Reportage

Blocus de lycées contre le FN : "Mais que font les adultes ?"

Le lycée Voltaire, parmi d'autres établissements parisiens, a été bloqué ce jeudi matin.
Le lycée Voltaire, parmi d'autres établissements parisiens, a été bloqué ce jeudi matin. © Paul Conge
Par Laura Taillandier, Paul Conge, publié le 27 avril 2017
1 min

"Immigration = richesse de la nation", "Le F-Haine, pas la peine", "Non au racisme", mais aussi "Ni FN, ni Macron"... Les pancartes fleurissent devant la petite vingtaine de lycées parisiens mobilisés contre les résultats du premier tour de l'élection présidentielle. Retour en images sur un mouvement qui peine encore à rassembler.

Le mouvement ne fait pas grand bruit chez les lycéens. Pourtant, dans le XVe arrondissement à Paris, les sons de klaxons et les cris montent boulevard Pasteur devant le lycée Buffon. "Non. Je ne veux pas commencer ma vie active sous une présidence de Marine Le Pen", assène Coline, jambes croisées devant son établissement, pancarte sur les genoux. Au côté d'une cinquantaine d'élèves, elle participe pour la deuxième journée consécutive à un sit-in devant son établissement pour protester contre la présence du FN au second tour de l'élection présidentielle. 

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Des irréductibles ? Dans l'académie de Paris, seule une petite vingtaine de lycées sont mobilisés jeudi 27 avril 2017, dont quatre totalement bloqués. Et dans le reste de la France "quelques rares mobilisations" sont dénombrées par le ministère de l'Éducation nationale. "Contrairement à 2002, il n'y a pas eu de choc à l'annonce des résultats où les gens pleuraient devant les écrans. Le vote pour l'extrême droite est ultra banalisé aujourd'hui. On savait que Marine Le Pen allait passer au premier tour", analyse Billie, assise en tailleur devant son lycée.

"Où sont les autres ?"

"Que font les adultes ?", s'insurge Ambroise. Le lycéen se retourne l'oeil grave : "On ne compte pas que sur les jeunes. Il faut que le mouvement s'étende ! Je ne comprends pas que ce soit, à nous lycéens, qui ne votons pas, de lancer cette mobilisation... Où sont les autres ?"  "Ce n'est pas possible de ne rien faire, de laisser faire sans rien dire...", affirme Billie. Les élèves du lycée Buffon espèrent "un effet domino" dans les autres établissements de la capitale et des grandes villes de France.

Au lycée Voltaire : "On a une conscience politique"

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"Ni Marine ni Macron, ni patrie ni patron." Le mot d'ordre est peint à la bombe sur la banderole suspendue au-dessus des portes du lycée Voltaire. L'entrée est bouchée par un amas de poubelles. Une centaine de lycéens y font le pied de grue depuis 8 heures du matin dans une ambiance plutôt sereine. "Macron, ce type est une illusion. Les gens votent pour lui par dépit et par défaut. Le Pen, c'est le racisme. Son programme sur les migrants est hallucinant", résume Ulysse, 15 ans, dans son gros manteau noir.

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Devant ce lycée du XIe arrondissement, rompu aux blocus, quelques professeurs veillent au grain. Une vingtaine de lycéens sont cagoulés. Des fumigènes colorés sont dégoupillés ci et là. Un des agitateurs finit par vider un extincteur en pleine rue, la couvrant d'écume. Pour le spectacle. "Le blocus, le fait d'attirer les médias, c'est encore le seul moyen pour nous de nous exprimer, et de montrer qu'on est contre le FN. Car à 15 ans, on n'a pas encore le droit de vote", fait remarquer Valentin, capuche bordeaux et pancarte "Soyons ingouvernables" à la main.

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"On ne peut pas voter alors qu'on a une conscience politique", s'exaspère à son tour Juliette, toute vêtue de noir, un keffieh autour du cou. Cette lycéenne, qui termine sa première littéraire, rappelle que certains candidats voulaient ouvrir le droit de vote aux jeunes de 16 ans. "On va avoir ce gouvernement jusqu'à nos 22 ans. C'est bien malheureux de ne pas aller en cours, on a le bac à la fin de l'année. Mais c'est le seul moyen de nous faire entendre."

Au lycée Paul-Valery : "Le Pen élue, je devrai quitter le pays"

Le blocus du lycée Paul-Valéry, dans le XIIe arrondissement, n'aura duré qu'une petite heure. Le barrage filtrant a laissé passer les élèves de terminale, pour leur bac blanc, et de première, qui avaient cours. À 11 heures, Nino et Helena, papotent encore devant les portes.

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L'une Géorgienne, l'autre Brésilienne, toutes deux sont en classe d'accueil, un dispositif qui permet à des élèves étrangers de suivre une scolarité en France. Les élections les affectent personnellement. "Si Marine Le Pen est élue, je devrai quitter le pays, déplore Nino, 16 ans, arrivée en France en 2014 avec sa famille. Je n'ai pas le statut de réfugié." Helena lui emboîte le pas : "Pour qu'elle n'arrive pas au pouvoir, on n'a pas grand-chose d'autre à faire que de bloquer le lycée. Cela montre qu'on a envie de changer. C'est important de faire cela quand on est jeune."

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