Enquête

Intégrer un réseau professionnel féminin : utile ou pas pour les jeunes diplômées ?

Réseaux pro féminin
Réseaux pro féminin © Fotolia
Par Sandrine Chesnel, avec Grégory Lannes, publié le 29 avril 2014
1 min

Ce n’est plus une mode mais un vrai mouvement de fond : en quelques années, le nombre de réseaux professionnels féminins a explosé. Il en existerait aujourd’hui plus de 400 en France, réunissant des professionnelles de tout âge autour de leur diplôme, leur entreprise, leur métier ou leur secteur d’activité. À quoi s'attendre et comment en profiter ? L'Etudiant a enquêté auprès des principales intéressées.

"Il y a aujourd'hui tellement de réseaux professionnels de femmes que chacune peut trouver le sien !" Ainsi parle Emmanuelle Gagliardi, codirectrice de l'agence Connecting Women, et auteure d'un guide sur les réseaux féminins. Les premiers réseaux de ce type sont apparus dans les secteurs où les femmes étaient peu représentées – industries, métiers techniques –, à l'initiative le plus souvent de quadras ou de quinquas confrontées au "plafond de verre", cette limite invisible qui dans les entreprises empêche les femmes de monter dans la hiérarchie. 

Fait nouveau, les réseaux récemment créés le sont par des trentenaires, autrement dit par des femmes qui n'ont pas encore été confrontées à ce fameux plafond. Pour Emmanuelle Gagliardi, c'est le signe d'une prise de conscience plus rapide chez les jeunes femmes d'aujourd'hui de la nécessité de se prendre en main pour se faire une place dans l'entreprise, à hauteur de leurs ambitions.


Des réseaux ouverts aussi aux plus jeunes

Reste que les profils des membres de ces réseaux peuvent parfois effrayer les plus jeunes, qui, alors qu'elles sont tout juste diplômées, pensent ne rien avoir à leur offrir... "C'est une erreur, affirme Emmanuelle Gagliardi. Accueillir des jeunes femmes, c'est pour ces réseaux une façon de se renouveler et de s'enrichir."

Natacha Quester-Séméon, cofondatrice de Girls Power 3.0, un réseau de professionnelles du Web, ne dit pas autre chose : "Les échanges intergénérationnels sont enrichissants pour toutes : les plus anciennes apprécient les regards neufs, les approches nouvelles des jeunes diplômées, et celles-ci découvrent auprès des plus expérimentées qu'être une femme en entreprise n'est pas toujours aussi simple que pour les hommes. Il ne s'agit pas d'être ou pas féministe, mais de partager des clés de compréhension sur ce qui peut faire obstacle dans l'entreprise, et surtout comment les contourner."

Beaucoup de ces réseaux féminins sont ouverts et accessibles sur simple demande, sans avoir à payer de droit d'entrée. Ainsi, les membres de Girls Power 3.0 accueillent régulièrement des jeunes femmes en recherche de conseils, notamment pour monter leur entreprise dans le domaine du Web, après un simple clic sur leur site internet. D'autres réseaux sont moins ouverts : on les rejoint par cooptation, ou en échange d'une cotisation annuelle.


Apprendre à réseauter dès l'école

Cette tendance se retrouve également au sein des grandes écoles : elles sont de plus en plus nombreuses à voir éclore des réseaux d'étudiantes, qui se mobilisent pour apprendre ensemble à "réseauter" avant même d'être diplômée. À raison puisque que dans certains secteurs professionnels, les trois quarts des offres d'emplois ne sont pas publiées sur des sites d'annonces mais pourvues via... le réseau. Apprendre à réseauter est aussi important que de savoir rédiger un CV efficace !

Réseaux professionnels

La plupart de ces réseaux d'étudiantes proposent des rencontres avec des professionnelles, ce qui permet d'étoffer son carnet d'adresses, mais aussi du mentoring ("marrainage" entre femmes expérimentées et étudiantes) et des ateliers d'entraînement à la prise de parole. "C'est le point faible de beaucoup de jeunes femmes", explique Claire-Marie Foulquier-Gazagnes, étudiante en double diplôme Sciences po Paris-HEC et présidente de Women Work, le réseau de Sciences po Paris. "Les garçons ont plus rarement ce souci-là, car ils sont encouragés dès le plus jeune âge à se mettre en avant, poursuit celle qui a été par ailleurs demi-finaliste du concours d'éloquence de Science po en 2011. Pour aider les filles à oser prendre la parole dans une réunion, il est plus facile de commencer par travailler avec elles en petits groupes, uniquement féminins."

