Interview

Présidentielle 2022. Anne Hidalgo : "Je supprimerais Parcoursup"

L'Etudiant a recueilli les propos de la candidate du PS sur les mesures qu'elle mettrait en place pour la jeunesse si elle est élue au deuxième tour de la présidentielle.
L'Etudiant a recueilli les propos de la candidate du PS sur les mesures qu'elle mettrait en place pour la jeunesse si elle est élue au deuxième tour de la présidentielle. © Sebastien ORTOLA/REA
Par Propos recueillis par Romain Burrel, publié le 02 mars 2022
9 min

MOI PRESIDENT(E). Orientation, précarité, accès à l'emploi, égalité des chances... L'Etudiant a interrogé les candidats à l'élection présidentielle sur les mesures qu'ils comptent mettre en place en faveur de la jeunesse s'ils sont élus au soir du 24 avril 2022. La candidate socialiste, Anne Hidalgo, ouvre le bal de cette série d'entretiens, en répondant à nos questions.

Candidate du Parti socialiste à l'élection présidentielle, Anne Hidalgo est malmenée dans les sondages. Mais l’actuelle maire de Paris l’assure : elle ira jusqu’au bout.

Les mesures en faveur de la jeunesse de la candidate Hidalgo

Elle est d’ailleurs l’une des rares candidates, sur la quarantaine en lice décomptés à ce jour, à avoir pu réunir très tôt les fameux 500 parrainages de parlementaires ou d'élus locaux avant la date de clôture des inscriptions auprès du Conseil constitutionnel. L’Etudiant a souhaité interroger celle qui veut "changer l’Avenir" sur son programme en faveur de la jeunesse et en matière d’éducation.

Sur fond d’invasion par la Russie de l’Ukraine et de ralentissement de la crise Covid, de gronde autour du pouvoir d’achat, cette élection présidentielle s’annonce étrange. Difficile de faire vivre le débat politique français. D'abord parce qu'à l’heure où nous écrivons ces lignes, le président sortant - même si cela ne fait aucune illusion - ne s’est toujours pas officiellement déclaré candidat. Tandis que les instituts de sondage prédisent une abstention record, jamais atteinte sous la Ve République, notamment parmi les jeunes.

Pourtant un constat nous frappe déjà dans cette campagne présidentielle 2022 : on n'y parle très peu de la jeunesse et de l’éducation.

Aussi l’Etudiant a décidé d’interroger les principaux candidats à l’élection sur les mesures qu'ils entendent prendre en faveur de la jeunesse et dans le domaine de l'éducation, s'ils sont élus.

Quelles sont les mesures précises que vous comptez mettre en place pour lutter contre la précarité étudiante ?

Anne Hidalgo :

Les files d’attente devant les banques alimentaires, ce n’est plus acceptable. La première mesure que je souhaite mettre en place, c’est l’ouverture des minima sociaux dès l’âge de 18 ans, nous sommes dans les derniers au sein de l’Union Européenne à ne pas le permettre.

Je souhaite la mise en place d’un minimum jeunesse ouvert dès 18 ans sous condition de ressources à hauteur du RSA (revenu de solidarité active), pour permettre à chaque jeune de vivre dignement.

Entre la réforme du bac, la mise en place de Parcoursup, la crise sanitaire… on observe des étudiants perdus dans leurs choix d’études. Si vous êtes élue présidente, quelles mesures mettrez-vous en place pour les aider à s’orienter plus efficacement ?

Anne Hidalgo : Je supprimerais Parcoursup pour rétablir l’accès équitable des lycéens français à l’enseignement supérieur

. Un nouveau cap serait donné à notre système d’enseignement supérieur : 60% de chaque classe d’âge en sera diplômée contre 38% aujourd’hui.

L’orientation est un enjeu majeur de la réussite et de l’intégration des jeunes au sein de notre société. Je propose de refonder le service public d’orientation avec deux ambitions : un égal accès à une information complète et un accompagnement personnalisé, pour donner à chaque élève du secondaire un accompagnement allant du bac-5 au bac+5.

