Interview

"Dans la com', n'attendez pas que l’on vienne vous chercher. Soyez un peu gonflé !"

Par Mathieu Oui, publié le 11 février 2010
1 min

Comment recrute le secteur de la communication ? Quelles sont les fonctions emblématiques et qui recrutent encore malgré  la mauvaise conjoncture ? Comment les jeunes diplômés peuvent-ils optimiser leur candidature ?  L'avis de Stéphane Billiet, PDG de l’agence de Relations publiques Hill & Knowlton à Paris, Président de Syntec Conseil en relations publiques et maitre de conférence au Celsa à Paris.

stephane billiet, drh dans la communicationLa crise actuelle affecte-elle le secteur de la communication ?
 
Cette année, pas plus que 2009, sera sans doute peu propice aux recrutements en agence. Nos clients ont un peu réduit la voilure, en reportant ou en renonçant à certaines actions. Si l’activité se maintient globalement, les agences marquent le pas en terme de revenus. Par exemple, au lieu de faire un événement, nos clients se contentent d’un communiqué de presse. Du coup, le recrutement de jeunes diplômés s'en ressent, même s’il n’est pas complètement fermé.

Tous les métiers sont-ils pareillement concernés ? 
 
C’est une tendance assez globale. Cependant certains métiers sont un peu moins touchés car plus neufs, notamment ceux liés aux stratégies interactives ou au "Community management". Cela consiste à gérer les relations d’une marque ou d’une entreprise avec la communauté des blogueurs. Ce sont des profils encore assez rares pour lesquels il n’y pas vraiment de formation. Ceci-dit, le fait de savoir comment marche la blogosphère ou Twitter ne s’apprend pas forcément à l’école. C’est plutôt une question de curiosité d’esprit, qualité indispensable dans nos métiers.

Y a t-il un niveau minimum de formation ?
 
On ne recrute quasiment jamais en dessous du bac + 5. Les agences comme la mienne recherchent des têtes bien faites, avec une capacité à comprendre les grands enjeux de la société. Les formations spécialisées en communication donnent bien sûr de bons profils, mais les diplômés en sciences humaines (histoire, sociologie, psychologie, philosophie...) nous intéressent. Ce domaine s'apparente en effet plus aux relations publiques que le marketing par exemple puisqu'il s'agit de gérer des opinions et des communautés (professionnelles ou autres). Des profils issus d’écoles de commerce peuvent également nous intéresser. Entre ces deux pôles, sciences-humaines et commerce, les filières de communication comme le Celsa où j’enseigne, font un peu la synthèse.

Quelles sont les qualités nécessaires pour travailler dans le secteur ?
 
Entre deux CV similaires, ce sont les qualités personnelles qui vont faire la différence. Quand nous accueillons des jeunes en stage dans l’agence, nous regardons comment ils réagissent, si leur état d’esprit convient à nos métiers. Certains étudiants se fourvoient dans la communication en pensant que c’est un secteur glamour, alors que ce sont des professions très exigeantes et rigoureuses. Aujourd’hui, les entreprises sont attendues au tournant par les ONG (organisations non gouvernementales, ndrl) : la communication est de moins en moins légère et de plus en plus stratégique. Il faut être capable de comprendre l’enjeu du client, de prendre en charge son problème, cette capacité d’empathie fait souvent défaut.

Il faut donc être très impliqué ?
 
A mort ! Tout ce que l'on voit ou vit doit servir de matière, un peu comme un acteur ou un journaliste qui s’imprègne de son environnement quotidien. Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas une cloison étanche entre la vie professionnelle et intime.

Maîtriser l’anglais, c’est aussi une évidence ?
 
Je vois encore arriver des jeunes qui se retrouvent handicapés dans leur carrière parce qu’ils ne maitrisent pas suffisamment l’anglais. Notre entreprise est une multinationale et même si l’on parle français au quotidien, il y a toujours un moment où l’on doit communiquer par écrit ou par oral dans la langue internationale. D’ailleurs, quand je fais passer un entretien de recrutement, il y a systématiquement une petite partie en anglais. Les jeunes candidats ont souvent un anglais trop scolaire. Les étudiants ont donc tout intérêt à investir dans un stage à l’étranger pendant leurs études, et de préférence dans un pays anglo-saxon, afin d’acquérir cette aisance qui leur manque.

Quels sont les moyens privilégiés de recrutement ?
 
Le stage en priorité et puis la cooptation : un collaborateur qui nous conseille quelqu’un. Le marché de la communication est assez fermé, car petit. Le plus difficile est d’y entrer. Ensuite, c’est plus facile de rebondir. Pour décrocher un premier stage, il faut trouver les bons relais. Cela peut être par exemple un salon professionnel, un enseignant, un site spécialisé sur le secteur de la communication. Cela permet de repérer un nom, une information sur laquelle on va rebondir quand on prend contact avec un employeur potentiel.

Que pensez-vous des réseaux sociaux sur Internet du type Facebook ou Viadeo ? Sont-ils indispensables ?
 
Cela serait dommage de ne pas les utiliser. Personnellement, je ne m’en sers pas pour effectuer un recrutement. J’aurais tendance à les utiliser uniquement si je vois un CV très impressionnant dont j'aimerais vérifier les infos.

Le secteur de la communication est très centralisé. Peut-on exercer en dehors de la capitale ?
 
En agences de relations publiques, c’est vrai qu’il y à peu de possibilités en dehors de Paris. En revanche, les régions offrent énormément d’opportunités dans les collectivités locales et les entreprises. Par exemple, j’ai un ancien étudiant du Celsa qui a trouvé un poste de directeur de communication d’une PME à Lorient, et qui est ravi.

Un dernier conseil ?
 
Il faut être un peu gonflé, ne pas hésiter à aller voir ses profs pour solliciter un stage. Ce sont des métiers où l’on ne peut pas être trop réservé, ce qui ne veut pas dire pour autant être mal-élevé. Une fois en agence, il faut toujours anticiper l’étape suivante. En tant que stagiaire, s’investir pour montrer qu’on pourrait être déjà un collaborateur. Ensuite, montrer son potentiel comme consultant. N'attendez que l’on vienne vous chercher : il y a une vraie concurrence dans notre secteur. 

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