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Bolewa, en L3 de droit : « Pourquoi j’ai décidé de squatter Place des Vosges à Paris»

publié le 06 novembre 2009
1 min

Depuis Samedi 31 octobre, une vingtaine de squatteurs occupe un hôtel particulier en plein cœur de Paris. Les trois quarts d’entre eux sont étudiants, comme Bolewa Sabourin, en troisième année de licence de droit à l’université de Paris 1.

Bolewa a enchaîné et même cumulé les p'tits boulots depuis l'âge de 17 ans. Pas de quoi s’offrir un hôtel particulier Place des Vosges à « La Marquise, où est née la marquise de Sévigné », souligne-t-il. C’est pourtant là qu’il habite, avec une quinzaine d’autres étudiants et quelques jeunes salariés, membres de Jeudi Noir qui s’autoproclame « collectif des galériens du logement ». L’étudiant en troisième année de licence de droit à Paris 1 squatte. Et passé le « cas de conscience » qu’il avoue avoir éprouvé au début, « à force de baigner dans le droit », Bolewa s’est résolu à cette solution « par nécessité ».

Pas de soutien familial ni de caution pour louer un appartement
Lassé de vivre au milieu des couples instables formés par son père, le jeune homme l’a quitté à 17 ans. Et ne le voit plus depuis. Côté maternel, aucun soutien n’est envisagé non plus. Depuis ses 13 ans, Bolewa n’a plus parlé à sa mère, restée en Martinique. Modèle pour des photos, animateur en centre de loisirs et prof de danse dans un centre d’animation, le tout jeune homme parvient alors à gagner plus de 2000 euros par mois. « Je n’avais pas de caution, alors je vivais à l’hôtel. Dès que j’ai été étudiant, j’ai fait des demandes pour avoir une chambre en cité universitaire, mais je n’en ai jamais obtenu », explique-t-il.

Un accident de travail le fait opter pour le régime salarié
Après le bac, le lycéen tente maths Sup mais renonce à poursuivre en maths Spé. Il est ensuite reçu au concours du CNAM pour une formation d’ingénieur en alternance. Au bout de six mois, découragé de ne pas trouver d’entreprise, il arrête. Un accident lors de son trajet domicile-travail, au centre de loisirs où il est animateur, l’oblige à passer du régime étudiant au régime salarié pour pouvoir bénéficier d’un arrêt de travail de trois mois. Le jeune homme s’inscrit ensuite en fac de droit. Ce régime lui permet d’avoir moins de cours en amphi et rend les TD facultatifs. Rétabli, il danse alors 14 heures par semaine, « entre les cours et l’entraînement avec ma compagnie Loba, qui fait des spectacles dans de petites salles parisiennes et en province », précise l’étudiant. Bolewa obtient de bons résultats. Il est alors hébergé gracieusement depuis un an au domicile parisien des parents d’une amie. Jusqu’à ce que sa route croise celle d’un militant de l’association Jeudi Noir.

Premier squat fin août 2009
« C’était fin août dernier lors d’un débat à l’Université d‘été du MJS [Mouvement des jeunes socialistes] à La Rochelle. Un type de Jeudi Noir a lancé un appel aux étudiants qui ne savaient pas où se loger », se souvient-il. Besoins et convictions se croisent alors pour Bolewa, qui se sent prêt pour cette nouvelle forme d’engagement militant. Le lendemain de cette rencontre, le jeune homme s’installe dans le squat ouvert par l’association au n°14 du passage de la Bonne graine, dans le 12e arrondissement de Paris, avec une quinzaine d’étudiants et une poignée de jeunes salariés précaires. « C’était une vraie Cité U ! Les trois quarts d’entre nous étaient étudiants, raconte Bolewa. Mais nous savions que nous devient quitter les lieux mi-novembre au plus tard, parce que l’immeuble serait réhabilité pour devenir un foyer du genre Sonacotra. Alors, nous avons cherché un autre endroit et trouvé cet immeuble Place des Vosges.» L’étudiant va d’un squat à l’autre, le temps d’aménager le prochain. « Un squat, c’est compliqué. On ne peut pas juste arriver et payer un loyer. Il faut remettre l’eau, rendre les lieux habitables, faire le ménage… On met en place un système de cotisation pour les chaudières chauffages d’appoint, on change les serrures… », explique-t-il.

Des soutiens politiques, de la droite au NPA
L’occupation de l’hôtel particulier de l’une des places les plus chères de Paris fait grand bruit depuis le 31 octobre. Elle relance la problématique des logements inhabités – comme ce serait le cas depuis plusieurs années pour « La Marquise » - et des difficultés des étudiants et travailleurs précaires à se loger dans la capitale. Pour Bolewa, « depuis l’occupation, les soutiens politiques de la droite au NPA [Nouveau parti anti-capitaliste] ont afflués. Et l’avantage, c’est que nous ne pourrons pas être expulsés comme ça. » Dans l’après-midi du 5 novembre l’huissier est pourtant passé. « Simplement pour faire l’état des lieux du bâtiment et compter les habitants », rassure l’étudiant. Et si Bolewa dort peu, c’est parce qu’il enchaîne la fac et les cours de danse qu’il dispense tous les soirs. Mais le jeune homme de 24 ans estime pouvoir dormir tranquille jusqu’au printemps. D’ici là, il espère bien obtenir une réponse positive à sa demande de studio en HLM. De quoi entamer sereinement son Master de Sciences politiques à l’automne prochain. Après un hiver dans les pas de la marquise de Sévigné.

Isabelle Maradan
6 novembre 2009

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