La généralisation du contrat tutorat sera un outil de ce plan. Il prévoit l’accompagnement individuel de chaque élève dès la seconde par des étudiants du supérieur. Je généraliserais la possibilité d’étudier et de travailler en alternance, et ainsi de commencer à gagner sa vie, à l’ensemble des formations avec l’objectif que l'alternance devienne la règle plutôt que l’exception.

Je demanderais à mon gouvernement de faciliter les changements de filière et les réorientations lors des études supérieures, en multipliant les passerelles entre les filières, en travaillant la question de l’orientation dès la 4e et en augmentant le nombre de places dans des filières comme celles des BTS et IUT.

L’accès effectif aux choix d’orientation sera facilité. L’accent sera mis sur leur accès au logement étudiant qui sera développé massivement, sur les mobilités avec par exemple l’incitation des régions pour développer la gratuité des transports en commun et l’accès aux équipements et aux réseaux numériques performants.

Près d’un jeune actif sur cinq âgé de 20 à 24 ans est sans emploi. Que comptez-vous mettre en place pour lutter contre le chômage des jeunes ?

Anne Hidalgo : L’accompagnement garanti vers l’emploi, la qualification et l’autonomie seront un pilier de notre politique jeunesse. Nous nous appuierons sur l’apprentissage en le généralisant à tous les niveaux et à toutes les filières, pour que l’alternance devienne la règle alors qu’elle ne concerne que 7% des formations actuellement.

Je souhaite une contractualisation avec les entreprises qui permette aux enseignants d’organiser de manière souple les alternances entre le temps scolaire et le temps en entreprise. Je porte l’ambition de passer de 38% à 60% d’une classe d’âge diplômée de l’enseignement supérieur. Je lancerais également quatre odyssées industrielles centrées sur l’économie du vivant et la transition écologique qui créeront des centaines de milliers d’emplois qualifiés, attractifs et valorisants.

Enfin, la dotation jeune de 5.000 euros versée à tout jeune de 18 ans aidera à la réalisation de projets personnels et professionnels, comme la création d’entreprise, la mobilité nationale et internationale, l’installation dans un logement ou encore l’obtention du permis de conduire qui permet d'accéder plus facilement à l’emploi.

Quelles mesures comptez-vous mettre en place pour favoriser la mixité sociale dans l’enseignement supérieur ? Et notamment dans les filières les plus sélectives ?

Anne Hidalgo : Aujourd’hui les 10% des écoles les plus sélectives sont trustées à 79% par des étudiants favorisés,

dont les parents sont cadres ou enseignants, alors qu’ils ne représentent que 23% des jeunes d’une génération.

Pour y remédier, je supprimerais Parcoursup qui participe à la reproduction des inégalités et à la marchandisation de l’enseignement supérieur et de la recherche, au profit de règles justes, humaines et transparentes d’accès à l’enseignement supérieur.

Je demanderais d’anonymiser les lycées d’origine, j’exigerais des établissements la transparence des critères d’évaluation des candidatures et de nouvelles places dans les filières tendues seront créées.

En amont, je pense qu’il faut penser la mixité sociale dès le collège. Ainsi, je veux mettre fin aux "collèges ghettos", avec un plan mixité par département, en y associant tous les acteurs (enseignants, parents et associations) qui participent à la définition des mesures les plus adaptées à leur territoire, comme la modification de la carte scolaire, secteurs multi-collèges notamment.

Pourquoi interroger les candidates et les candidats à la présidentielle 2022 ?

Début 2022, l’Etudiant a adressé un questionnaire aux candidates et candidats en lice à l’élection présidentielle de 2022. Dans un souci d’égalité de traitement mais aussi au vu du nombre d’exceptionnel de candidats déclarés - plusieurs dizaines - la rédaction a décidé de publier uniquement les réponses des candidats ayant réuni les 500 parrainages.

Évidemment, les convictions des électeurs et les électrices les plus jeunes, dépassent les seules questions liées à la jeunesse, comme le démontrait récemment notre sondage L'Etudiant/Harris Interactive. Mais fidèle à sa ligne éditoriale, ce sont sur les thèmes de l'orientation, de l’égalité des chances, de la précarité et des réformes de l’éducation que l’Etudiant a décidé d’interroger les prétendantes et prétendants à l’Élysée.

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