Chaque année Women Work permet également à une quarantaine d'étudiantes de constituer des binômes avec des femmes déjà insérées dans l'entreprise, à des postes d'encadrement. Elles en profitent pour échanger sur leurs métiers, mais aussi sur la conciliation vie professionnelle/vie privée.


Solidarité, échanges d'expériences, et bonne humeur !

La liberté de parole entre filles, un des atouts des réseaux professionnels féminins ? Une évidence pour Natacha Quester-Séméon : "Lors de nos rencontres, la parole tourne beaucoup. Chacune raconte ses succès ou les difficultés rencontrées – c'est plus facile de le faire entre femmes, sans avoir peur d'être jugées". Mais il ne faut pas réduire les réseaux professionnels féminins à des "lieux de paroles" entre femmes. "Comme dans les réseaux mixtes, nous sommes aussi là pour échanger sur nos business, transmettre des contacts, ouvrir nos carnets d'adresses... Dans une logique de solidarité, de chaleur, qui fait beaucoup de bien".

À 29 ans, Antonia Krpina fait partie de ces jeunes actives membres d'un réseau féminin professionnel. Responsable des RP (relations publiques ) on line chez PSA, elle est aussi membre de Women Engaged For PSA. Ce réseau a été créé il y a trois ans par la directrice de la communication du groupe, avec le soutien de l'encadrement du top management, qui souhaitait féminiser ses équipes.

"Embauchée en novembre 2010, j'ai rejoint ce réseau trois mois plus tard. Il me permet de discuter et d'échanger avec des seniors femmes. Être accompagnée dans l'entreprise par une femme qui a plus de bouteille que soi, c'est très précieux ! Faire partie de ce réseau m'a aussi permis de mieux comprendre la culture et les "règles du jeu" de mon entreprise". De quoi se constituer une base solide pour progresser sans se censurer.

Pour trouver un réseau féminin

 

Voici les comptes Twitter des personnalités interviewées. N'hésitez pas à repérer parmi leurs abonnés et leurs abonnements d'autres comptes qui peuvent vous intéresser.

Emmanuelle Gagliardi

Natacha Quester Séméon

Antonia Krpina

Des réseaux que vous pouvez contacter si vous souhaitez monter votre propre réseau dans votre école ou université :

Women Work (étudiantes de Sciences Po Paris)

Grandes écoles au féminin

D'autres réseaux :

Financi'elles

Administration Moderne

Femmes & Sciences

Women's International Networking

 


Exit les réseaux mixtes ?
Faire partie d'un réseau professionnel féminin ne vous interdit pas d'être membre d'un réseau mixte ! Pour Anne Lauvergeon, présidente du Conseil de surveillance de Libération et ancienne présidente du directoire d'Avera, c'est même indispensable : "De mon point de vue, les réseaux mixtes en particulier favorisent l'engagement des hommes sur le sujet de la mixité, un sujet collectif" (1). Dit autrement, les réseaux professionnels féminins peuvent être une première étape pour apprendre à réseauter – mais une fois plus sûre de vous il ne faudra pas hésiter à rejoindre un réseau mixte – pour le bien de votre carrière... comme pour celui de vos collègues masculins.

(1) Rencontres égalité Femmes Hommes dans l'enseignement supérieur, Social Builder, Télécom Paris Tech, 12 novembre 2012  


Intégrer un réseau féminin professionnel en trois étapes
1/ Identifiez le réseau qui vous intéresse, via Facebook, Internet, Twitter, bouche à oreille, etc.

2/ Contactez (par mail ou téléphone) les responsables de ce réseau, en mettant de côté votre timidité : demandez quelles sont les conditions d'accès au réseau (cooptation, frais d'adhésion, envoi de CV ou de lettre de motivation...). Si le réseau est complètement ouvert, demandez quelle est le prochain événement et allez-y !

3/ Le jour dit, écoutez beaucoup, et parlez peu : c'est ainsi que vous pourrez déterminer si vous vous sentez à votre place dans le réseau que vous avez choisi. N'oubliez pas que la force d'un réseau professionnel repose sur la solidarité dont font preuve ses membres. N'hésitez pas à proposer des idées, des contacts... Bref, soyez force de proposition !


À lire
"Réseaux aux féminins, guide pratique pour booster sa carrière", Emmanuelle Gagliardi, aux éditions Eyrolles, 2013, environ 14 €.
"Pourquoi les femmes se font toujours avoir", Yves Deloison, aux éditions First, 2013, environ 16 €.

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