Reportage

Nouveau bac : dans les coulisses du lycée Montaigne à Paris

Par Thibaut Cojean, publié le 13 septembre 2019
8 min

Episode 1/5. Tout au long de l’année, l’Etudiant vous emmène dans différents lycées de France pour comprendre comment le nouveau bac est mis en place. Pour ce premier épisode, rendez-vous dans les beaux quartiers de Paris, au lycée Montaigne, l’un des rares à proposer toutes les spécialités à ses élèves.

Dans les couloirs pavés et silencieux du lycée Montaigne règne encore une ambiance de rentrée. Le soleil de début septembre perce les fenêtres grillagées et le toit de la verrière ; un ballon de basket résonne dans la cour. Quelques secondes après la sonnerie, des élèves souriants sortent des classes et parcourent en chahutant les longues allées garnies de colonnes. Une semaine après la rentrée, l’énergie des premiers jours reste palpable.

300 élèves de première découvrent le nouveau lycée

Parmi les quelques 1700 élèves de l’établissement, allant de la 6e à la prépa, un peu plus de 300 découvrent la toute nouvelle formule du lycée. Ils sont rentrés dans l’une des neuf classes de première générale que compte le lycée.

Situé en plein cœur du 6e arrondissement de Paris, juste en face du jardin du Luxembourg, Montaigne est l’un des plus grands et des plus anciens lycées de la capitale. Ici, toutes les spécialités du nouveau bac général sont proposées. Un atout pour les élèves, qui ont pu choisir leurs matières en fonction de leurs préférences. "J’ai pensé que si on allait avoir 12 heures de spécialités par semaine, ça devait être des choses que j’aime beaucoup", témoigne Martina, qui suivra cette année les spécialités histoire-géographie, géopolitique et sciences politique, SES et numérique et sciences informatiques (NSI). "Même si je ne sais pas exactement où je veux aller après le lycée, je prends des matières dont je profiterai", poursuit-elle. Ainsi, son orientation dépendra notamment de "ce [qu’elle va] aimer cette année".

Une stratégie partagée par Antonin. Lui aussi suivra les spécialités SES et histoire-géographie, ainsi que langues, littératures et cultures étrangères (LLC) en italien. "C’est un choix personnel, parce que j’arrive beaucoup mieux à travailler des choses qui me plaisent, explique-t-il. Quand quelque chose me tient à cœur, je suis vraiment motivé et j’ai de meilleurs résultats."

Toutes les spécialités disponibles, 53 combinaisons demandées

Le lycée propose toutes ces spécialités de manière indépendante. Aucun menu de trois disciplines n’a été préparé en amont et les élèves ont pu construire librement leur parcours. De fait, ils ont demandé 53 combinaisons de spécialités au total. Si pour certains, ce choix se basait principalement sur leurs préférences, d’autres comme Jules, inscrit en SES, histoire-géographie et mathématiques, pensent déjà à leur orientation. "Je me suis dit que c’était important de garder des maths parce qu’il n’y en a plus dans le tronc commun, raisonne le jeune homme. Et comme les SES et l’histoire étaient mes matières préférées, je les ai gardées. Après, je pourrai faire pas mal de choses, comme du commerce ou du droit. J’ai pris le plus généraliste possible pour ne me fermer aucune porte."

En salle des profs, la motivation des élèves frappe les enseignants. "Le point positif, c’est que les élèves qui suivent ces enseignements de spécialités les ont choisis, et j’étais assez surprise de voir leur motivation", témoigne Isabelle Driay, prof de maths et de NSI. Pour assurer l’enseignement de cette nouvelle spécialité, tellement demandée par les élèves que certains ont dû en être dissuadés, elle et trois de ses collègues suivent une "formation lourde" à l’université : trois semaines pendant les vacances d’été, et deux autres après la rentrée. Mais ils ne sont pas les seuls à avoir sacrifié une partie de leur été. "Certains élèves qui étaient un peu justes ont bossé pour les spécialités pendant les vacances, explique-t-elle."

Avec 53 combinaisons de spécialités pour neuf classes de première, la question des emplois du temps était forcément centrale. Et du côté des élèves, la plupart retiennent, comme Stéphane, qu’ils sont "plutôt chargés". "On finit presque tous les jours à 18h, confirme Louise. Et on a une grosse classe de 36 personnes avec lesquelles on n’est presque jamais en cours." La réforme a en effet entraîné la quasi-disparition de la classe au profit du groupe. Les semaines des élèves sont aménagées au cas par cas, selon les classes et les spécialités, et souvent émaillées de trous, aussi considérés comme des périodes de travail personnel.

Emplois du temps chargés et discontinus

Si ces longues pauses ne plaisent pas outre mesure, changer régulièrement de groupe ne semble pas poser de problème. Stéphane, qui ne connaît pas encore beaucoup de personnes dans sa classe, retrouve ainsi les élèves qu’il connaît en spécialité. "La notion de classe n’est plus vraiment là, confirme Jules, mais ça ne me dérange pas tant que ça, je trouve que c’est mieux de changer parce qu’on rencontre d’autres élèves."

L’organisation de la semaine n’était pourtant pas chose aisée. "Cela a été compliqué, il y a eu beaucoup de réunions, mais l’administration a réussi à mettre en place des emplois du temps qui tiennent, c’était un peu notre inquiétude au départ", souffle Isabelle Driay. "L’organisation de l’année s’est bien passée même si sa mise en place a été difficile", abonde Katia Rotiroti.

Cette année, cette professeure d’italien aurait pu accueillir des élèves venant de lycées extérieurs à Montaigne, puisqu’il est le seul établissement de Paris à proposer la spécialité LLC italien. "Mais entre le moment où on a eu l’accord de l’ouverture de la spécialité et l’organisation inter-établissements, c’était trop compliqué." Le partenariat devrait donc être repoussé à l’année prochaine. En attendant, les élèves de Montaigne commencent sereinement une année rythmée de matières qu’ils ont eu la chance de choisir. "On est privilégiés, reconnaît Louise. Et on n’est pas nombreux dans la classe d’italien, on va peut-être faire des voyages."

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