Décryptage

Lutte contre le bizutage : "Vous avez le droit de dire non"

REA-Payant
Depuis 2018, le ministère de l’Enseignement supérieur a mis en place une charte pour assurer le bon déroulement des journées d'intégration. (Illustration) © PLANET Pix/ZUMA-REA
Par Pauline Bluteau, publié le 07 octobre 2019
5 min

Depuis la rentrée, plusieurs débordements ont eu lieu lors de soirées d’intégration. Malgré l’interdiction, le bizutage reste d’actualité et, chaque année, des étudiants en sont victimes. Quels sont les dispositifs mis en place ? Sont-ils suffisants ? L’Etudiant fait le point.

En octobre 2017, une dizaine d’étudiants de l’école des Arts et Métiers à Angers (49) avaient été tatoués avec une cuillère brûlante. En septembre 2018, 250 étudiants de l’IFSI (institut de formation en soins infirmiers) de Toulouse (31) ont été violemment humiliés pendant plus d’une heure. Cette année encore, plusieurs week-ends d’intégration (WEI) ont également mal tourné. Dernier drame en date : un étudiant en pharmacie de l’université de Rouen (76) est décédé au cours d’un WEI en Belgique. L’enquête est toujours en cours.
Des événements qui font réagir les familles mais aussi les associations, les établissements et le ministère de l’Enseignement supérieur. Selon eux, si les mentalités évoluent dans le bon sens, la prévention doit rester une priorité.

Informer, prévenir et contrôler

C’est ce qu’explique Clotilde Marseault, chargée de mission Vie étudiante à la CPU (conférence des présidents d’université). D'après elle, pour les établissements, la prévention est devenue une nécessité, surtout que les présidents d’université engagent leur responsabilité en cas de dérives. "En général, ils savent ce qu’il se passe sur leur campus. Certains préfèrent même que les journées d’intégration se déroulent au sein de l’établissement pour éviter les débordements. Il y a de moins en moins de laisser-aller à ce sujet."

Mais informer directement les étudiants sur leurs droits et les risques encourus est tout autant nécessaire, car les associations d'étudiants responsables de l'organisation de ces événements se renouvellent chaque année. "Le dialogue avec les associations est primordial, elles ont besoin d’être accompagnées toute l’année", estime Clotilde Marseault. "Il suffit qu’il y ait un nouveau BDE, moins précautionneux, pour que l'on glisse vers de nouvelles dérives. On doit sans cesse rester sur nos gardes", explique Patricia Fournier, responsable de la vie de campus à Centrale Supélec.

Des événements de plus en plus encadrés

Depuis octobre 2018, le ministère de l’Enseignement supérieur a donc mis en place une charte pour assurer le bon déroulement des "événements festifs et d’intégration des étudiants". "Dès qu’on organise une soirée, il faut signer la charte en précisant le lieu, l’heure, le nombre de personnes présentes, les activités prévues… Tout doit être validé par l’administration avant d’être déposé au président de l’université", explique Maëlle Saillour, membre du du BDE (bureau des étudiants) de l’IUT Paris Descartes.
Lors de la soirée, des référents sont également présents pour éviter les débordements. À l’université de Lille, les étudiants suivent au préalable un module pour pouvoir organiser des "soirées responsables". "Il doit y avoir au moins un responsable par association et par soirée, c’est obligatoire", insiste Sandrine Rousseau. La vice-présidente de l’université de Lille a également ajouté une formation sur les violences sexistes et sexuelles pour les associations étudiantes.

Pas assez de sanctions

Malgré tout, le message n’arrive pas toujours aux oreilles des premiers concernés et les débordements éclatent.

Comme l’a expliqué la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, le 2 octobre dernier : "Vous avez le droit de dire non, de dire stop. On peut s’amuser et créer autant de souvenirs mémorables sans se mettre en danger ou risquer sa santé ou sa vie."

C’est aussi le message que souhaite faire passer le comité national contre le bizutage qui a relancé, cette année encore, sa campagne de prévention pour rappeler les sanctions auxquelles s'exposent les auteurs de bizutage. "On appelle cela de la barbarie, il faut que la loi soit appliquée, trop peu de chefs d’établissement saisissent le procureur de la République, les sanctions sont insuffisantes", s’insurge l’association.

Un avis partagé par la responsable à Centrale Supélec : "Il faut une prise de conscience des jeunes grâce à des sanctions fortes comme l’exclusion définitive des auteurs. Ce n’est pas aux victimes de changer d’établissement, comme c’est malheureusement souvent le cas aujourd’hui…"
Si vous vous sentez concerné(e), n’hésitez pas à contacter les associations, à en parler à votre établissement ou à déposer plainte.

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