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Madame « la » ministre de la réforme !

publié le 28 mai 2007
6 min

Des dossiers à l’action de terrain


Depuis le 18 mai, elle mène ses journées au pas de charge. Le samedi soir à La Cité des sciences, puis lundi, en investissant son ministère (rue de Grenelle et rue Descartes), avant de filer à Bruxelles le lendemain. Ensuite elle enchaîne les rendez-vous avec la CPU, les syndicats étudiants et enseignants, les recteurs, les chercheurs sans oublier les réunions publiques dans sa circonscription des Yvelines. « Je suis une femme d’action », avoue-t-elle dans sa biographie (1). Certains disent qu’elle est la version féminine, mais en plus chic et en plus versaillaise, du chiraquien Jean-François Copé. Présente, comme lui, sur bien des fronts, énarque, le verbe facile, une belle mécanique intellectuelle ! « Pour discrète qu’elle fut dans son cheminement, elle n’a pas moins bien mené sa barque que lui », souligne un adversaire de gauche à la région Île-de-France. Déterminée. Ex-conseillère de Jacques Chirac (2), son mentor, après avoir fait ses classes sept ans durant au Conseil d’État, elle est parfois qualifiée de « députée des Yvelines venue directement en taxi de l’Élysée ! La circonscription était imperdable ».


Organisation et rigueur, le profil d’une « bosseuse »


Autant de qualités éprouvées alors que, diplômée de HEC en 1988, elle prépare l’ENA en cachette de ses proches. Sortie deuxième de sa promo, elle entre comme auditeur au Conseil d’État, et y goûte l’indépendance d’esprit. « Elle apprend vite, souligne une consœur de l’époque, avec la volonté d’aller au bout. Elle ne lâche rien. » Très souvent, elle bûchait les sujets sur place, alors qu’elle avait la possibilité de travailler à domicile. « Elle avale vite ses dossiers, confirme un collaborateur. Elle se fait briefer mais rédige elle-même sa propre synthèse. Elle cherche à donner du sens aux notes techniques qu’on lui transmet. » À l’opposé d’un(e) technocrate, elle imprime sa marque. Un peu « businesswooman », elle tient à sa vie de famille avec ses trois enfants.

Un style « interactif » au ministère

Elle pense, agit, réagit au quart de tour. Peu étonnant pour celle qui, passionnée de nouvelles technologies, a initié Jacques Chirac aux plaisirs d’Internet. Il faut la suivre, selon des fidèles. Mais elle a le sens du travail collectif. À sa première réunion de cabinet, elle a insisté sur son souci d’œuvrer avec des traqueurs d’idées et non de simples gestionnaires, même si elle sait « qu’un sou est un sou ! ». Son équipe est prévenue, elle devra travailler aussi avec l’administration et non pas « de façon disjointe », comme par le passé. La ministre peut être une locomotive. Dans la fête de fin de promo de l’ENA, elle a entraîné dans son sillage d’autres élèves, montant un groupe de chanteurs qui se sont produits sur la scène de l’école. « Un goût de la sociabilité alliée à l’efficacité », résume Arnaud Teyssier, président des anciens élèves de l’ENA.

Solide, obstinée et difficile à démonter


Anecdote révélatrice. Se trouvant enceinte, alors qu’elle était au Conseil d’État, elle a dû montrer sa fermeté face à son président, tenté de lui faire parvenir des dossiers jusqu’à la maternité. « Elle se bat, mais n’écrase pas ! raconte une camarade de promo de l’ENA. Elle ne fait pas des coups tordus, en douce. » Combative, donc, elle a su ferrailler sur les plateaux télé avec Bruno Julliard, patron de l’UNEF, pour défendre, en 2006, le CPE auquel elle croyait. Elle a su également monter au créneau à l’Assemblée (3). Elle n’a jamais eu peur de dire ce qu’elle avait à dire, ni de défendre son pré carré. Il y a quelques jours encore, elle a réussi à obtenir que le secteur « Espace » soit rattaché à son maroquin Recherche. Au grand dam d’autres prétendants. « Elle compte bien prendre toute sa place de ministre de plein exercice ! » observe-t-on. Avis à ses collègues !

Un rapport direct, aisé


« Son sourire n’est pas de façade ! » soulignent ses condisciples de HEC. Elle a appris à convaincre, voire à charmer les foules. « J’aime ces salles polyvalentes, remplies
de personnes parfois conquises, parfois indifférentes, parfois hostiles », dit-elle. Même sens du contact dans la relation interpersonnelle. « Le jour où elle m’a donné son numéro de portable, elle a pris un bout de bristol dans son sac et a indiqué “Valérie” et non pas “Valérie Pécresse”. C’est une façon cordiale d’établir les relations avec les gens, raconte un socialiste yvelinois. Si elle a des idées bien arrêtées, elle sait écouter l’autre. » « Ni dogmatique, ni sectaire », ajoute le philosophe Luc Ferry, qui a travaillé avec elle (4). Elle a la fibre de l’université et de la recherche, son père est prof à Dauphine. En outre, elle rêve de faire du plateau de Saclay un MIT à la française. Nommée pour agir, on peut déjà la créditer de parvenir à éviter deux écueils : la réforme ultra-libérale et l’immobilisme.



(1) Être une femme politique… c’est pas si facile, L’Archipel, janvier 2007. Voir aussi le chapitre « leaders politiques » dans HEC, l’excellence européenne, Le Cherche Midi, mars 2007 (et voir www.valeriepecresse.net).
(2) Chiraquienne, elle a été désignée par Nicolas Sarkozy porte-parole de l’UMP en 2004.
(3) Elle a notamment proposé deux lois sur les stages en entreprise : l’une visant à en moraliser la pratique (14 mars 2006), l’autre visant à les rendre obligatoires en licence (28 juin 2006). Consulter www.assemblee-nationale.fr.
(4) Elle a participé au débat sur l’école en 2003 et s’est impliquée dans la réforme Fillon sur la recherche en 2005. Elle a aussi coorganisé la convention UMP sur l’enseignement supérieur et la recherche le 4 octobre 2006.

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