Quand jouer aux jeux vidéo devient un sport de haut niveau

No thumbnail
Publié le 11/04/2017 par TRD_import_Jean-SébastienLétang ,
Pour les pratiquants d'e-sport, les jeux vidéo, c’est du sérieux. Amateurs, semi-professionnels ou carrément pros, ces gamers passionnés jouent pour gagner. Ça tombe bien, il y a de plus en plus de compétitions. À la clé : l’honneur, l’argent et, pourquoi pas, le recrutement par une équipe.

Parmi les 34 millions de Français qui jouent aux jeux vidéo, ils sont seulement un peu plus de 2 % à participer à des compétitions. Si la proportion n’est pas encore impressionnante, cette discipline, nommée e-sport pour « sport électronique », explose. Certains tournois, comme ceux de la Paris Games Week ou du Lyon E-Sport, réunissent déjà des milliers de spectateurs. Dans certains pays, les compétitions remplissent des stades, et sont suivies en ligne par plusieurs millions de e-spectateurs. Un engouement qui incite de nombreux joueurs passionnés à se lancer, pour passer au niveau pro.

Ivresse de la compétition, bonheur de la victoire

C’est ce qu’a fait Majid, 23 ans, connu sous le pseudo Shneizel dans le monde du célèbre jeu de baston « Street Fighter », presque naturellement.  » J’allais aux événements sur ce jeu pour rencontrer les amis que j’avais pu me faire en ligne , se souvient-il. De fil en aiguille, j’ai pris goût à la compétition et à son ambiance unique, en tant que spectateur de grands matchs puis en tant que joueur. » Désormais, il prend part à un tournoi par mois en moyenne , et assure que « quand on y a participé une fois, cela devient une drogue ! On en redemande, et pour cela, il faut s’entraîner tous les jours. »

Pour Benjamin Passerieux, fan du jeu de football « Fifa », la transition vers l’e-sport s’est faite il y a un an. Aujourd’hui, on peut le retrouver sur des compétitions comme le Montpellier Esport Show ou l’Orange eLeague 1 et à des tournois en ligne où il peut gagner « un peu d’argent ». Selon lui, « quand tu joues à un jeu pour gagner, ce n’est pas la même sensation que pour le fun, l’esprit de compétition est là et tu te donnes à fond « .

Des heures d’entraînement acharné

Comme toute discipline de haut niveau, l’e-sport demande de l’investissement. Mais Benjamin gère : « c’est vrai que ça prend du temps, mais je suis soutenu par mon entourage dans cette voie , donc ça n’empiète pas sur ma vie. » Pour être au top, Majid, lui, joue deux heures par jour après le boulot, trois ou quatre heures quand il est en congés.  » Depuis que je suis en CDI, j’ai beaucoup de mal à m’entraîner et à me déplacer pour des compétitions, se désole-t-il. Je suis obligé de poser des RTT. » Difficile pour lui de concilier un travail chronophage et épuisant avec sa passion.

Sa détermination a cependant payé. Grâce à une performance lors d’un tournoi de grande ampleur, il a été repéré par Owly Six, une structure d’e-sport qui présente des équipes sur plusieurs jeux : « Ils m’ont proposé de les rejoindre et j’ai évidemment accepté ». Majid est aujourd’hui joueur semi-professionnel. « Ce n’est pas du tout simple de rejoindre une structure, surtout quand on est débutant, ajoute-t-il. Pour t’épauler financièrement, c’est très important , ça te retire un poids psychologique, ce qui te permet d’être plus concentré durant les tournois. »

Se faire repérer ou former son équipe

Dans le monde du sport électronique, l’équipe est un rouage central. De son côté, Valentine, e-sportive de 24 ans, a décidé de monter la sienne. Cette étudiante en jeux vidéo joue depuis dix ans à « Call of Duty », un jeu de tir à la première personne ou FPS. Elle a découvert l’e-sport il y a trois ans : « Je commence tout juste à rentrer dans la compétition, j’ai monté mon équipe de filles et nous venons de signer un contrat dans la structure Indiana Esport « .

Un contrat qui permettra à Valentine et ses coéquipières de devenir semi-professionnelles. Pour l’instant, elles jouent « le soir de 20 h 30 à minuit, et le week-end un peu plus », afin « d’essayer d’être la meilleure team de filles sur ‘Call of Duty' ». D’ailleurs, elle encourage les femmes à se lancer dans l’e-sport où elles sont encore peu nombreuses.

Les compétitions, comme ici à Lyon, se déroulent en public et sont diffusées en direct sur Internet. // © REA

Une bonne hygiène de vie nécessaire

La discipline a tellement le vent en poupe que même les clubs de sport traditionnels se mettent à recruter des gamers talentueux. C’est notamment le cas de la section e-sport du FC Nantes où Jérémy Girardot, 30 ans, travaille en tant que manager et coach de joueurs professionnels de FIFA. Selon lui, pour devenir un champion, « il est indispensable de jouer presque tous les jours durant plusieurs heures afin d’affûter ses réflexes, travailler sa maîtrise technique, approfondir sa vision de jeu ».

« Pour aller plus loin », renchérit-t-il, « il est également très important d’effectuer des séances de visionnages , de ses propres matchs comme de ceux de ses adversaires ». Et, comme dans tout sport, une bonne hygiène de vie est primordiale : « cela permet de maintenir une efficacité motrice maximale. Il est indispensable d’avoir une alimentation saine, de faire du sport, et d’avoir des cycles de sommeil réguliers suffisants. » Surtout quand on sait combien les week-ends de tournois peuvent être éprouvants, après plus de 10 heures intenses devant un écran.

De très rares professionnels

La plupart de ces efforts sont accomplis au nom de la passion. Aujourd’hui, très peu d’e-sportifs gagnent assez d’argent pour en vivre. Selon Robin Halimi, ancien joueur semi-pro sur le FPS « Counter Strike », aujourd’hui analyste et commentateur bénévole sur la chaîne de streaming dédiée au e-sport O’Gaming TV, « ‘ Sur Counter Strike’, seules quatre équipes en France sont ‘pros’ et peuvent dire : ‘J’en vis’. C’est très faible pour un jeu où certains joueurs ont dix ans d’expérience ».

« Pour certains, le jeu en vaut la chandelle et *parmi ces 20 joueurs, 10 touchent actuellement un salaire mensuel à cinq chiffres *et participent à des tournois aux sommes faramineuses en plus d’être considérés comme de vraies stars », complète-t-il. Pour le commun des joueurs, il y a de bonnes heures de fun en perspective, avec peut-être le rêve de parvenir un jour à ce niveau.

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer