Témoignage

Violence à l’école : l’avis de lycéens, descendus dans la rue

Par Marie-Anne Nourry, publié le 18 février 2010
5 min

Des agressions d’élèves au sein des établissements, des professeurs qui pratiquent leur droit de retrait et réclament plus de sécurité, des syndicats d’élèves qui lancent une « votation lycéenne », des « Etats généraux sur la sécurité à l'école » annoncés par le ministre de l’Education nationale… Depuis le début de l’année, le malaise au lycée est au cœur du débat national. Le 18 février 2010, les lycéens se sont joints aux enseignants d’Ile-de-France pour manifester contre la violence et les suppressions de postes de professeurs et de personnels éducatifs. Nous leur avons demandé leurs sentiments sur cette violence et les solutions qu’ils imagineraient pour y remédier. 


manifestation lycéenneLucas Lemore, Merouane Radja, Lycée Mozart, Blanc-Mesnil (93)
« C’est la forte motivation de nos profs qui nous a poussés à les accompagner à la manifestation du 18 février. Notre établissement compte 800 lycéens mais c’est toujours le même petit groupe d’élèves qui participe aux manifestations. Pourtant, nous pensons qu'il est essentiel de s’engager pour faire bouger les choses ! L’installation de caméras de surveillance dans l'enceinte du lycée nous donne l’impression que l’on ne nous fait pas confiance. Pendant une période, la police montée faisait des rondes devant le lycée, c’est ridicule ! Il vaudrait mieux filtrer les élèves à l’entrée, comme ça il y aurait moins de problèmes. Donner un badge à chaque lycéen pourrait être une solution ! »

Brahim et Kevin, Lycée Guillaume Apollinaire, Thiais (94)
« L’agression au cutter, dans le gymnase près de notre lycée, n’aurait jamais eu lieu si nous avions eu plus de surveillants. Des caméras n’auraient servi à rien car le temps de prévenir la police, il aurait été trop tard pour faire quoi que ce soit. Les surveillants ont l’avantage de connaître tous les élèves et ils peuvent identifier immédiatement les jeunes qui ne sont pas inscrits au lycée. Nous sommes pour la « tolérance 0 » car cette agression n’est pas la première : trois jours avant, la CPE (conseillère principale d’éducation) avait été agressée. Il ne faut plus étouffer les affaires sinon c’est l’escalade de la violence, principalement à cause des bandes rivales qui veulent toujours se venger. Nous voulons des vrais gens, pas des caméras ! »

Chloé et Myriam  lycée Henri Bergson, Paris (75)
« Notre lycée est dans Paris mais il est réputé pour être violent. Nous sommes venues manifester aux côtés de nos profs pour montrer notre solidarité. Même si nous sommes en terminale et que le lycée c’est bientôt terminé, nous sommes convaincues qu’il est important d’agir au nom des futures générations. La majorité des lycéens perçoivent les mesures actuelles contre la violence comme de la provocation. Plus que tout, ils ont besoin d’attention ! Nous savons que les profs ne peuvent pas tout faire mais c’est par des surveillants qu’ils doivent être aidés, pas par des policiers. A l’extérieur du lycée, la situation est différente : c’est plutôt rassurant de voir la police faire des rondes. »

Léo Blouche, Hussan El Karout et Halima Sissoko, lycée Paul Robert, Les Lilas (93)
« Un élève s’est récemment fait tabasser par plusieurs jeunes devant notre lycée et il a fini en sang. Des journalistes sont venus à cette occasion pour une émission de télévision, et une équipe d’intervention mobile s’est même déplacée pour les caméras. Nous ne l’avions jamais vue avant, et rien n’a été fait par la suite ! Ce que nous voulons, c’est simplement pouvoir aller en cours tranquillement. Il y a une grille devant notre lycée car une voiture bélier avait percuté la porte d’entrée il y a quelques années. Des caméras ont ensuite été installées mais c’est de vrais surveillants dont nous avons besoin. Ils ne sont malheureusement pas assez nombreux pour nous aider, notamment à la sortie. »

Réva, Lycée Hector Berlioz, Vincennes (94)
« Les mesures de sécurité actuelles ne font qu’attiser la haine. La solution n’est pas dans un portique ou dans une caméra de surveillance mais dans la formation : je pense que les surveillants et les professeurs devraient être plus nombreux et recevoir une formation adaptée pour savoir comment réagir face à la violence. »

Toufike Mohamed, porte-parole de la FIDL (fédération indépendante et démocratique lycéenne)
« C’est complètement absurde d’installer des portiques dans les lycées. Imaginez la perte de temps le matin pour faire entrer 1 200 élèves ! Nous pensons que le combat contre la violence doit impérativement passer par le dialogue. A titre d’exemple, il faut multiplier le modèle des « élèves médiateurs ». Après une formation de 12 h, ces lycéens volontaires sont appelés pour régler des conflits mineurs… par le dialogue ! »

Articles les plus lus

Contenus supplémentaires

Partagez sur les réseaux sociaux !