Bavardage en cours : pas facile de s’arrêter

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Publié le 30/11/2012 par TRD_import_MariaPoblete ,

Pas simple de revenir sur des habitudes installées souvent depuis… la maternelle ! « Après ma décision de ne plus parler en cours, il y a deux ans, j’étais sûr que ça irait, que ça serait facile, raconte Nicolas, 18 ans, en BTS (brevet de technicien supérieur) banque. J’en ai bavé : je me sentais seul, coupé de mes potes.  » Il s’en est sorti grâce à un surveillant, devenu un ami. « Il avait eu les mêmes problèmes, ça m’a rassuré. Mais qu’est-ce que c’est compliqué de dire à son voisin ‘Tais-toi, j’écoute’ ! »

Pas naturel pour tout le monde…

« Je reconnais que c’est très difficile pour les élèves de se retenir de parler, admet Florence Ehnuel. » La maîtrise de soi n’est pas évidente. C’est d’autant plus une épreuve que, tout autour, ça continue de papoter ! La prof de philo compatit. « C’est héroïque, parce que c’est aller contre sa spontanéité naturelle et souvent contre le groupe. »

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Pas toujours simple de dire “Tais-toi, j’écoute !” à son voisin. Mais parfois salvateur.

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… mais ça vaut la peine d’essayer

Les bavards repentis sont les premiers à vanter les bénéfices de leur sevrage. Louise, inscrite en fac de psycho, a admis l’évidence : « Nous ne sommes pas à égalité face aux apprentissages, certaines bavardent ET enregistrent, moi, je ne garde rien ! En écoutant, je participe, en posant des questions, j’avance, je réussis, je ne suis plus larguée. « 

Pierre, aujourd’hui étudiant en design, a tiré profit, personnellement, presque égoïstement de son écoute attentive, après 15 ans de « bougeotte et de parlotte en cours » : « Le temps passe plus vite pendant les cours ! » Violette, 17 ans, en terminale ES dans un lycée parisien, a même une devise : « Bavarder, c’est rater. » À méditer… en silence.

L’avis de l’expert : « Le bavardage n’est pas anodin. C’est un appel »

Psychothérapeute et psychanalyste à Lyon (69), Joël Clerget est l’auteur de « Vivre l’ennui » (éditions Érès) : « Deux élèves qui bavardent sont dans leur bulle. Ils ne réalisent pas qu’ils parlent : ils ne voient ni n’entendent les autres. Cependant, parfois, ils souhaitent signifier à l’enseignant que son cours les ennuie. Comme si le ‘bavardage’ du prof faisait écho au leur. On peut difficilement exclure le bavardage de la relation pédagogique. Il est donc en partie induit par la manière dont on traite les élèves. Que faire ? Leur donner la parole, sous toutes les formes, en groupes, par le biais d’exposés, sur un mode institué, pour éviter que tout rapport au bavardage soit du registre de la sanction. Les lycéens manquent d’espaces pour s’exprimer ! Le bavardage n’est pas anodin. C’est un appel. »

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