Témoignage

Service national universel : "On est passé d’ado à adulte"

À Orcines dans le Puy-de-Dôme, 137 jeunes ont participé au SNU.
À Orcines dans le Puy-de-Dôme, 137 jeunes ont participé au SNU. © Photo fournie par le témoin
Par Pauline Bluteau, publié le 28 juin 2019
7 min

Pendant deux semaines, du 16 au 28 juin 2019, 2.000 jeunes de 15 et 16 ans ont participé à la première session du SNU (service national universel). Sport, activités culturelles, rencontre avec des associations… Les volontaires ont été très occupés et semblent déjà en redemander.

Après plusieurs mois d’attente et d’impatience : ils l’ont fait. Venant de 13 départements différents, 2.000 jeunes se sont portés volontaires pour effectuer le service national universel annoncé en octobre 2018. À Morbecque, dans le Nord, à Carpentras dans le Vaucluse ou encore à Orcines dans le Puy-de-Dôme, le constat est le même partout : le séjour n’a pas toujours été facile mais, à l’heure des séparations, personne n’a envie de mettre un terme à cette aventure. Retour sur ces deux semaines très intenses.

Un esprit d’équipe quasi instantané

Dès leur arrivée au centre, les jeunes se sont vite mis dans le bain. Car l’objectif du SNU était de former un groupe uni et solidaire. "Nous étions 23 jeunes à venir des Ardennes, on voulait à tout prix être ensemble dans les chambres et finalement on s’est retrouvé avec des gens qu’on ne connaissait pas. Avec le recul, c’était bien mieux comme ça, on a pu tous apprendre à se connaître", estime Bastien, 16 ans, qui a effectué son SNU dans le Puy-de-Dôme. "Ils ont tout de suite compris que l’esprit de cohésion les rendraient plus forts, confirme Philippe Destable, le directeur du centre. C’était notre objectif mais cela va au-delà de nos espérances. On n’imaginait pas que ce serait aussi rapide et aussi fort entre eux."
Un esprit d’équipe qui s’est en parti fondé sur les valeurs transmises par les animateurs. "On a beaucoup travaillé sur la démocratie en mettant en place des temps de rencontre tous les jours entre les jeunes pour qu’ils puissent parler de leur journée et de leurs difficultés, explique Brice Rochat, le directeur du centre de Carpentras. Ce qui a même poussé certains jeunes à la confidence."
À Morbecque aussi, l’objectif était de faire comprendre aux volontaires le sens des valeurs de la République. "Une fois qu’ils ont compris pourquoi on levait les drapeaux le matin, ce que signifiait la Marseillaise et ce qu'impliquait l'égalité, leur attitude a changé", estime Bernard Hameau. Tous les matins, un petit groupe présentait une valeur à l’ensemble des volontaires. "Cela permettait de les impliquer, confirme le directeur du centre. Un matin, nous avons évoqué le courage, c’était extrêmement émouvant, on ne s’y attendait pas."
Levée des couleurs tous les matins pour les volontaires du SNU.
Levée des couleurs tous les matins pour les volontaires du SNU. © Photo fournie par le témoin

Un cadre strict mais nécessaire

Cette cohésion a également été rendue possible par le cadre imposé par le SNU. "On n’avait pas le droit au téléphone portable. C’était super dur au début parce qu’on avait l’impression de retourner en maternelle, mais c’est comme cela qu’on a pu briser la glace entre nous. On s’est rendu compte qu’on avait plein de points en commun", assure Bastien. Une ambiance quasi militaire que les volontaires ont parfois eu du mal à comprendre. C’est le cas de Maëlia, 16 ans, originaire de Guyane. Si la lycéenne avait hâte de découvrir "ce côté militaire", elle ne s’attendait pas à autant de rigueur. "On n’est pas du tout habitué à tout cela, la première levée des couleurs était impressionnante."
Pour les chefs de centre au contraire, ce mélange de cultures était bénéfique. "J’étais dubitatif sur l’aspect militaire, mais leur organisation s’accorde très bien avec la sensibilité et les méthodes de l’éducation populaire, c’est très complémentaire", admet Brice Rochat. D’ailleurs, l’ancien proviseur a refusé de mettre en place des sanctions dans son centre. Dans le Puy-de-Dôme, le cadre était également très rigoureux : vouvoiement, discipline vestimentaire, ponctualité… Les volontaires ont dû y adhérer sans rechigner. "Il faut imposer un cadre, mais il faut l’appliquer intelligemment, complète le directeur d’Orcines. On essayait toujours de négocier avec eux, certains avaient besoin de sanctions quand d’autres préfèrent le dialogue. Le tout est de bien leur expliquer le sens de nos actions."

Des souvenirs plein la tête

Mais quel que soit le lieu de leur séjour, même si certains ont mis plus de temps à s’adapter, le bilan reste très positif. "Je ne regrette rien, tout s’est bien passé même avec nos tuteurs, on s’est très bien entendu", s’exclame Louis, 16 ans, originaire des Ardennes. Son meilleur souvenir : la journée jeux olympiques qui a permis à tout le groupe de mieux se connaître.
Car niveau activités, les volontaires ont été servis. Tous les jours un programme différent les attendait. "La randonnée jusqu’au temple de Mercure était très représentatif de l’esprit SNU : tout le monde s’est soutenu, il y avait beaucoup de solidarité parce que c’était très dur. À la fin, on était tous super contents de découvrir un paysage aussi magnifique", raconte Bastien. "Ce que j’ai préféré c’est la fête de la musique : on était tous ensemble, on a chanté, c’était comme une famille, cela prouve vraiment la force du SNU", raconte Maëlia.
Activité "survie" pour les volontaires du SNU 2019.
Activité "survie" pour les volontaires du SNU 2019. © Photo fournie par le témoin
Activité d'auto-défense pour les volontaires du SNU.
Activité d'auto-défense pour les volontaires du SNU. © Photo fournie par le témoin

Un gain de maturité

D’après les chefs de centre, le dépaysement géographique, familial et amical leur a permis de gagner en autonomie et en maturité. "On les a vu évoluer, ils ont fini par organiser eux-mêmes des activités comme le repas préparé entièrement par les Guyanais qui souhaitaient partager leur culture avec le reste du groupe", se rappelle Bernard Hameau. "On est passé d’ado à adulte parce qu’on a beaucoup appris sur nous-même, renchérit Bastien. Désormais, on a tous envie de s’engager. Certains volontaires avaient arrêté leurs études et le SNU leur a donné envie de retourner à l’école. Le SNU nous a marqués à vie." L’année prochaine, le lycéen s’est déjà engagé à présenter le service national universel aux collégiens et lycéens de sa ville.

"On voit qu’ils ont vécu quelque chose de très fort. Leur cohésion est extraordinaire, ils n’ont plus envie de partir", conclut le chef de centre du Vaucluse. D’ailleurs, dans le Nord aussi, les larmes ont commencé à couler en préparant les valises… Toute bonne chose a une fin.

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