcément médicales ou encore de s’engager dans un parcours de recherche.
Pour Jeanne Conan, l’un des points fondamentaux de ce texte est la revalorisation du volume horaire. "C’est l’une des raisons pour lesquelles nous défendions une 6e année d’études. Normalement, un ECTS est égale à 25 ou 30h de cours théoriques et 30h de cours cliniques. Mais cette règle du cadrage européen des formations n’était pas respectée en maïeutique. Les étudiants avaient beaucoup de surcharge d’horaire et cela avait des conséquences sur leur santé mentale."
Stages, coûts, attractivité… Des critiques demeurent
Toutefois, l’ANESF déplore plusieurs points critiques de ce premier texte officiel. Tout d’abord, "nous regrettons que l’identification d’un stage libéral ne soit formulée que sous la forme de recommandation, et non comme une obligation, précise Jeanne Conan. La pratique libérale est arrivée tardivement dans notre métier et il y a donc des difficultés pour l’imbriquer dans la formation. Mais, à notre sens, elle doit faire complètement partie de la formation, ne serait-ce parce qu’elle permet de développer des compétences transversales sur la santé des femmes."
L’association étudiante dénonce aussi le coût de la formation en premier cycle : d'après ses calculs, les étudiantes en maïeutique dépensent en moyenne 12.850 euros pour se rendre en stage pendant leurs quatre années de formation. "À partir de la 4e année, les étudiantes peuvent prétendre à une indemnité de transport qui s’élève à 130 euros brut par mois. Nous demandons à ce que cette indemnité soit étendue au premier cycle d’études, en prenant compte les indemnités kilométriques à frais réels !"
La précarité, comme le rythme de la formation, sont souvent évoqués parmi les causes d’abandon des études de maïeutique. Alors que, depuis la réforme de la première année des études de santé, des places demeurent inoccupées dans la filière, les inquiétudes sont réelles quant à son attractivité.
La réforme, dont l’un des objectifs est de permettre une meilleure connaissance en considérant l’activité de sage-femme comme une profession médicale, se veut une première réponse. "Mais il y a un problème de fond sur les conditions de travail et de carrière des sages-femmes, et plus globalement des professions médicales, estime Jeanne Conan. C’est une réflexion plus large qu’il faut mener."