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Etudiants et diplômés de grandes écoles : "sacrifiés" au nom de la crise, ils tiennent à leur plan de carrière

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Par Etienne Gless, publié le 27 mai 2021
7 min

La crise sanitaire a été vécue comme une déflagration par près des deux tiers des étudiants et jeunes diplômés de grandes écoles, selon le baromètre "Talents : ce qu'ils attendent de leur emploi" réalisé pour la Conférence des grandes écoles (CGE) par Ipsos et le BCG. S'ils se résolvent à faire des concessions pour entrer sur le marché du travail, la majorité d'entre eux se montre confiant pour leur insertion professionnelle.

Faire des concessions pour son premier emploi en période de crise afin de sauver l'essentiel : son projet professionnel initial. Les 2.242 étudiants et jeunes diplômés de 138 grandes écoles, interrogés du 17 mars au 22 avril 2021, par Ipsos et le BCG (Boston Consulting Group) pour la CGE, sur leurs attentes en matière d'emploi se montrent pragmatiques et habiles tacticiens. Ils ont bien conscience que, contrairement à leurs aînés des promotions diplômées jusqu'en 2018, le vent a tourné.

Trois quarts des étudiants de grandes écoles s'estiment "sacrifiés"

La mesure des difficultés traversées depuis 15 mois tient en un chiffre : 63% des étudiants de grandes écoles interrogés ont le sentiment d'avoir perdu pied et décroché durant leurs études du fait des restrictions occasionnées par la crise sanitaire. Les trois quarts des 1.349 étudiants de grandes écoles questionnés s'estiment ainsi "sacrifiés" au nom de la crise sanitaire.

L'immense majorité d'entre eux considèrent que leur formation a été affectée (83%) et qu'ils ont été privés des plus belles années de leur vie (79%). Le Covid-19 pourrait laisser des traces profondes sur leur vie professionnelle : 71% estiment ainsi qu'il aura un impact durable sur leur parcours professionnel. Sans compter l'impact psychologique qui pourrait les marquer longtemps estiment 56% des étudiants et 41% des diplômés.

Un poste intéressant, une bonne ambiance : des critères de choix inchangés

Le tsunami qu'a représenté la crise sanitaire n'a pas pour autant bouleversé la hiérarchie des critères de choix de leur futur métier. Malgré les stigmates laissés par les confinements, couvre-feux et autres mesures privatives de liberté, les aspirations professionnelles demeurent les mêmes qu'avant la crise. Qu'ils soient encore étudiants ou jeunes diplômés, l'intérêt du poste (pour plus de neuf jeunes sur dix) et l'ambiance de travail (pour plus de huit sur dix) restent les deux fondamentaux intangibles de la génération Covid-19 entrée sur le marché du travail en 2020 ou s'apprêtant à y entrer cette année.

Le troisième critère de choix diffère selon que l'on soit encore étudiant ou déjà dans la vie active. Les premiers placent à ce rang de leurs préoccupations la recherche d'un métier en phase avec leurs valeurs (76%) ; les seconds sont en quête d'un poste offrant des responsabilités et un bon équilibre avec la vie personnelle (73%).

"Nos diplômés avaient l’habitude de facilement trouver un emploi. Actuellement ils n'ont pas d’inquiétude sur leur insertion professionnelle mais ils ont beaucoup moins de choix qu’avant, résume Laurent Champaney, vice-président de la Conférence des grandes écoles (CGE). Il demeurent confiants : leur projet professionnel ne sera pas durablement atteint."

Les grandes entreprises attirent toujours, les start-up ont moins la cote

Commencer sa carrière dans une grande entreprise fait toujours rêver 40% des étudiants et 36% des diplômés débutants. Pour leurs débuts professionnels, ils sont tout de même entre un sur quatre (chez les alumni actifs) et un sur cinq chez les étudiants à envisager de travailler dans une petite ou moyenne entreprise.

Débuter en créant sa société a un peu moins la cote qu'avant la crise, mais attire encore 5% des étudiants et 16% des jeunes diplômés. De même, débuter sa vie professionnelle dans une start-up ne recueille plus les faveurs que de 5% des étudiants de grandes écoles et 3% des jeunes diplômés, alors que travailler dans une ONG intéresse un jeune sur dix. Créer ou travailler dans une start-up semble une stratégie d'insertion envisagée uniquement par "beau temps" !

La hiérarchie des secteurs privilégiés a peu évolué en comparaison des précédentes éditions du baromètre : 71% des étudiants et 81% des diplômés sont intéressés par l’environnement, secteur toujours largement en tête, suivi par ceux des énergies, du conseil et de l’humanitaire.

Accepter 12% de salaire en moins pour un job en phase avec les valeurs sociales et environnementales

Des concessions, les jeunes savent qu'ils devront en faire pour entrer sur le marché du travail : accepter un poste en CDD plutôt qu'en CDI, rejoindre un secteur d'activité ou une entreprise différents de ceux rêvés...

Quitte à faire des sacrifices pour son premier emploi, autant que ce soit pour un job porteur de sens : plus de six jeunes sur dix (63% des étudiants, 62% des diplômés) sont prêts à prendre un emploi plus précaire si le travail a du sens. Et plus d'un jeune sur trois (34%) est prêt à consentir une baisse de rémunération de 12% si l'entreprise est en phase avec leurs valeurs sociales et environnementales.

Mais ils ne sont pas dupes de l'engagement social et environnemental des grandes sociétés où ils s'apprêtent à débuter majoritairement leur carrière. Pour 54% des étudiants et 51% des diplômés, cet engagement est jugé peu sincère et dicté par des conditions purement opportunistes. "Pas question de se retrouver à faire un job vide de sens, observe Laurent Champaney. Les jeunes regardent évidemment l’engagement des entreprises et leur sincérité mais regardent aussi, et surtout l’utilité de leurs missions et leur apport au sein de l’entreprise."

Le télétravail à dose modérée : deux jours dans l'idéal

Quand la pandémie de coronavirus sera terminée, les nouvelles habitudes de travail acquises pendant la crise perdureront. Ainsi, du télétravail quand l'activité le permet. "Le télétravail à 100%, personne ne le souhaite. On va tous vers une forme hybride de travail", remarque Jean-Michel Caye directeur associé senior au Boston consulting group (BCG).

Le nombre idéal de jours de télétravail pour les jeunes issus de grandes écoles ? Deux jours pour un tiers des étudiants (33%) et des alumni (34%). A noter tout de même que près d'un étudiant sur quatre (23%) souhaite travailler "en présentiel" à 100%. Les cours à distance n'ont pas laissé que des bons souvenirs ! Ils ont même fait prendre conscience (ou rappelé) l'impératif de travailler physiquement en équipe, en particulier en début de carrière.
Infographie par Etienne Gless

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