Prompt engineer, psydesigner, data scientist… Découvrez les nouveaux métiers de l'IA
Avec l'essor de nouveaux logiciels tels que ChatGPT, MidJourney ou encore Dall-E, l'intelligence artificielle s’implante progressivement dans notre quotidien. Pour encadrer la conception de tels outils, ainsi que leur bonne utilisation, de nouveaux métiers se développent au sein des entreprises. Tour d'horizon.
Adrien estime avoir un "profil d'ovni". À 24 ans, cet étudiant en deuxième année d'école de commerce à Paris réalise son alternance au sein d'un cabinet de conseil en réalité virtuelle.
Son métier ? Prompt engineer. Le principe ? Poser les questions de la manière la plus optimale possible aux intelligences artificielles (IA) telles que ChatGPT afin d'obtenir les réponses les plus précises.
"Je leur indique comment bien rédiger leur requête"
Pour lui, l'arrivée de ChatGPT a représenté une véritable révolution. "Avoir une interface simple à prendre en main rend l'IA accessible à presque tout le monde." Résultat : aujourd’hui, c’est lui qui, sans formation d’ingénieur quelconque, forme ses collègues à l’utilisation du logiciel. "En tant que passionné de technologie, il me suffit de m'autoformer sur Internet pour apprendre à maîtriser l'outil", précise-t-il.
"J'explique ensuite à mes collègues à quoi ChatGPT peut leur servir dans leurs tâches quotidiennes : ce qu'ils peuvent et ce qu'ils ne peuvent pas demander à l'IA, détaille l'alternant. Pour mettre en forme les notes prises au cours d’une réunion, par exemple, je leur indique comment bien rédiger leur requête."
Exploitation de données
Si l'essor récent des modèles d'IA génératives a ouvert la voie à de nouvelles perspectives d'utilisation dans le cadre professionnel, l'intelligence artificielle a déjà été investie par les entreprises depuis plusieurs années.
"Avec l'arrivée de l'IA, de nombreux groupes ont eu pour ambition d'exploiter leurs données pour améliorer l'expérience des utilisateurs", illustre Guillaume Durand, responsable de service IA au sein d'une société du secteur financier.
En toile de fond d'un tel engouement s’est dessiné l'essor de nombreuses sociétés éditrices de logiciels d'intelligence artificielle à destination des professionnels.
Un intérêt ancré pour l’IA
En tant qu'ingénieur commercial spécialisé dans l'IA, Clément a pour rôle de vendre ces technologies aux entreprises. Diplômé en informatique de l'école polytechnique de Lausanne, l'ingénieur de 31 ans a ensuite complété ses études à HEC pour acquérir des compétences en vente.
Fort de cette double casquette technique et commerciale, Clément s'efforce d'expliquer aux clients le fonctionnement des IA. "Il faut savoir adapter son discours en fonction du client : cela demande, au-delà des connaissances techniques, de véritables compétences communicationnelles", détaille-t-il.
Des métiers déjà implantés…
Au sein des équipes qui conçoivent ces IA, le métier de data scientist s'est déjà beaucoup développé. C'est précisément le rôle d'Iris, ingénieure diplômée de l'école de statistiques de l'ENSAI de Rennes il y a un an.
Au sein du cabinet de conseil Sia Partners, la jeune femme de 26 ans est chargée de proposer aux entreprises des solutions innovantes pour automatiser certaines tâches. Selon elle, nombre de ces solutions s'appuient sur l'intelligence artificielle. "Cela permet d'éloigner nos clients des tâches répétitives", affirme-t-elle.
Plusieurs étapes se succèdent. "Nous recueillons les données qui serviront à entraîner l'algorithme d'IA, et nous en analysons les incohérences", étaye Iris. Au préalable, cette donnée a généralement été préparée par un data engineer, dont le travail consiste à bâtir le réservoir de données que le data scientist sera ensuite amené à interpréter.
… et d'autres encore nouveaux
Si la plupart des IA ne disposent pas d'interface intelligible pour le client, certains modèles tels que les agents conversationnels –comme ChatGPT– requièrent un temps de conception propre à la personnalité que prendra l'assistant en question.
Un autre rôle émerge alors : celui de psydesigner. Selon Jean-Luc Haurais, qui exerce ce métier au sein d'un cabinet de conseil, ce travail consiste à bâtir et former la personnalité de l'IA et le comportement qu'elle adoptera auprès de l'utilisateur. "Est-ce qu'elle s'exprimera avec un langage institutionnel ? Quel ton devrait-elle employer ? Nous déterminons tous ces paramètres", explique-t-il.
Des fantasmes, mais un secteur peu régulé
Les métiers de l'IA sont au cœur de tous les fantasmes. Comme celui de prompt engineer, qui a fait couler beaucoup d'encre après que l'agence américaine Bloomberg a publié, fin mars, une dépêche mentionnant à la clé une rémunération de 335.000 dollars par an.
Dans les faits, aucun diplôme ni formation ne permettent encore d'y accéder. "Si nous disposons de cursus préparant aux métiers de data scientist ou data engineer, nous n'avons pas encore imaginé de cours qui apprendraient à rédiger des prompts (les requêtes qu'on envoie aux IA, NDLR)", résume Christophe Picard, enseignant-chercheur à l'ENSIMAG de Grenoble.
Un métier comme celui-ci va-t-il s'implanter durablement ? Selon Guillaume Durand, "il est encore trop tôt pour le dire". Une chose est sûre, néanmoins : "Cette expertise sera précieuse dans les années à venir pour réfléchir à la façon d'intégrer ces IA génératives aux besoins particuliers de l'entreprise."